La grâce de la capitale Hanoï à l’ère du numérique

Chaque 10 octobre, date anniversaire de la Libération de la capitale, Hanoï, capitale vietnamienne, ne célèbre pas seulement un jalon historique. Ce jour ravive aussi l’image d’une ville façonnée par l’élégance de ses habitants - cette urbanité discrète et raffinée qui demeure l’un de ses héritages les plus singuliers.

L’élégance hanoïenne, hier comme aujourd’hui, reste moins une vitrine qu’une manière d’être. Photo : baoquocte.vn
L’élégance hanoïenne, hier comme aujourd’hui, reste moins une vitrine qu’une manière d’être. Photo : baoquocte.vn

Une élégance héritée, mais toujours vivante

Longtemps, l’« élégance hanoïenne » ne s’est pas limitée à une apparence : elle résidait dans un mot de remerciement, un salut discret, une retenue dans les gestes quotidiens. Dans les années 1990, des initiatives comme le concours « Élève élégant » rappelaient cette exigence de savoir-vivre. Elles ont depuis laissé place à des manifestations plus spectaculaires, mais moins centrées sur l’art de « bien vivre ».

Aujourd’hui, dans la métropole de près de neuf millions d’habitants, l’élégance n’est plus un luxe : elle se traduit dans les gestes les plus ordinaires - un chauffeur qui cède le passage, un jeune qui aide un touriste perdu, un passager qui garde le silence dans le métro. Ces attitudes, répétées, composent une culture urbaine.

Depuis l’adoption en 2017 d’un code de conduite dans les lieux publics, la municipalité cherche à renforcer ces comportements. Mais l’élégance ne saurait se réduire à des affiches réglementaires : elle vit par l’initiative individuelle. Elle se déploie désormais jusque dans l’espace numérique. Dans les réseaux sociaux, le ton modéré d’un commentaire, la retenue avant d’écrire une phrase blessante, participent de ce que l’on pourrait appeler une « élégance digitale ».

Un atout culturel et touristique

Inscrite au réseau des « Villes créatives » de l’UNESCO depuis 2019, Hanoï entend faire de cette élégance une véritable marque de fabrique culturelle. L’extension des zones piétonnes, les projets artistiques collectifs et les musées interactifs témoignent de la volonté de conjuguer modernité et héritage. Pour les visiteurs, le souvenir de la capitale ne se résume pas au lac Hoàn Kiếm ou aux ruelles du vieux quartier : il s’incarne dans un sourire, une parole polie, une hospitalité discrète.

Dans un contexte de forte urbanisation, la capitale vietnamienne conserve un rythme singulier : ni précipité ni ostentatoire. Ce « juste milieu », salué par de nombreux visiteurs étrangers, confère à Hanoï une identité rare en Asie du Sud-Est. La ville ne se définit pas seulement par ses tours ou ses infrastructures, mais par le comportement de ses habitants. Chaque citoyen - chauffeur de taxi, commerçant, étudiant ou fonctionnaire - devient un ambassadeur de cette culture urbaine.

L’élégance hanoïenne, hier comme aujourd’hui, reste moins une vitrine qu’une manière d’être. Elle exprime une fidélité à soi-même dans un monde en mutation : respect d’autrui, patience, discrétion. Une ville, dit-on, n’est aimée que lorsqu’on s’y sent respecté. Hanoï entend démontrer que son développement ne saurait se faire au détriment de cette promesse.

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