À Dak Lak, dans la commune de Lien Son Lak, le tissage de brocart M’nông, longtemps menacé d’oubli, connaît aujourd’hui une nouvelle vitalité.
Sous leurs mains patientes, des étoffes aux couleurs vives prennent forme, mêlant figures M’nông et Êđê. « Au début, c’était difficile à mémoriser. Chaque petit motif pouvait nécessiter des centaines de fils. Mais avec l’habitude, nous avons retrouvé les dessins d’autrefois », confie Mme H’Bum Long Ying, l’une des artisanes. Aujourd’hui, cinq des quinze tisserandes du groupe maîtrisent déjà les motifs traditionnels.
Au-delà de la transmission, les femmes innovent en expérimentant de nouveaux matériaux : fibres de café, bambou, ananas, soie ou encore soie brute. « Chaque fil a sa particularité. Le café est fin mais fragile, le bambou plus solide mais plus lourd. Nous apprenons à adapter nos gestes selon la matière », explique H’Hiệp Bing.

C’est H’Kim Hoa Byă qui a impulsé cette dynamique. Après avoir constaté, en 2023, l’engouement des femmes du village pour le métier à tisser, elle a plaidé auprès des autorités locales pour restaurer la maison communautaire, inviter des maîtres-artisans et soutenir la recherche de débouchés. Son objectif : marier motifs traditionnels et matières naturelles afin de rendre le brocart M’nông plus souple, durable et adapté aux usages contemporains.
« La valeur de nos produits ne réside pas seulement dans la matière, mais dans l’héritage culturel et l’histoire qu’ils portent », souligne-t-elle.

L’initiative a reçu le soutien des autorités locales. Les tissus sont désormais inscrits dans le programme OCOP (Chaque commune, un produit), ouvrant la voie à une commercialisation durable, notamment auprès des touristes. « La demande ne cesse de croître, y compris de la part de visiteurs étrangers. Cela constitue une véritable opportunité économique pour la communauté », estime Nguyen Anh Tu, président du comité populaire de Lien Son Lak.
Du fil de coton aux fibres végétales, le tissage M’nông renaît, porteur d’identité et d’avenir. Plus qu’un artisanat, il s’impose comme un vecteur de mémoire, de fierté et d’espoir pour toute une communauté.