Nhân Dân en ligne - Pour la première fois dans l’histoire, un patrimoine a été retiré de la liste de l’UNESCO de ceux nécessitant une sauvegarde urgente et ajouté à la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité. C'est le cas du chant “ xoan “, un genre de musique folklorique du Nord du Vietnam, qui marque un exploit pour faire revivre l’héritage de “ xoan ”, qui a traversé des centaines de générations.
Le chant “ xoan ”, également appelé le chant Lai Lèn, le chant “ dúm ”, le chant “ tho ” ou le chant “ cua dinh ”, est un type unique de trésor culturel populaire de la terre ancestrale de Phu Tho. Le chant Xoan est généralement pratiqué devant la maison communale au printemps et les jours de Fête.
Issu de la province de Phu Tho (au Nord), le hat Xoan a persisté presque 2 000 ans, malgré les soubresauts de l’histoire.
Il y a beaucoup de légendes différentes liées à l'origine de cet art.
Une légende raconte qu’il était une fois sous le règne des Rois Hùng, il y a 2 000 ans, une reine enceinte souffrant de contractions liées à la grossesse. Sur le conseil d’une sage-femme, le Roi invita Quê Hoa, une jolie fille réputée pour son talent de chanteuse et danseuse, à venir se produire au service de la reine.
Par miracle, la voix veloutée accompagnée de gestes souples de Quê Hoa adoucît la douleur de la reine, qui mit au monde trois princes. Conscient du miracle, le roi ordonna aux odalisques de la cour d’apprendre ces airs agrémentés de beaux gestes chorégraphiques, qu’il appella “ hat xuân ” (chant printanier).
Le “ hat xuân ” est depuis destiné à accompagner les cérémonies rituelles, notamment lors des fêtes printanières. Plus tard, à cause d’une princesse dénommée Xuân Nuong, on a changé le nom de hat xuân en hat xoan pour éviter de reprendre le nom de la princesse, considéré comme « tabou ».
Une autre légende raconte qu’au cours du voyage du Roi Hùng à la recherche du terrain pour installer sa capitale, il s'arrêta quelques instants dans le village de Phu Duc, commune de Kim Duc, province de Phu Tho, où un groupe de bergers jouait et chantait joyeusement. Le Roi demanda alors à son entourage d'enseigner aux enfants d'autres chansons folkloriques. Les chansons du Roi Hùng et des éleveurs ont été considérées comme les premières chansons “ xoan ” et on pense que Phu Duc est le berceau de cette forme artistique.
Bien qu'il existe de nombreuses théories non confirmées parmi les experts sur la naissance du chant “ xoan ”, la plupart des récits et recherches sur les légendes, l’histoire, l’archéologie et la sociologie, ainsi que les vestiges de croyances contenues dans ces paroles, confirment que cette forme d’art remonte à l’époque des Rois Hung.
Étant une forme de spectacle, le chant “ xoan ” comprend du chant, de la danse, des percussions et des cliquettes. Il est étroitement lié au culte des Rois Hùng, les fondateurs du pays. La population de la province de Phu Tho, qui a créé le chant “ xoan ”, l’interprétait dans les maisons communales de village, les temples et les sanctuaires dédiés au culte des Rois Hùng au printemps. Le mot “ xoan ” signifie « printemps ». Le cycle complet d’interprétation du chant “ xoan ” comprend 3 phases : le chant de dévotion (Hát thờ), qui loue les vertus des Rois Hùng et des divinités tutélaires du village ; les chants sollicitant une bonne santé et de la chance (Quả cách) avec 14 répertoires rendant hommage à la nature, à l’humanité et à la vie quotidienne de la communauté ; et le chant de fête (hát hội) qui célèbre les couples amoureux.
Le chant “ xoan ” a pour caractéristique que chanteurs et instrumentistes alternent leurs modulations à un intervalle d’une quarte juste et qu’il est doté d’une structure simple avec peu de notes ornementales. Les mouvements de danse accompagnant le chant “ xoan ” se veulent une imitation ou une illustration des activités quotidiennes de la population.
