Les jalons importants dans l’histoire du Parti et de la Révolution vietnamienne

Le 28 janvier 1941, marque un tournant décisif dans l'histoire du Parti et de la révolution vietnamienne, avec le retour au pays du jeune Nguyên Ai Quôc (Président Hô Chi Minh) pour diriger directement la Révolution. En peu de temps, il a pris des décisions éclairées et opportunes pour diriger la révolution vietnamienne : construire des bases révolutionnaires, fonder le Front du Viêt Minh, développer des zones libérées, créer les premières forces armées régulières. Ces points forts ont marqué une étape importante dans le développement du mouvement révolutionnaire vietnamien, et ont mené au succès de l'Insurrection d'Août 1945.


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Le camarade Nguyên Ai Quôc (premier à gauche dans la rangée du bas) pose avec quelques délégués participant au Ve Congrès de l'Internationale communiste à Moscou, en Russie, du 17 juin au 8 juillet 1924.

Le camarade Nguyên Ai Quôc (premier à gauche dans la rangée du bas) pose avec quelques délégués participant au Ve Congrès de l'Internationale communiste à Moscou, en Russie, du 17 juin au 8 juillet 1924.

Début 1938

La menace d'une nouvelle guerre mondiale se faisait sentir. Alors que Nguyên Ai Quôc poursuivait ses études à l'Institut des études des nationalités et des colonies à Moscou, il suivait de près la situation et préparait son retour au pays.

Le 6 juin 1938, il écrivit à un camarade du Comité exécutif de l'Internationale communiste pour solliciter son aide afin de rentrer en activité. Sa demande fut approuvée.

En octobre 1938, Nguyên Ai Quôc quitta l'ex-Union soviétique (URSS). Au cours de l'année suivante, il passa par la base du Parti communiste chinois à Yan'an, travailla un temps au sein de la 8e Armée de route (une unité militaire du Parti communiste chinois), puis se déplaça vers le Yunnan, près de la frontière sino-vietnamienne, afin d'établir des contacts avec l'organisation du Parti du Vietnam.

Le camarade Phùng Chi Kiên.

Le camarade Phùng Chi Kiên.

Début de l’année 1940

À Kunming, Nguyên Ai Quôc rencontra Phùng Chi Kiên, responsable du Comité des opérations extérieures du Parti. Il écouta le rapport de ce dernier sur le mouvement révolutionnaire au Vietnam ainsi que sur les activités de l’organisation du Parti à Kunming. Apprenant que Lâm Ba Kiêt (alias Pham Van Dông) et Duong Hoài Nam (alias Vo Nguyên Giap) venaient d’arriver du Vietnam au Yunnan (juin 1940), Phùng Chi Kiên organisa une rencontre entre eux et Nguyên Ai Quôc au parc Cuihu (Kunming) afin de leur permettre de faire état de la situation dans le pays.

Lorsqu’il fut informé de la capitulation du gouvernement français face à l’Allemagne nazie, Nguyên Ai Quôc convoqua une réunion des cadres à Kunming pour analyser la situation et discuter des préparatifs en vue de son retour au Vietnam. Il souligna l’étroite interdépendance entre le colonialisme en métropole et en Indochine, tout en affirmant : « La défaite de la France constitue une opportunité majeure pour la révolution vietnamienne. Nous devons tout mettre en œuvre pour rentrer immédiatement au pays et exploiter cette conjoncture. Tout retard serait une faute envers la révolution. »

Alors que Nguyên Ai Quôc s’activait à organiser son retour, l’invasion japonaise de septembre 1940 et la reddition de la France sur l’ensemble du territoire indochinois placèrent le peuple vietnamien sous une double oppression. Plusieurs soulèvements éclatèrent, notamment l’insurrection de Bac Son et l’insurrection de Nam Ky. Tous furent écrasés dans le sang par les forces coloniales françaises.

Le secrétaire général du Parti, Nguyên Van Cu et de nombreux membres du Comité central furent arrêtés, et l’organisation du Parti sévèrement réprimée. Face à cette situation critique, Nguyên Ai Quôc fut plus que jamais déterminé à rentrer au pays pour prendre directement la direction de la révolution. 

