La diplomatie populaire vietnamienne s’est forgée une identité propre dans ses relations avec ses voisins, fondée sur la sincérité, la souplesse et l’innovation. C’est ce qu’a confié Mme Tran Thi Xuan Oanh, cheffe du Département Asie-Afrique de l’Union des organisations d’amitié du Vietnam (VUFO), lors d’un entretien avec le journal Thoi Dai.
Des liens tissés par la reconnaissance et la mémoire
Avec le Laos, Mme Oanh évoque avec émotion une initiative de solidarité : la construction d’une maison offerte à Mme Kanchia, dans la province de Sekong. Ancienne résistante, elle avait sauvé un soldat vietnamien malade en lui cédant son propre lait. En 2017, année de l’amitié Vietnam–Laos, la Maison d’amitié a été financée par des dons de nombreuses organisations et entreprises vietnamiennes. Le geste a été salué par le gouvernement laotien, qui a décerné l’Ordre de l’Amitié à l’Association d’amitié Vietnam–Laos.
Au Cambodge, le programme « Graines de l’amitié » assure depuis plus d’une décennie un parrainage pour les étudiants cambodgiens au Vietnam. Environ 700 jeunes ont déjà bénéficié de cet accompagnement qui va au-delà de l’apprentissage de la langue ou de la culture : des liens familiaux durables se nouent avec les familles d’accueil vietnamiennes, certaines étant même invitées à des mariages au Cambodge. Le programme incarne une amitié vivante et intergénérationnelle.
Avec la Chine, plusieurs actions de reconnaissance ont marqué les dernières années. En 2024, à l’occasion du 70e anniversaire de la victoire de Dien Bien Phu, des familles d’anciens conseillers militaires chinois ayant aidé le Vietnam durant la guerre de résistance contre la France ont été invitées à visiter le pays. Parmi eux, les descendants des généraux Wei guoqing et Chen Geng. En septembre 2025, une délégation chinoise comprenant des représentants de l’hôpital de Nanxishan — qui avait soigné des blessés vietnamiens pendant la guerre de résistance contre les impérialistes américains — a été accueillie pour les célébrations des 80 ans de la fête nationale. À cette occasion, l’hôpital a reçu l’Ordre de l’Amitié. Son directeur, M. Liu Honglin, a souligné le rôle de son établissement comme passerelle de coopération sino-vietnamienne.
Une méthode fondée sur l’écoute, la compréhension et l’engagement
« Le guide essentiel des échanges populaires, selon moi, c’est la sincérité, le respect mutuel et la volonté de comprendre l’autre », affirme Mme Oanh. La coopération avec les partenaires laotiens repose sur l’accompagnement et la confiance ; avec les Cambodgiens, sur la solidarité et l’attention ; avec les Chinois, sur une coordination méthodique et professionnelle. La flexibilité et l’initiative sont indispensables pour construire un consensus.
En huit mois, l’Union a ainsi organisé deux rencontres populaires majeures lors de visites bilatérales de haut niveau entre le Vietnam et la Chine. Chaque événement a été conçu en étroite coordination avec les organisations partenaires chinoises, illustrant une diplomatie de terrain nourrie d’écoute et de réciprocité.
L’art de « faire ami » : fidélité et proximité, même en temps de crise
Pour Mme Oanh, « l’art de l’amitié », c’est d’abord la fidélité, notamment dans les moments difficiles. Elle rappelle que durant la pandémie de COVID-19, le Vietnam a fourni une aide sanitaire au Laos et au Cambodge, tout en prenant soin de ses ressortissants vulnérables, des étudiants et des anciens combattants étrangers.
Les échanges culturels, artistiques et sportifs en zones frontalières entre le Vietnam et ses trois voisins sont selon elle des outils puissants pour renforcer les liens communautaires.
Des programmes emblématiques comme « Graines de l’amitié », les formules d’hébergement en famille pour étudiants laotiens, ou les forums d’échange pour les étudiants vietnamiens en Chine constituent autant d’exemples concrets de diplomatie souple et tournée vers la jeunesse, considérée comme la clef de voûte de l’amitié future.
Une diplomatie populaire connectée et tournée vers l’avenir
Outre les actions humaines, Mme Oanh souligne l’importance de la coopération économique, avec des forums et rencontres d’affaires organisés par les associations d’amitié. Ainsi, lors d’un déplacement au Laos, l’Association Vietnam–Laos a coorganisé une rencontre entre jeunes entrepreneurs des deux pays, aboutissant à des recommandations concrètes transmises aux autorités.
L’Union se modernise également en adoptant les outils numériques : diffusion d’archives numérisées, réseaux sociaux, visioconférences… Ces formats permettent de toucher un public plus large, notamment les jeunes générations.
Mme Oanh propose trois axes pour renforcer la diplomatie populaire avec les pays voisins :
Intensifier les programmes d’échange pour les jeunes et étudiants du Vietnam, du Laos, du Cambodge et de Chine — un investissement pour l’amitié de demain.
Mobiliser les organisations de proximité dans les zones frontalières pour renforcer la coopération locale, dans les domaines de l’économie, de l’environnement ou de la résilience.
Exploiter pleinement le potentiel du numérique et des réseaux sociaux pour diffuser les valeurs de l’amitié et toucher de nouveaux publics.
Selon Thoidai.com.vn