Après avoir chanté dans leur maison communale du 2e au 5e jour du Nouvel An lunaire, les guildes de “ xoan ” se rendent auprès des autres communautés qui célèbrent le culte des Rois Hùng afin de participer à des échanges culturels conviviaux.
Les pratiquants du chant “ xoan ” sont regroupés en guildes musicales appelées Phường. Chaque guilde a un chef, appelé « Trùm ». Par le passé, il fallait être un homme pour être Trùm mais aujourd’hui le rôle du chef peut également être occupé par une femme. Les chefs sont chargés de la transmission et de l’organisation des activités des guildes. De nos jours, chaque guilde comprend 30 à 100 membres. Les hommes sont appelés « kép » et les femmes « đào ».
Les guildes de Xoan se concentrent dans les communes de Kim Đuc et de Phuong Lâu situées en bordure de la rivière Lô dans la ville de Viêt Tri, province de Phu Tho, à 80 km au nord-est de la capitale Hanoi. Il existe 3 guildes de chant “ xoan ” dans la commune de Kim Duc : Kim Dai, Phù Duc et Thet. La guide de “ xoan ” d’An Thai se trouve dans la commune de Phuong Lâu.
Le chant “ xoan ” est également très populaire dans les 7 autres arrondissements et communes de la ville de Viêt Tri, dans 23 villages de 10 districts (Câm Khê, Doan Hùng, Lâm Thao, Phù Ninh, Tam Nông, Tân Son, Thanh Ba, Thanh Son, Thanh Thuy et la ville de Phu Tho dans la province de Phu Tho), dans les communes de Kim Xa et Duc Bac au bord de la rivière Lô, dans les districts de Vinh Tuong et de Sông Lô de la province de Vinh Phuc (au Nord).
En tant qu’art du spectacle ancré dans une communauté, le chant “ xoan ” favorise la compréhension culturelle, la cohésion de la communauté et le respect mutuel.
A travers les paroles et les danses, les villageois et les guildes de “ xoan ” expriment leur gratitude envers les Rois Hùng et les prient de leur apporter le bonheur, la prospérité, de bonnes conditions climatiques, d’abondantes récoltes, la vitalité, et transmettent ainsi aux jeunes le code moral de la nation : « quand tu bois de l’eau, pense à la source ».
Le chant “ xoan ” répond aux besoins d’échange culturel et de cohésion communautaire réciproques. En pratiquant le chant “ xoan ” à plusieurs, les pratiquants apprécient l’harmonie et le respect mutuel qu’il leur inspire. Cela les aide à oublier leurs difficultés et leurs peines.
Aujourd’hui, le chant “ xoan ” est également mis en avant pour répondre aux besoins d’éducation morale. Il s’inscrit dans un mode de vie, s’adapte à l’environnement et à la nature à travers certaines variantes de création récente dont les paroles sont plus adaptées à l’âge et aux centres d’intérêt des jeunes, mais toujours fondées sur des mélodies du chant “ xoan ”.
Le chant “ xoan ” ne consiste pas seulement à chanter et à danser, c'est aussi l'art de la performance. Les artistes “ xoan ” doivent maîtriser les techniques du chant, de la danse et du théâtre.
La complexité, la richesse et la flexibilité du chant “ xoan ” sont difficiles à étudier et à populariser.
Lors de la lutte contre les envahisseurs étrangers, toutes les ressources intérieures étaient réservées aux guerres de résistance, par conséquent, les formes d'art nationales traditionnelles n'ont pas été développées. Bon nombre de sites utilisés pour les représentations de “ xoan ” ont été détruits ou se sont détériorés.
