Les "châu ban" de la dynastie des Nguyên, des preuves de la souveraineté maritime du Vietnam

Nhân Dân en ligne - Le Vietnam possède un grand nombre de documents anciens qui attestent de sa souveraineté sur les archipels Hoàng Sa (Paracel) et Truong Sa (Spratly). Parmi les plus convaincants: des actes administratifs de la dynastie des Nguyên (1802-1945), récemment reconnus par l’UNESCO.

Les "châu ban" de la dynastie des Nguyên, des preuves de la souveraineté maritime du Vietnam, ont été présentés largement au public. Photo: Minh Duc/VNA/CVN.
Les "châu ban" de la dynastie des Nguyên, des preuves de la souveraineté maritime du Vietnam, ont été présentés largement au public. Photo: Minh Duc/VNA/CVN.

Alors que la Chine n’a donné aucune preuve concrète de sa souveraineté sur les archipels Truong Sa et Hoàng Sa, le Vietnam possède, pour sa part, des sources variées lui permettant d’affirmer son autorité sur ces dernières. D’après l’historien Nguyên Nha, le Vietnam conserve des documents, écrits ou cartographies, qui montrent que les seigneurs Nguyên (1600-1802) et la dynastie des Nguyên (1802-1945) ont déployé très tôt des activités et établi leur souveraineté dans ces deux archipels.

«Nous avons des preuves pour conclure que Dôi Hoàng Sa (une brigade royale de Hoàng Sa) a été créée durant le règne du seigneur Nguyên Phuc Lan (1635-1648). Elle a poursuivi sa mission sur l’archipel durant les sept règnes des seigneurs Nguyên, soit près d’un siècle et demi», explique l’historien Nguyên Nha. Et d’ajouter : «Cette flotte militaire royale a donné ensuite naissance à la brigade de Bac Hai. Les seigneurs Nguyên créèrent les brigades de Hoàng Sa et de Bac Hai dans le but de les envoyer exploiter des fruits de mer à Hoàng Sa et garder les eaux qui l’entourent».

Des documents reconnus par l’UNESCO

Les châu ban de la dynastie des Nguyên (1802-1945) sont l'ensemble des documents et des actes administratifs promulgués depuis l’intronisation de l’empereur Gia Long (1802-1819) jusqu’à l’abdication du roi Bao Dai (1926-1945). Ces documents, actuellement conservés au Centre national des archives No1, comprennent différents types de textes : ordonnances royales, édits du roi, prescriptions royales, placets, requêtes, rapports des Luc Bô (six institutions royales ayant les mêmes fonctions que le ministère actuel) présentés au roi, ou circulaires et ordres émis par des mandarins de haut rang, etc. La plupart, approuvés, ratifiés, paraphés, signés ou scellés en rouge par le roi, sont écrits sur papier do (papier rouge traditionnel épais et résistant). Les contenus concernent les affaires politiques, militaires, diplomatiques, économiques, culturelles et sociales.

Récemment, les châu ban de la dynastie des Nguyên ont été reconnus par l’UNESCO patrimoine documentaire lors de la conférence plénière du Comité du programme «Mémoire du monde pour la région de l’Asie-Pacifique», tenue le 14 mai à Guangzhou (Chine). «La reconnaissance mondiale des +châu ban+ de la dynastie des Nguyên confirme la souveraineté territoriale et maritime du Vietnam. De nombreux documents attestent des ordres promulgués par les empereurs concernant la protection des archipels de Hoàng Sa et Truong Sa», précise Phan Thanh Hai, directeur du Centre de conservation des vestiges de l’ancienne Cité impériale de Huê.

Cette reconnaissance revêt «une grande signification, notamment dans un contexte où la Chine a implanté illégalement sa plate-forme de forage Haiyang Shiyou-981 (Hai Duong-981) dans la zone économique exclusive du Vietnam», ajoute Phan Thuân An, chercheur sur la dynastie des Nguyên.

Des preuves irréfutables

D’après le Professeur Phan Huy Lê, président de l'Association des sciences historiques du Vietnam, l’ensemble des châu ban comprend 773 liasses avec près de 200.000 feuilles documentaires des 13 empereurs Nguyên durant la période 1802-1945. Parmi les 200.000 feuilles, une vingtaine traite clairement des activités liées à la mise en place du droit à la souveraineté des empereurs Nguyên sur les archipels de Truong Sa et Hoàng Sa.

