Comme l’a souligné Tim Rieser, conseiller principal du sénateur américain Peter Welch : « Nous avons compris qu’il fallait apprendre à dialoguer autrement, afin de transformer les héritages douloureux de la guerre en opportunités de coopération ».
Colloque scientifique international intitulé « 50 ans après la réunification du pays : le rôle de la diplomatie dans la construction de la paix, hier et aujourd'hui », qui a eu lieu le 23 avril, à Hanoi, a réuni de nombreux experts et érudits, ainsi que des représentants internationaux. Ils ont revisité le parcours diplomatique du Vietnam, de la guerre à la paix. Les interventions lors du colloque ont offert non seulement un regard rétrospectif, mais aussi une réflexion tournée vers l'avenir.
La diplomatie vietnamienne à travers les témoignages des acteurs
Depuis les États-Unis, l’écrivaine Lady Borton, qui entretient un lien étroit avec le Vietnam depuis plus d'un demi-siècle, souligne que la victoire du 30 avril 1975 n’est pas seulement le fruit de la puissance militaire, mais aussi le résultat d'une stratégie diplomatique avisée, proactive et profondément humaniste.
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Mme Lady Borton, écrivaine américaine, partage ses réflexions sur la diplomatie vietnamienne mobilisant la puissance internationale pour la victoire du 30 avril 1975. Photo : nhandan.vn |
« La diplomatie vietnamienne n'a pas seulement sollicité les milieux politiques, elle a aussi raconté une histoire, celle d'un peuple aspirant à la paix et à l'autodétermination », indique Mme Borton. Elle rappelle l’épisode de 1949 où le Président Hô Chi Minh répondit en anglais à 21 questions posées par le journaliste américain Arthur B. Steele, une démarche considérée comme une stratégie de communication extérieure précoce, permettant au monde de mieux comprendre la véritable nature de la lutte vietnamienne.
Selon Mme Borton, la diplomatie vietnamienne, dès ses débuts, n’assurait pas seulement des fonctions classiques de politique extérieure, mais s’est également imposée comme pionnière dans la construction de l'image nationale.
Le Vietnam s’est présenté comme une nation éprise de paix, luttant pour son indépendance nationale, et non comme un simple foyer de la guerre froide tel que certaines propagandes occidentales ont pu le décrire. - Lady Borton, écrivaine américaine
Pour Mme Virginia B. Foote, vice-présidente de la Chambre de commerce américaine au Vietnam, le parcours diplomatique entre le Vietnam et les États-Unis illustre de manière exemplaire la transformation d'un conflit en coopération.
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De gauche à droite : l'écrivaine américaine Lady Borton ; Mme Virginia B. Foote, vice-présidente de la Chambre de commerce des États-Unis au Vietnam ; Mme Latana Siharaj, ambassadrice adjointe du Laos au Vietnam. Photo : nhandan,.vn |
Elle évoque la relation particulière entre deux anciens combattants, John McCain et John Kerry, deux hommes ayant divergé sur la guerre mais s’étant unis pour construire la paix : « Ils n’étaient pas d’accord sur la guerre, mais s’accordaient sur la paix. Et c’est précisément cela qui a ouvert la voie à la normalisation des relations ».
De gauche à droite : Lady Borton, écrivaine américaine ; Virginia B. Foote, vice-présidente de la Chambre de commerce américaine au Vietnam ; Latana Siharaj, vice-ambassadrice du Laos au Vietnam.
Mme Foote souligne également l'importance de la diplomatie économique aux côtés de la diplomatie politique. De la levée de l'embargo, en passant par la négociation de l'accord commercial bilatéral, l'adhésion à l'OMC, jusqu'à l’établissement d'un partenariat stratégique global, le Vietnam a démontré une volonté d'intégration persévérante.
« Au départ, je craignais que les consommateurs américains hésitent face aux produits estampillés ‘Made in Vietnam’, mais aujourd’hui, cela est perçu comme un gage de qualité », ajoute-t-elle.
Du dialogue au développement : une diplomatie créatrice d'avenir
Du point de vue d'un pays voisin, Latana Siharaj, vice-ambassadrice du Laos, décrit le Vietnam comme « un ami intime », aussi bien durant la guerre que dans la construction de la paix. Elle souligne que la diplomatie vietnamienne a non seulement réussi à briser l’isolement après la guerre, mais est également devenue un levier de développement : « La diplomatie vietnamienne ne se contente pas de mettre en œuvre la politique extérieure, elle protège activement la paix, résout les conflits et soutient le développement ».
De l'aide dans les domaines de l'éducation, de la santé, des infrastructures, jusqu’à la défense et à la formation de diplomates laotiens, Mme Latana estime que la politique étrangère du Vietnam incarne un modèle de diplomatie désintéressée et solidaire au sein de la région.
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Tim Rieser, conseiller principal du sénateur américain Peter Welch, intervenant en ligne lors du séminaire. Photo : nhandan.vn |
De son côté, Tim Rieser, conseiller principal du sénateur américain Peter Welch, affirme que la normalisation des relations entre le Vietnam et les États-Unis en 1995 ne marqua pas une fin, mais bien le début d’un processus de construction de la confiance sur trois décennies.
« Nous avons compris qu’il fallait apprendre à dialoguer différemment pour transformer les héritages douloureux de la guerre en opportunités de coopération », confie-t-il.
Des opérations de traitement de la dioxine, de déminage, d'aide aux personnes handicapées à la recherche des disparus, M. Rieser estime que les programmes de coopération liés aux séquelles de guerre ont permis non seulement de panser les blessures du passé, mais aussi d'ouvrir des perspectives de collaboration durable.
Il salue également le rôle de dirigeants militaires vietnamiens tels que le général Nguyên Chi Vinh dans la promotion de programmes de coopération en matière de défense, un domaine sensible mais crucial pour instaurer une confiance stratégique entre les deux pays.
Depuis la Chine, le professeur Wang Chong, secrétaire général adjoint de la Charhar Institute, exprime son admiration pour l'approche diplomatique vietnamienne : indépendante, fondée sur des principes tout en restant flexible et pragmatique.
« La diplomatie vietnamienne est un art de conjuguer la fermeté du principe et l'ouverture au dialogue, tout en maintenant l'objectif de long terme : la paix, la réunification et le développement national », observe-t-il.
Selon lui, le Vietnam a su construire des relations bilatérales solides tout en racontant une « histoire nationale » cohérente et crédible, ce que bien des nations en reconstruction post-conflit peinent encore à accomplir.
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Des récits personnels poignants aux analyses stratégiques, le séminaire n'a pas seulement mis en lumière le rôle singulier de la diplomatie vietnamienne dans le processus de paix, mais a aussi livré de précieuses leçons pour le présent.
Si, par le passé, la diplomatie a permis au Vietnam de sortir de l'isolement et de se faire reconnaître, aujourd'hui, elle reste un pilier majeur de son intégration profonde, de la défense de sa souveraineté, de l'attrait des partenaires et du maintien de la paix régionale.
« La paix ne vient pas d'elle-même. Elle est le fruit de l'initiative, du courage et de l'intelligence que la diplomatie vietnamienne s'efforce de cultiver depuis 50 ans », souligne Mme Foote, comme pour cristalliser l’essence de tous les messages du séminaire.
Du regard de ses amis internationaux, la diplomatie vietnamienne n'est pas seulement un chemin parcouru à travers la guerre, mais bien une marche résolue vers l’avenir, un avenir de dialogue, de compréhension et de coopération durable.