Dans un premier temps, il envisagea de rentrer par la route Kunming-Lào Cai et envoya Bùi Duc Minh et Hoàng Van Lôc à Hà Khâu afin de collecter des informations et d’établir une liaison avec l’intérieur du pays. Toutefois, il constata que, à la suite de l’échec de l’insurrection de Yên Bai, la répression coloniale avait porté un coup sévère au mouvement révolutionnaire, empêchant sa reprise. De plus, les bases du Parti restaient fragiles, et le pont de Hô Kiêu, reliant la frontière sino-vietnamienne, avait été détruit le 10 septembre 1940. Dans ces conditions, le plan initial de rentrer via Lào Cai dut être abandonné.

Avec la vision stratégique d’un leader de génie, Nguyên Ai Quôc a décidé de choisir Cao Bang comme premier point d’arrêt. Il a découvert que Cao Bang réunissait les conditions idéales : un moment opportun, un lieu favorable et un peuple uni.

Dès les années 1938-1939, le Comité provincial du Parti à Cao Bang a dirigé la construction d’une base révolutionnaire dans la région de Luc Khu-Pac Bo dans le district de Hà Quang, comprenant des communes situées à la frontière entre le Vietnam et la Chine. Ces conditions ont permis l’établissement de la base et le développement du mouvement révolutionnaire.

Les préparatifs pour le retour de Nguyên Ai Quôc au pays ont été menés dans le plus grand secret et avec une grande urgence. À la fin du mois de décembre 1940, Nguyên Ai Quôc et certains cadres se sont installés dans le village de Tân Khu, à Tinh Tây (province du Guangxi, Chine), où il a rencontré le camarade Hoàng Van Thu, envoyé par le Comité central du Parti pour lui rendre compte de la situation intérieure et lui proposer de rentrer au Vietnam par Cao Bang.

Illustration de Nguyên Ai Quôc rentrant au pays le 28 janvier 1941.

Illustration de Nguyên Ai Quôc rentrant au pays le 28 janvier 1941.

Le 28 janvier 1941 (le 2e jour du Nouvel An lunaire du Serpent 1941)

Après 30 ans d’exil, le leader Nguyên Ai Quôc et ses compagnons ont franchi la borne frontière 108 entre le Vietnam et la Chine pour arriver au village de Pac Bo, commune de Truong Hà, district de Hà Quang, province de Cao Bang. Ce moment sacré a marqué une nouvelle étape du développement de la révolution vietnamienne.

De retour au pays pour diriger directement la révolution, Nguyên Ai Quôc a rapidement convoqué et présidé la 8e session du Comité central du Parti en mai 1941.

La conférence a déterminé que la tâche la plus urgente de la révolution vietnamienne à cette époque était la libération nationale : « En ce moment, les intérêts des groupes et des classes doivent être placés après la question vitale de la survie de la nation et du peuple.

Si nous ne parvenons pas à résoudre le problème de la libération nationale, si nous ne revendiquons pas l’indépendance et la liberté pour l’ensemble du peuple, alors non seulement toute la nation continuera à vivre sous le joug de l’oppression, mais les droits des groupes et des classes ne pourront jamais être réclamés, même dans mille ans » (2).

La conférence a fixé comme tâche la consolidation et le renforcement du système organisationnel du Parti, ainsi que la réorganisation des organes dirigeants les plus élevés du Parti. Un Comité central officiel et un Bureau politique ont été élus. Le camarade Truong Chinh a été élu Secrétaire général.

Toujours lors du 8e Plénum du Comité central du Parti, le front Viêt Minh a été créé le 19 mai 1941, à l’initiative de Nguyên Ai Quôc (le Président Hô Chi Minh). Ce front avait pour mission de « 1. Rendre le Vietnam complètement indépendant ; 2. Rendre le peuple vietnamien heureux et libre ».

Avec dans la main le drapeau de la libération nationale, le front Viet Minh a rassemblé toutes les classes de la population pour la lutte pour l’indépendance et la liberté de la Patrie.

Le 8e Plénum du Comité central du Parti, qui a eu lieu en mai 1941 sous la présidence de Nguyên Ai Quôc, a déterminé : « La révolution indochinoise doit se terminer par un soulèvement armé… ».