En outre, la pauvreté causée par les guerres a poussé les populations locales, en particulier les jeunes, à se rendre dans d’autres localités pour gagner leur vie et ils n’ont plus prêté attention au chant “ xoan ”. L’artisan Lê Xuân Ngu, chef de la troupe d'art de Phu Duc, a confié avec inquiétude : « Bien que l'on pense que Kim Duc est le berceau du chant “ xoan ”, seules les personnes âgées comme moi comprennent la forme artistique et se souviennent de certaines chansons anciennes. Dans les festivals du village, les chansons de “ xoan ” ont été remplacées par de nouvelles chansons. »
Notamment, le chant “ xoan ” a risqué d'être perdu au cours des dernières années parce que l’on pensait que cette forme d'art était le produit du féodalisme avec une signification dépassée et redondante. De plus, les documents servant à l'étude du chant “ xoan ” sont très limités, ce qui complique la préservation et la promotion du patrimoine unique.
Le chant “ xoan ” a été reconnu par l'UNESCO comme nécessitant une protection urgente en 2011. À cette époque, il n'y avait que 13 clubs de chant “ xoan ” avec près de 300 membres.
La complexité, la richesse et la flexibilité du chant “ xoan ” sont difficiles à étudier et à populariser.
Six ans après avoir strictement respecté ses engagements envers l'UNESCO, la communauté et les autorités de la province de Phu Tho ont compilé les dossiers à soumettre à l'UNESCO. En 2013, la province de Phu Tho a préparé un projet de 7,85 millions de dollars intitulé « Maintien et développement du patrimoine culturel immatériel de l'humanité - chant “ xoan ” à Phu Tho », financé par le gouvernement.
Selon la vice-ministre de la culture, des sports et du tourisme et vice-présidente de l'UNESCO Vietnam, Dang Thi Bich Liên, des représentants des provinces aux héritages reconnus se sont mis d'accord sur des plans spécifiques pour préserver le patrimoine et l'intégrer dans la vie quotidienne.
Après avoir été répertorié en tant que patrimoine culturel immatériel mondial nécessitant une protection urgente, Phu Tho a déployé de grands efforts pour préserver et faire revivre ce chant. Le Vietnam a soumis un rapport à l'UNESCO indiquant que le chant “ xoan ” avait connu un renouveau grâce aux efforts considérables déployés par le Gouvernement et la population locale.
Lors de sa 12e session à Jeju, République de Corée, le 8 décembre 2017, le Comité intergouvernemental de l'UNESCO pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel a pris la décision de retirer le chant “ xoan ” de la Liste du patrimoine culturel immatériel nécessitant une sauvegarde urgente de l’UNESCO et l’a ajouté à la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité.
24 États membres du Comité intergouvernemental ont déclaré qu’ils appréciaient les efforts de la province pour préserver le patrimoine et améliorer la forme artistique. Ils ont également salué les efforts de Phu Tho pour préserver le chant “ xoan ” et ont décidé de le transférer sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité.
Selon le vice-président de la province de Phu Tho, Hà Ke San, la popularité du chant “ xoan ” a été menacée de disparaitre pendant un certain temps, mais elle n’a jamais complètement disparu. En 2009, parmi les 31 artisans âgés de 80 à 104 ans de la province, seuls sept artisans avaient la capacité de pratiquer et d'enseigner le “ xoan ”. À ce jour, le chiffre est maintenant de plus de 60 artisans. En 2010, il y avait 13 clubs de chant “ xoan ” avec près de 300 membres à Phu Tho. À ce jour, la diffusion du chant “ xoan ” est organisée par 34 clubs à travers la province et par plus de 1 500 membres réguliers, ainsi que par des centaines d'autres personnes intéressées.
Le directeur du Département provincial de la culture, des sports et du tourisme de Phu Tho, Nguyên Ngoc An, a déclaré qu'un certain nombre d'activités promotionnelles avaient été menées par d'anciens chanteurs “ xoan ” pour populariser les chansons “ xoan ” auprès des jeunes générations. Entre 2012 et 2015, 51 personnes ont été honorées en tant qu'artistes distingués de “ xoan ”.
