Mme Stella Ciorra lors d'un voyage à vélo pour promouvoir l'áo dài du Vietnam. |
Jean Sébastien Grill : « ông đồ Tây » et la calligraphie vietnamienne
Dans une publication sur Zalo, une photo arbore les mots « Việt Nam ơi! Trường Giang về quê ăn Tết » (Vietnam, Truong Giang rentre à la maison pour le Têt). Cette déclaration pourrait être celle d’un Vietnamien nostalgique. Pourtant, elle émane de Jean Sébastien Grill, un Français qui se fait appeler Truong Giang au Vietnam. Arrivé à Hanoï juste avant la fête des Génies du Foyer (ông Công, ông Táo), il a participé aux rituels de la fête avec une passion palpable.
Dès son arrivée au Vietnam pour célébrer le Têt, Jean Sébastien Grill n’a pas une minute à perdre. Entre les visites touristiques avec sa famille, les achats d’áo dài pour sa femme et ses enfants, et la participation à l’ouverture de la Fête printanière de la calligraphie au Temple de la Littérature à Hanoï, cet amoureux du Vietnam reste fidèle à son engagement pour la culture vietnamienne.
Né en 1982, Jean Sébastien, graphiste de profession, s’intéresse également à la médecine traditionnelle orientale, notamment à l’acupuncture. En 2006, il épouse une Française d’origine vietnamienne, et le couple tombe sous le charme du Vietnam, un pays qu’il décrit comme chaleureux et accueillant. « Les sourires des Vietnamiens et leur aide désintéressée m’ont profondément marqué. De nombreuses familles vivent ensemble sur plusieurs générations, ce qui dégage une ambiance conviviale et réconfortante », raconte-t-il.
En 2015, Jean Sébastien décide de s’installer définitivement au Vietnam avec sa femme et ses enfants. C’est à cette époque qu’un ami sud-coréen l’initie à l’art de la calligraphie. Fasciné par cette discipline asiatique unique, il entreprend de se former auprès des maîtres locaux, s’initiant d’abord à la calligraphie en langue vietnamienne. Ainsi commence son parcours d’ông đồ Tây (calligraphe occidental).
Pour un étranger, se consacrer à l’art de la calligraphie vietnamienne relève d’un véritable défi. Jean Sébastien passe de longues heures enfermé dans son atelier, moud son encre, s’exerce sur du papier traditionnel (giấy dó) et enrichit son vocabulaire vietnamien pour mieux comprendre et transmettre le sens profond des caractères qu’il écrit.
Il ne s’agit pas seulement de produire des œuvres esthétiques : Jean Sébastien s’efforce également de saisir les valeurs culturelles derrière chaque mot ou expression. Il lit des ouvrages sur l’histoire et la philosophie vietnamiennes et échange avec des experts locaux pour enrichir son savoir. Son maître, Kiêu Quôc Khanh, également connu sous le nom de Nguyêt Trà, salue la curiosité et l’ingéniosité de son élève.
En 2021, lors de la pandémie de Covid-19, Jean Sébastien retourne en France, mais reste profondément attaché à son « deuxième foyer ». Il ne dit pas qu’il revient au Vietnam, mais qu’il « rentre chez lui » (về quê), une expression pleine de tendresse empruntée aux Vietnamiens.
Lors de son retour en 2023, il réussit à passer les sélections pour écrire à la fête printanière de la calligraphie, un privilège réservé à quelques calligraphes triés sur le volet. Pour Jean Sébastien, pratiquer la calligraphie est bien plus qu’un art : « C’est une discipline qui nourrit l’esprit et l’âme. Elle me permet de transmettre des valeurs traditionnelles et de partager le bonheur des débuts d’année avec les autres », explique-t-il.
Stella Ciorra : l’ambassadrice de l’áo dài et du patrimoine vietnamien
Originaire du Royaume-Uni, Stella Ciorra a découvert le Vietnam en 1995, au moment où le pays entamait son ouverture internationale. Malgré les difficultés économiques d’alors, elle a été séduite par la chaleur humaine des Vietnamiens. Après plusieurs voyages, elle décide de s’installer durablement au Vietnam et s’engage activement dans la préservation de son patrimoine culturel.
Aujourd’hui présidente de l’association Friends of Vietnam Heritage (FVH), Stella organise régulièrement des visites culturelles à travers Hanoï et ses environs. Ces excursions, souvent axées sur des lieux emblématiques comme le Vieux Quartier ou les villages artisanaux, lui permettent de partager des anecdotes fascinantes et de promouvoir un regard attentif sur les traditions locales.
Stella est également une fervente promotrice de l’áo dài, le costume traditionnel vietnamien. Lors d’événements célébrant cette tenue, elle mobilise ses amis étrangers pour défiler vêtus d’áo dài, contribuant ainsi à son rayonnement international. Ses initiatives s’étendent jusqu’aux séminaires académiques, où elle propose des idées concrètes pour préserver et valoriser l’áo dài.
Martín Rama et l’amour pour Hanoï
Le charme discret de Hanoï a également conquis Martín Rama, un économiste uruguayen, dont l’attachement à la capitale vietnamienne s’est traduit par deux livres : Hà Nội, một chốn rong chơi (Hanoï, un lieu de flânerie) en 2014 et Vì tình yêu Hà Nội (Par amour pour Hanoï) en 2023. Ces ouvrages, véritables déclarations d’amour à la ville, célèbrent les rues anciennes, les balcons fleuris et l’authenticité vibrante des trottoirs de Hanoï.
Sa passion pour la capitale vietnamienne lui a valu le prestigieux prix Bùi Xuân Phái en 2014, qui récompense les contributions culturelles à Hanoï. Comme Martín Rama, de nombreux étrangers partagent un lien profond avec le Vietnam et contribuent à sa valorisation culturelle.
Saleem Hammad : le messager numérique de la culture vietnamienne
Né en Palestine en 1993, Saleem Hammad a découvert le Vietnam en 2012. Depuis, il s’est établi comme l’un des ambassadeurs culturels les plus dynamiques du pays grâce à sa maîtrise remarquable du vietnamien et son activité sur YouTube. Ses vidéos, mêlant histoire, traditions et vie quotidienne, touchent des millions de spectateurs à travers le monde.
Lauréat du concours Hà Nội trong tôi (Hanoï dans mon cœur) et ambassadeur de l’amitié pour la paix de Hanoï en 2019, Saleem utilise sa plateforme numérique pour attirer l’attention internationale sur les trésors culturels du Vietnam. Il collabore avec d’autres créateurs pour produire des contenus célébrant la richesse historique et humaine du pays.
Les contributions de ces étrangers passionnés offrent un miroir dans lequel les Vietnamiens peuvent redécouvrir et apprécier davantage leur propre patrimoine. À travers des initiatives variées – qu’il s’agisse de préserver l’áo dài, d’écrire des livres ou de partager des vidéos en ligne –, ces amoureux du Vietnam enrichissent les dialogues interculturels tout en consolidant la place de la culture vietnamienne dans le monde.
Ces exemples rappellent que, malgré les défis posés par la mondialisation, le Vietnam conserve une identité culturelle forte, capable de captiver et d’unir au-delà des frontières.