Parmi les châu ban contenant les preuves les plus convaincantes, il faut citer celui daté du 12 février 1836 de la 17e année de règne du roi Minh Mang (1820-1841). Ratifiée par le roi, cette requête du Bô Công (ministère de la Construction) présente des demandes à la cour pour préparer des bornes de bois afin que la flotte royale puisse partir prospecter à Hoàng Sa au délai fixé. Le texte précise : «Chaque bateau doit apporter dix bornes de bois». On peut lire sur chaque pieu des écritures gravées qui précise le nom du roi, de la flotte maritime royale, dirigée par son sous-chef Pham Huu Nhât et l’objectif de sa mission à Hoàng Sa pour examiner et cadastrer le relief. Les bornes servent de point de repère.

Sur un autre châu ban daté du 2 avril 1838 de la 19e année de règne du roi Minh Mang, le Bô Công rapporte la situation météorologique afin de lancer des missions de sondage à Hoàng Sa. Toujours durant la 19e année de règne du roi Minh Mang, le châu ban daté du 21 juin 1838 du Bô Công rapporte que sa mission à Hoàng Sa «a sondé 25 îles de la 3e région et réalisé quatre cartes».

Sous le règne du Thiêu Tri (1841-1847), un châu ban daté du 28 décembre 1847 précise : «…La région de Hoàng Sa appartient aux frontières maritimes vietnamiennes. Chaque année, la cour y envoie ses bateaux militaires en vue de sonder et d’inspecter afin de définir les voies maritimes». Dans ce texte, le Bô Công demande au roi de reporter la mission printanière à Hoàng Sa en raison de préparatifs insuffisants.

Des miliciens défendant Hoàng Sa récompensés

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Le "châu ban" du 15 février 1939 adressé au roi Bao Dai pour demander la remise de l’Ordre royal à la brigade des miliciens du Centre ayant établi une base militaire à Hoàng Sa. Photo: TTH/CVN.

Les "châu ban" du règne du roi Bao Dai (1925-1945) abordent également les missions militaires à Hoàng Sa. D’après Phan Thuân An, un chercheur sur la cour de Huê, en 2009, il a offert à l’État deux châu ban de cette époque, liés à la souveraineté du Vietnam sur l’archipel : «Ces deux textes, datés respectivement du 3 février 1939 et du 15 février 1939, écrits en vietnamien, ont été présentés au roi afin de demander des récompenses pour certaines personnes méritantes dans la défense de l’archipel de Hoàng Sa. Ils ont été scellés et signés par le roi Bao Dai. Ces documents originaux affirment que la cour de Huê a exercé sa souveraineté sur l’archipel Hoàng Sa».

Et pour cause, le châu ban du 3 février 1939 (13e année de règne de Bao Dai) a été élaboré par Pham Quynh, chef du Cabinet civil de Sa Majesté du Palais impérial. Il adresse au roi la demande du Résident supérieur de l’Annam (ancien nom du Vietnam) de remettre l’Ordre royal à Louis Fontan, chef d’une brigade des miliciens à ceinture bleue (gardes provinciaux) de Quang Ngai, basée sur Hoàng Sa, malheureusement décédé deux jours avant la requête de Pham Quynh.

Le deuxième, daté du 15 février 1939, est aussi un placet soumis au roi pour lui demander la remise d’un Ordre royal à la brigade des miliciens du Centre ayant réglé des troubles dans les régions montagneuses et établi une base militaire à Hoàng Sa. Ainsi, comme évoqué précédemment, une brigade royale de Hoàng Sa a été créée sous le règne du seigneur Nguyên Phuc Lan (1635-1648) et est restée en activité jusqu’à la fin des règnes des seigneurs Nguyên en 1802.

Les châu ban promulgués durant le règne des 13 empereurs de la dynastie des Nguyên (1802-1945) nous donnent des preuves certaines de la mise en œuvre d’activités à Hoàng Sa. La reconnaissance par l’UNESCO renforce leur valeur, attestant par la même de la souveraineté du Vietnam sur les archipels de Truong Sa et Hoàng Sa.