En outre, le chant “ xoan ” a été enseigné dans des classes supplémentaires dans 90 écoles primaires et élémentaires à Phu Tho. Tous les enseignants des écoles de la ville de Viêt Tri peuvent jouer et enseigner le chant “ xoan ”.
Un projet de conservation et de promotion du chant “ xoan ” pour la période 2013-2020 a été préparé par la province et approuvé par le gouvernement. Parallèlement à la réparation des sites de reliques connexes, la province a reconnu et soutenu des artisans et récupéré les anciennes activités de chant. Jusqu'à 20 des 30 sites Xoan de Phu Tho, en particulier le temple Lai Len et les maisons communales Thet, Kim Doi et An Thai, ont été restaurés et améliorés. La province a préparé des plans de financement détaillés pour l'enseignement et la promotion du chant “ xoan ” jusqu'en 2020.
Selon Lê Thi Minh Ly, directrice du Centre pour la Recherche et la Promotion du patrimoine culturel au sein de l'Association du Patrimoine culturel du Vietnam, le chant “ xoan ” est le premier héritage au monde à avoir été retiré de la liste des patrimoines en danger. Grâce aux efforts positifs de conservation et de promotion du chant “ xoan ” dans toute la communauté, le chant “ xoan ” a été relancé et s'est progressivement développé. La direction et la pratique de la province de Phu Tho en matière de préservation et de promotion des valeurs du patrimoine de chant “ xoan ” en sont un exemple brillant et devraient être reproduites dans d’autres localités ayant un héritage culturel.
Phu Tho promet de travailler avec tous les moyens appropriés pour promouvoir le rôle de la communauté en tant que propriétaire du patrimoine et continuer à mettre en œuvre des mesures pour protéger le patrimoine conformément à la Convention de l'UNESCO pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel de 2003, digne de sa valeur en tant que patrimoine culturel immatériel de l'humanité.
Dans un proche avenir, la province de Phu Tho continuera à promouvoir le développement du tourisme local, dans lequel le chant “ xoan ” est un produit touristique culturel spécifique. Le comité provincial de la Culture, des Sports et du Tourisme met à jour son site Web de chant “ xoan ” en plusieurs langues, tout en coopérant avec la compagnie aérienne nationale Vietnam Airlines pour publier des informations sur le patrimoine dans le Vietnam Heritage Magazine.
De plus, la province s’est rapprochée des agences de voyages internationales pour apporter aux visiteurs internationaux l'expérience du chant “ xoan ” dans son espace culturel d'origine. Phu Tho s'est associé à quatre agences de voyage pour accueillir des délégations américaines, australiennes et canadiennes afin de faire l'expérience régulière de “ xoan ”, au moins deux voyages par voie navigable chaque mois, combinant l'expérience du chant “ xoan ” au tourisme villageois traditionnel et à l'artisanat local traditionnel.
Le chant “ xoan ” sera davantage promu dans le monde entier grâce à la coopération entre les autorités de Phu Tho et les agences de presse. Au niveau national, Phu Tho a intensifié la finalisation de livres et de CD-ROM pour enseigner le chant “ xoan ” dans les écoles, tout en organisant l'enseignement et la pratique du chant “ xoan ” pour les troupes d'art “ xoan ” locales.
La décision de l'UNESCO de retirer le chant “ xoan ” de la liste des patrimoines nécessitant une sauvegarde urgente et de l'ajouter à la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l'humanité démontre une fois de plus qu'avec les efforts de ceux qui détiennent le patrimoine, l'héritage du chant “ xoan ” à Phu Tho a pu être préservé et valorisé.
Espérons que, grâce aux mesures concrètes et efficaces susmentionnées et à la participation de la communauté, ce type de musique folklorique sera maintenu tel qu’il est aujourd’hui.