L'École de la Jeunesse du Front de Hue : un phénomène historique unique

Dans l'histoire moderne du Vietnam, l'École de la Jeunesse du Front de Hue est une marque historique particulièrement rare.

L'emplacement de l'École de la Jeunesse du Front de Hue a été reconnu comme monument provincial. Photo: NDEL
L'emplacement de l'École de la Jeunesse du Front de Hue a été reconnu comme monument provincial. Photo: NDEL

Dans l'histoire moderne du Vietnam, l'École de la Jeunesse du Front de Hue est une marque historique particulièrement rare.

Dans l'histoire moderne du Vietnam, l'École de la Jeunesse du Front de Hue est une marque historique particulièrement rare. N'existant que pendant un peu plus d'un mois à l'été 1945, cette école a formé un contingent de jeunes intellectuels qui ont directement contribué à la Révolution d'Août. La plupart d'entre eux ont ensuite progressé et apporté de grandes contributions au pays.

À l'occasion d'un retour sur cette période, un journaliste du journal Nhan Dan (le Peuple) a eu un entretien avec Le Thi Mai An, employée du Musée d'histoire de Hue qui fait des recherches sur cet événement.

Journaliste : Madame, l'École de la Jeunesse du Front de Hue n'a existé que pendant une courte période. Quel a été le point le plus remarquable de sa création ?

Mme Le Thi Mai An : L'école a été fondée le 16 juin 1945 et a ouvert ses portes le 2 juillet 1945 avec 43 élèves et 4 enseignants, sous la direction de Phan Tu Lang, le proviseur. Bien qu'elle n'ait fonctionné qu'un peu plus d'un mois, son importance est singulière. Elle a été créée sous le gouvernement de Tran Trong Kim, mais est en fait devenue un lieu où des intellectuels patriotes comme l'avocat Phan Anh et le professeur Ta Quang Buu ont formé la jeunesse, préparant ainsi des talents pour un pays indépendant. Les élèves suivaient à la fois une formation militaire, tactique, et étudiaient L'Art de la guerre de Sun Tzu, tout en s'entraînant à des compétences pratiques telles que la mécanique, la natation et l'équitation. C'est cette combinaison qui leur a permis de devenir rapidement une force significative pour la révolution.

Journaliste : Madame, pourriez-vous nous en dire plus sur le contexte de la création de l'école et l'importance du « camouflage légal » qu'elle a offert ?

Mme Le Thi Mai An : C'était une période où le gouvernement de Tran Trong Kim n'a existé que brièvement, et où le pays se trouvait dans un vide de pouvoir. Sous le nom d'une école établie par le gouvernement, la formation se déroulait de manière légale et attirait peu l'attention. Cependant, le véritable objectif de Phan Anh, de Ta Quang Buu et des organisateurs était de former rapidement une force d'intellectuels patriotes ayant des connaissances militaires pour être prêts le moment venu. C'était une manœuvre astucieuse, tirant parti de la situation pour servir les objectifs de la révolution.

Journaliste : Dans ce processus, quel a été le rôle du proviseur, M. Phan Tu Lang ?

Mme Le Thi Mai An : Phan Tu Lang était le commandant en chef des forces de sécurité de la région du Centre (Trung Ky), un officier compétent. Juste avant l'insurrection, il a été contacté par Ton Quang Phiêt et Le Tu Dong. Sa réponse est devenue célèbre : « Je vois que la voie que vous avez tracée est la bonne. Que voulez-vous que je fasse maintenant ? » À partir de là, il a rallié l'ensemble des forces de sécurité et les élèves du Front au Viet Minh. Le lieutenant-général Le Tu Dong a plus tard affirmé que cette force avait joué un rôle crucial dans la prise du pouvoir à Huế. C'était un choix personnel, mais il a eu un poids historique immense.

Journaliste : Sur quels critères les élèves étaient-ils recrutés à l'époque, Madame ?

