Valorisation des trésors nationaux

Pour la première fois depuis la fusion administrative, la ville de Da Nang, au Centre du Vietnam, organise une exposition rassemblant 19 trésors nationaux, offrant ainsi au public un panorama inédit des objets patrimoniaux les plus précieux conservés sur son territoire.

Des visiteurs admirent l’originale de la statue du Bodhisattva Tara, classée trésor national, dans l’espace d’exposition « Trésors nationaux – Un patrimoine au cœur de Da Nang ».
Des visiteurs admirent l’originale de la statue du Bodhisattva Tara, classée trésor national, dans l’espace d’exposition « Trésors nationaux – Un patrimoine au cœur de Da Nang ».

Un concentré d’histoire et de culture au cœur de la ville

L’exposition intitulée « Trésors nationaux – Un patrimoine au cœur de Da Nang » est présentée au Musée de la sculpture Cham de Da Nang. Elle marque une étape importante, témoignant du dynamisme et de l’efficacité de la coopération entre musées, sites patrimoniaux et collectionneurs privés pour promouvoir la valeur des trésors nationaux auprès du grand public.

C’est la première fois que le musée rassemble des informations et visuels complets autour des 19 trésors nationaux de la nouvelle ville de Da Nang. Quatorze de ces objets sont exposés sous leur forme originale, deux en version reproduite, tandis que les trois derniers — liés à des sites classés et nécessitant une conservation spécifique — sont présentés via des archives et des documents visuels.

Parmi les pièces exposées figurent des objets exceptionnels issus de trois grandes cultures : Dong Son, Sa Huynh et Cham. Deux objets datant du IIIᵉ au Ier siècle avant notre ère, provenant de la collection de Luong Hoang Long, illustrent le savoir-faire en fonte de bronze et la richesse culturelle des anciens Viet. La collection Sa Huynh, datée du IIIᵉ siècle avant J.-C. à la moitié du Ier siècle, révèle une esthétique raffinée et des techniques de fabrication de bijoux extrêmement élaborées. Enfin, les œuvres Cham, créées entre le VIIᵉ et le XIIIᵉ siècle, incarnent les influences profondes de l’hindouisme et du bouddhisme sur la culture du centre du Vietnam — influences que l’on retrouve également au sanctuaire de My Son, classé au patrimoine mondial, ainsi qu’au musée même.

Une vitrine de la richesse culturelle vietnamienne

Selon Le Thi Thu Trang, directrice du Musée de la sculpture Cham, ces trésors nationaux représentent l’essence même de la culture vietnamienne, autant par leur singularité que par leur pouvoir d’identification culturelle. Ils permettent de transmettre aux visiteurs nationaux et internationaux la profondeur et l’identité du patrimoine vietnamien. Elle espère que cette réussite servira de tremplin à de nouveaux projets culturels innovants, capables d’associer tourisme, patrimoine et expérience immersive, contribuant ainsi à positionner Da Nang comme une destination culturelle majeure de la région.

Dans un contexte d’ouverture et de mondialisation, la préservation et la transmission des valeurs patrimoniales font face à de nombreux défis. Le secteur culturel de Da Nang s’efforce de sensibiliser le public, en particulier les jeunes générations, à la richesse du patrimoine vietnamien.

Danve D. Sandu, expert en conservation de l’Agence archéologique de l’Inde (ASI), actuellement en mission sur le site de My Son, salue les efforts de la ville : « Mettre ces trésors à disposition du public, c’est un acte fort. Les générations précédentes ont le devoir de transmettre ces valeurs, et les jeunes doivent s’en emparer, les protéger et les faire vivre dans un monde en constante mutation. »

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Des élèves du collège Le Thi Hong Gam, à Da Nang, participent à une activité extrascolaire au Musée de la sculpture Cham.

Vers une stratégie de valorisation numérique

Pour Huynh Van Hung, artiste du peuple et ancien directeur du Service de la culture et des sports de Da Nang, le Musée de la sculpture Cham — fondé par les Français en 1919 — est une « perle rare du patrimoine culturel ». Il rappelle que l’exposition actuelle, en révélant les trésors originaux au public, participe à illustrer une culture vietnamienne unifiée dans sa diversité, marquée par les interactions entre différentes ethnies et courants culturels.

L’architecte et chercheur Le Tri Cong propose d’aller plus loin en modernisant la mise en valeur de ces trésors Cham. Selon lui, il est temps de faire sortir la sculpture Cham des vitrines, de l’intégrer à la culture populaire et au monde numérique. La numérisation et la réalité virtuelle sont, à ses yeux, des outils clés. Il affirme : « On ne peut pas transporter des statues de grès à travers le monde, mais les données numériques, elles, voyagent sans frontières. »

Il suggère la création d’un espace d’exposition virtuelle, permettant à tout un chacun, où qu’il soit, de visiter les sites sacrés de My Son ou Dong Duong comme à leur apogée. Dans cet environnement numérique, les trésors retrouveraient leur emplacement d’origine, et non une présentation isolée comme dans un musée traditionnel. Il recommande également l’intégration du mapping 3D et de l’intelligence artificielle dans les applications muséales pour enrichir l’expérience du visiteur.

« Pour que les trésors nationaux de Da Nang brillent vraiment, il faut briser cette distance sacralisée. Laissons le public “toucher” le patrimoine — par la technologie, par l’émotion, et par une esthétique contemporaine », conclut-il.

Dans le contexte de développement actuel de Da Nang, il est urgent de reconnaître l’importance stratégique de la culture et du patrimoine. La ville doit se doter d’une stratégie à long terme pour valoriser pleinement ses trésors nationaux, non seulement comme symboles d’histoire et d’identité, mais aussi comme leviers pour un développement durable, où passé et présent se rejoignent dans la construction d’un avenir respectueux des racines culturelles vietnamiennes.

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