Née en 1943, Tôn Nu Thi Hà pratique la cuisine depuis une soixantaine d’années. Elle a voyagé dans 12 pays, dont l’Europe et les États-Unis, pour enseigner et promouvoir la cuisine de Huê (province de Thua Thiên-Huê, Centre). "Il faut appeler la gastronomie le pouvoir de la culture", a-t-elle déclaré.
Lors de ses voyages à l’étranger, Mme Hà n’oublie pas de présenter la beauté culturelle de sa ville natale, la gastronomie notamment. Beaucoup de personnes qui ont écouté ses présentations ont exprimé leur intention de se rendre à Huê pour profiter de la ville et de ses richesses, culinaires entre autres.
Lors d’une soirée avec plus de 200 invités dans un hôtel en Espagne où elle enseignait, le propriétaire de l’établissement lui a proposé de préparer des plats vietnamiens. "Les invités ont été tellement impressionnés qu’à la fin du festin, des dizaines d’entre eux se sont attardés pour rencontrer les cuisiniers, dont moi, juste pour leur serrer la main et répéter plusieurs fois le mot Vietnam", a-t-elle raconté.
Une femme, seize métiers
D’après l’artisane, la gastronomie de Huê, notamment celle royale, est beaucoup appréciée des étrangers. "De nombreux étrangers ont appris à faire la cuisine de Huê, dont celle royale, dans mon restaurant. Certains afin de mieux connaître la cuisine vietnamienne et en faire profiter leur famille. D’autres sont venus pour vraiment étudier et ont rédigé des livres", a-t-elle partagé.
Tôn Nu Thi Hà est considérée comme une des grandes spécialistes de la cuisine royale de Huê. Elle possède 15 autres métiers, dont culture d’arbres d’ornement, photographe, artiste portraitiste, interprète, barman... En 2004, elle a été reconnue "Personne qui a pratiqué le plus de métiers" dans le livre Guinness des records du Vietnam.
Infirmière a été l’une de ses professions principales. Elle a travaillé dans l’Hôpital central de Huê (province de Thua Thiên-Huê), où elle occupait aussi le poste de cuisinière. "Les patients mangent en fonction de leur pathologie, c’est-à-dire que chaque personne a un régime différent, ainsi je devais préparer 1.200 repas par jour avec des menus divers", a-t-elle confié.
Tinh Gia Viên, institution culinaire de Huê
Un jour, un ambassadeur étranger s’est rendu à Huê et a dégusté les plats de Tôn Nu Thi Hà. Il lui a alors suggéré : "Pourquoi n’ouvrez-vous pas un restaurant ? Je serai votre client fidèle".
"Au début, j’ai pensé que c’était difficile à faire. Mais, j’ai constaté qu’il avait raison. Peut-être qu’ainsi, je pourrais faire revivre l’art de la cuisine royale, oublié depuis longtemps", a dit Mme Hà.
Grâce à l’appui de ses proches, le restaurant Tinh Gia Viên a été inauguré pendant l’été 1993 dans la rue Lê Thánh Tôn. Désormais, c’est une adresse connue pour tous ceux qui aiment Huê, pour les touristes nationaux et étrangers.
Il s’agit d’un jardin typique de l’ancienne capitale impériale qui a remporté la "Coupe d’or du développement durable pour l’œuvre verte du Vietnam", offerte par le ministère des Sciences et des Technologies, et la "Coupe d’or du tourisme vert au Vietnam" décernée par l’Administration nationale du tourisme.
Tinh Gia Viên a accueilli de nombreuses délégations étrangères de haut rang en visite au Vietnam.
D’après Mme Hà, lors de la préparation des plats royaux, le chef doit mettre des épices à plusieurs reprises pour assurer à la fois le goût et la fraîcheur des aliments. Pour des plats, il faut le faire quatre fois minimum : pendant la marinade, lorsque les aliments sont en ébullition, à l’extinction du feu et lors de la présentation dans l’assiette.
"En juillet 2017, le ministère des Affaires étrangers m’a invité à participer au documentaire +Rentrer à la maison+. Produit par Uniaction Film, il a été mis en scène par la réalisatrice Marie Hélène Panisset et a été projeté au musée au Vietnam et au Laos. Dans ce film, j’ai réalisé 30 plats royaux", a raconté Mme Hà.
Elle a ajouté : "Au Festival du Vietnam au Japon 2017, moi et ma petite-fille Phan Tôn Gia Hiên avons été invitées par l’ambassadeur du Vietnam au Japon à réaliser le met royal +nem công+ (rouleau de printemps en forme de paon). Mon chef d’œuvre a été exposé largement au public".
En plus de la cuisine, Tôn Nu Thi Hà traduit et écrit des livres, a fait des recherches sur de nombreux sujets liés à la nutrition. Actuellement, elle est en train d’achever trois ouvrages : le premier concerne les épices vietnamiennes et celles d’autres pays dans le monde, leur utilisation de la cour royale à la cuisine familiale ; le deuxième porte sur le piment, sa préparation, son utilisation, son stockage et ses effets pour la santé et la troisième traite de la décoration des plats de la cour royale.