Mme Le Thi Mai An : Selon les documents, les élèves étaient principalement de jeunes intellectuels, ayant au moins un niveau d'études secondaires, en bonne santé physique et animés par un esprit patriotique. La sélection mettait l'accent sur leur capacité à apprendre rapidement et sur leur discipline. Ce sont ces personnes qui ont plus tard démontré des capacités exceptionnelles sur le terrain.

Journaliste : Madame, tous les élèves ont-ils suivi la voie de la révolution ?

Mme Le Thi Mai An : La majorité des élèves ont rejoint les forces révolutionnaires et ont participé directement à la Révolution d'Août et aux périodes de résistance qui ont suivi. Cependant, un petit nombre, en raison de circonstances personnelles, n'est pas resté impliqué à long terme. Mais dans l'ensemble, la plupart des élèves sont devenus des forces clés.

Journaliste : Comment les élèves ont-ils été formés pour devenir rapidement une force opérationnelle ?

Mme Le Thi Mai An : Le matin, les élèves étudiaient les tactiques et s'entraînaient sur des sites comme Ngu Binh, Nam Giao et An Lang. L'après-midi, ils s'exerçaient à des métiers pratiques et à des compétences de survie. De plus, un groupe de Viet Minh a été formé au sein de l'école dès le début, composée de membres actifs. C'est cette cellule qui a diffusé l'esprit révolutionnaire, transformant une simple école de formation militaire en une véritable base révolutionnaire.

Journaliste : Et les élèves, à quels événements de la Révolution d'Août ont-ils participé directement ?

Mme Le Thi Mai An : Ils ont mené de nombreuses missions importantes. La plus notable est celle du 21 août 1945, lorsque les deux élèves Dang Van Viet et Nguyen The Luong ont dirigé la descente du drapeau du roi et la levée du drapeau rouge à l'étoile jaune sur la Tour du drapeau de Hue. Avec un seul fusil et six balles, ils ont créé un symbole historique : le drapeau de la révolution flottant au-dessus de la Cité impériale. Par ailleurs, les élèves ont maintenu l'ordre pendant les rassemblements, protégé la cérémonie d'abdication du roi Bao Dai, arrêté des éléments dangereux pour la révolution et empêché les parachutages français. De jeunes intellectuels, ils sont rapidement devenus des adultes accomplis. Beaucoup d'entre eux sont devenus plus tard de hauts responsables, des généraux ou des scientifiques, parmi lesquels les ministres Phan Trong Tue et Ta Quang Buu.

Journaliste : Madame, pourriez-vous nous en dire plus sur l'évolution de ces anciens élèves ?

Mme Le Thi Mai An : Un grand nombre d'entre eux ont apporté des contributions majeures. Dang Van Viet est devenu célèbre sous le nom de « Tigre de la route 4 » pendant la guerre de résistance contre les Français. Beaucoup d'autres ont occupé des postes importants dans l'armée ou le gouvernement, ou sont devenus des intellectuels et des scientifiques. Cela montre que la valeur de la formation de l'école ne s'est pas limitée à août 1945, mais s'est étendue durablement à la cause de la résistance et de l'édification nationale.

Journaliste : On peut donc dire que l'influence de cette école a dépassé la courte période de son existence ?

Mme Le Thi Mai An : Absolument. L'École de la Jeunesse du Front de Hue est un phénomène historique unique. Brève dans le temps, elle est durable dans son sens. Elle prouve que la force de la jeunesse, lorsqu'elle est liée à l'idéal national, peut avoir un impact profond et laisser une empreinte durable. Bien que l'école ait été démolie car elle se trouvait dans une zone de protection des vestiges de la Cité impériale, une stèle a été érigée pour en garder la mémoire. Le souvenir de l'école conserve toute sa valeur, à la fois comme document historique et comme leçon pour les jeunes générations sur la responsabilité et l'engagement.

Journaliste : Nous vous remercions beaucoup !

Dans la même rubrique

Back to top