Cependant, les accomplissements actuels du MMA vietnamien ne représentent qu’un point de départ. La stratégie de développement de cette discipline doit être réajustée pour cibler l’essentiel : une expansion à l’échelle mondiale.
La création de la Fédération vietnamienne des arts martiaux mixtes (VMMAF) en 2020 a marqué un tournant décisif. Depuis lors, des championnats nationaux, y compris pour les jeunes, sont régulièrement organisés, contribuant à révéler de nouveaux talents attachés au sport de haut niveau.
Des débuts prometteurs
Le Lion Championship MMA est la première compétition professionnelle au Vietnam exclusivement dédiée aux arts martiaux mixtes.
Organisé depuis 2022 par la VMMAF en collaboration avec plusieurs partenaires, ce tournoi est rapidement devenu un tremplin pour les jeunes talents nationaux, professionnalisant le mouvement et jetant les bases d’un véritable écosystème MMA au Vietnam.
Le Lion Championship se déroule tout au long de l’année selon un format de tournoi à élimination directe, comprenant des phases de qualifications, des demi-finales et des finales.
Les combats sont répartis selon huit catégories de poids professionnelles masculines (56 kg, 60 kg, 65 kg, 70 kg, 77 kg, 84 kg, 93 kg) et une catégorie féminine (52 kg).
Chaque affrontement se tient dans une cage octogonale aux normes internationales, en trois rounds de cinq minutes, cinq rounds pour les combats de titre.
Les combattants sont sélectionnés à partir de différentes sources : clubs de MMA locaux, athlètes professionnels venant d’autres disciplines, ou encore pratiquants issus du milieu amateur. Le classement, les appariements et le système de points sont gérés de manière rigoureuse pour garantir la transparence.

Grâce à cette dynamique, plusieurs figures emblématiques ont émergé, notamment Tran Quang Loc - médaillé d’or aux SEA Games 32, devenu l’icône du MMA vietnamien, animé d’une passion et d’une détermination hors pair.
D’autres talents comme Nguyen Thi Thanh Truc, Pham Quoc Dat ou Hoang Nam Thang ont également brillé dans des compétitions internationales, illustrant le potentiel prometteur des arts martiaux vietnamiens.
Aux SEA Games 32, qui ont eu lieu en 2023, le MMA a été intégré pour la première fois dans le programme officiel.
Le Vietnam y a remporté plusieurs médailles, dont l’or de Tran Quang Loc dans la catégorie des 65 kg, confirmant la compétitivité du pays au sein de la région.
Aux Championnats d’Asie de MMA 2024, deux combattants vietnamiens ont atteint les demi-finales, un résultat prometteur, même en l’absence de médailles.
Dès l’édition 2023, Nguyen Tien Long avait d’ailleurs décroché une médaille d’or en 65 kg dans la catégorie de MMA traditionnel.
Plus récemment, le 23 mai dernier, le combattant Nghiem Van Y s’est qualifié pour les demi-finales du tournoi MMA Road to UFC 2025, prévues en août.
En parallèle, plusieurs Vietnamiens, dont Pham Quoc Dat et Hoang Nam Thang, ont eu l’opportunité de participer à des tournois affiliés à l’IMMAF, BRAVE CF ou ROAD FC,signes d’une ouverture progressive du MMA vietnamien aux circuits internationaux.
Défis à relever et orientations stratégiques
Malgré ces signaux positifs, le MMA au Vietnam reste confronté à de nombreuses lacunes. Aucune infrastructure d'entraînement aux normes internationales n’existe encore à Hanoï ou à Ho Chi Minh-Ville. La majorité des salles de sport sont des initiatives privées, souvent dépourvues de cages réglementaires pour accueillir des compétitions professionnelles nationales.

Le vivier d’entraîneurs souffre d’un manque de compétences multidisciplinaires, la plupart étant issus de disciplines traditionnelles comme la boxe, le judo, le muay thaï ou le wushu, qui ne répondent pas toujours aux exigences modernes du MMA.
Sur le plan financier, de nombreux combattants doivent encore assumer eux-mêmes leurs frais d’entraînement, ce qui entrave leur préparation pour la scène internationale.
La VMMAF élabore actuellement une stratégie de développement à l’horizon 2030, avec plusieurs objectifs clairs : créer un centre national de MMA, recruter les jeunes talents dans tout le pays et renforcer les partenariats internationaux.
La fédération ambitionne également d’organiser un championnat national professionnel inspiré du modèle ONE Championship, afin de stimuler la compétition et attirer les sponsors.
L’entraîneur principal de l’équipe nationale, Tran Van Thang, résume cette volonté : « Nous ne voulons pas seulement participer, nous souhaitons également que des combattants vietnamiens jouent un rôle central sur les scènes de ONE ou de l’UFC dans les années à venir. »
Un point clé reste à résoudre : l’absence de politiques publiques spécifiques et de soutien étatique. Un écosystème solide doit reposer sur des infrastructures adéquates, des experts internationaux et un financement pérenne. Le MMA est désormais perçu comme une discipline ayant un réel potentiel pour s’illustrer à l’international.
L’ancien directeur général de l’Administration vietnamienne des sports, Dang Ha Viet, déclarait : « Nous devons concentrer nos investissements sur certaines disciplines, de l’encadrement aux équipements, pour viser les Jeux asiatiques de 2026 et les JO de 2028, et ainsi permettre à des sports émergents comme le MMA de se développer de manière cohérente. »
Le MMA est une discipline qui exige force, stratégie, endurance et un esprit indomptable. Le Vietnam, doté d’une longue tradition martiale, peut puiser dans cet héritage pour le combiner avec les techniques modernes et construire un style unique, porteur de son identité nationale.
Pour que les combattants vietnamiens puissent un jour entrer dans l’octogone de l’UFC, sous les applaudissements d’un public voyant flotter le drapeau national, un effort stratégique est indispensable, un effort partagé entre l’État, la fédération, la communauté sportive et les acteurs privés.
Le MMA vietnamien est à un tournant majeur. S’il parvient à surmonter les obstacles liés aux infrastructures, à la formation et au financement, il a toutes les cartes en main pour s’imposer sur la scène mondiale, incarner le talent et la singularité d’un art martial national et inspirer la jeunesse du pays.