De 1941 à 1944, de nombreux groupes de guérilla et d’autodéfense ont été créés dans différents communes et districts de la province de Cao Bang. Ces groupes ont été placés sous la direction de Nguyên Ai Quôc.

Les 1er, 2e et 3e pelotons de l’Armée du salut national – des forces armées révolutionnaires fondées lors de l’insurrection de Bac Son – ont été renforcés. Ces forces avaient pour mission de soutenir les mouvements de lutte révolutionnaire au sein de la population, en particulier dans les provinces de Cao Bang, Lang Son et Thai Nguyên.

La Brigade de propagande armée pour la libération du Vietnam, prédécesseur de l’Armée populaire du Vietnam, a été créée le 22 décembre 1944 dans la forêt de Trân Hung Dao (province de Cao Bang).

La Brigade de propagande armée pour la libération du Vietnam, prédécesseur de l’Armée populaire du Vietnam, a été créée le 22 décembre 1944 dans la forêt de Trân Hung Dao (province de Cao Bang).

Début décembre 1944

Début décembre 1944, le leader Nguyên Ai Quôc a demandé à Vo Nguyên Giap d’accélérer la création de la Brigade de propagande armée pour la libération du Vietnam, prédécesseur de l’Armée populaire du Vietnam. Les expériences prises dans l’édification du front Viêt Minh et des forces armées à Cao Bang constituaient une base importante pour le développement des forces révolutionnaires dans la zone de libération composée de 6 provinces : Cao – Bac – Lang – Hà – Tuyên – Thai.

Nguyên Ai Quôc a souligné l’importance de mener des « soulèvements partiels » avant d’organiser un soulèvement général en temps opportun pour remporter la victoire finale.

Il a demandé l’organisation des cours de formation politico-militaire de courte durée et la création des forces armées de guérilla à Cao Bang.

À Cao Bang, Nguyên Ai Quôc dirigea également la compilation des Dix disciplines et des Tactiques de base de guérilla, comme matériel pédagogique et de formation pour les guérilleros.

En même temps, il demanda directement aux organisations de salut national de Cao Bang de faire le bilan et de tirer des expériences pour étendre le Front Viêt Minh à travers le pays (4). Le choix de Cao Bang comme le lieu d'installation et la construction d'une base révolutionnaire ont démontré la vision stratégique du Nguyên Ai Quôc, son intelligence et sa pensée dialectique dans la reconnaissance de la relation entre le mouvement révolutionnaire d'une localité et celui de l'ensemble du pays, entre le mouvement révolutionnaire d'une région et celui de l'ensemble du pays.

En même temps, il a affirmé la justesse et la créativité de ses méthodes révolutionnaires, ainsi que sa perception aiguë des événements actuels et sa prévision des perspectives de développement de la révolution vietnamienne.

Sous la direction de Nguyên Ai Quôc, notre Parti a fortement éveillé l'esprit de patriotisme, promu la tradition de solidarité et l'aspiration à la lutte pour l'indépendance et la liberté de toutes les classes du peuple, créé la force de la nation entière et obtenu la victoire de la Révolution d'Août en 1945 - donnant naissance à la République démocratique du Vietnam - le premier État démocratique populaire d'Asie, ouvrant une nouvelle ère dans l'histoire du Vietnam - l'ère de l'indépendance nationale et du socialisme.

Le retour au pays de Nguyên Ai Quôc pour diriger directement la révolution a été une étape importante dans l’histoire du Parti et de la révolution vietnamienne. Les leçons tirées de l’époque où il dirigeait directement la révolution vietnamienne conservent encore leur valeur historique et leur profonde signification dans la cause actuelle de la construction, du développement et de la défense de la nation. Il s’agit d’une leçon sur la construction du Parti, sur l’amélioration de sa capacité de direction et de sa force de combat face à de nouvelles exigences et tâches, d’une leçon sur le rassemblement et la construction de forces révolutionnaires dans un large front national uni.

Article publié dans le journal Nhân Dân le 28 janvier 2023 à l'occasion du 82e anniversaire du retour de Nguyên Ai Quôc au Vietnam.

Publication : le 18 février 2025
Contenu : Professeur agrégé, Docteur Trân Minh Truong
Dessin : Ngoc Bich
Photos : VNA.