Coopération économique et commerciale Vietnam–Chine : un niveau de synergie inédit

Le professeur Cui Hongjian, de l’Institut d’études avancées sur la gouvernance régionale et mondiale de l’Université des langues étrangères de Pékin a analysé l’état actuel et les perspectives de la coopération économique et commerciale entre le Vietnam et la Chine dans un contexte régional et international en pleine mutation.

Le professeur Cui Hongjian de l’Institut d’études avancées sur la gouvernance régionale et mondiale de l’Université des langues étrangères de Pékin. Photo : VNA.
Le professeur Cui Hongjian de l’Institut d’études avancées sur la gouvernance régionale et mondiale de l’Université des langues étrangères de Pékin. Photo : VNA.

Dans une interview accordée à l’Agence vietnamienne d’information, Cui Hongjian a estimé que les relations économiques bilatérales ont connu ces dernières années une croissance sans précédent, devenant l’un des piliers de la coopération entre la Chine et l’ASEAN.

Le Vietnam n’est pas seulement un partenaire commercial majeur, mais également un maillon essentiel dans les chaînes d’approvisionnement régionales, surtout dans le cadre de l’essor continu du commerce ASEAN–Chine depuis plus de vingt ans, depuis l’entrée en vigueur de l’Accord de libre-échange Chine–ASEAN (CAFTA).

Le professeur rappelle que le commerce Chine–ASEAN a été multiplié par près de 25, passant de plus de 40 milliards de dollars en 2000 à 980 milliards de dollars en 2024, avec des prévisions dépassant 1.000 milliards de dollars dès 2025.

Dans cette dynamique, le Vietnam s’impose comme un acteur clé, contribuant à hauteur de 260 milliards de dollars en 2023, soit environ un quart du commerce total entre la Chine et l’ASEAN.

Grâce à une économie dynamique, une industrialisation rapide et des capacités de production en pleine expansion, le Vietnam est devenu, selon lui, « un partenaire indispensable » dans le réseau de production et de commerce de la Chine en Asie du Sud-Est.

Le professeur Cui Hongjian souligne que le Vietnam dispose de nombreux atouts : une population d’environ 100 millions d’habitants, une main-d’œuvre jeune, des coûts compétitifs et un modèle de croissance orienté vers l’exportation.

Le pays s’est profondément intégré aux chaînes de valeur mondiales dans des secteurs tels que l’électronique, le textile-habillement, les composants, le bois transformé et, plus récemment, les énergies renouvelables.

Le PIB par habitant, qui a atteint quelque 4.500 dollars, constitue, selon lui, une réussite notable reflétant un développement soutenu au cours de la dernière décennie.

Les cadres de coopération régionale tels que le CAFTA et le RCEP ont, de son point de vue, favorisé l’amélioration de la connectivité, l’harmonisation des politiques commerciales et l’intensification de la coopération entre entreprises.

En particulier, le RCEP, considéré comme le plus grand marché unifié du monde, rend les chaînes d’approvisionnement régionales plus flexibles et ouvre de nouvelles marges de croissance pour le commerce bilatéral.

L’un des traits remarquables de la coopération économique Vietnam–Chine réside dans un «modèle de division du travail sophistiqué» au sein des chaînes d’approvisionnement modernes.

Le Vietnam importe des matières premières, composants et machines de Chine, effectue des opérations de transformation, d’assemblage ou de finition, puis exporte vers les États-Unis, l’Europe ou l’ASEAN.

Cette complémentarité structurelle crée un fort niveau d’interdépendance : le Vietnam assume les étapes intensives en main-d’œuvre tandis que la Chine fournit les intrants technologiques, les matières premières et les infrastructures de soutien. « Il s’agit d’une relation mutuellement bénéfique appelée à se renforcer avec l’entrée en vigueur du RCEP », souligne le professeur.

Il mentionne également que le Vietnam doit encore importer de l’électricité de Chine, notamment via les lignes de transmission en provenance du Guangxi, afin de répondre à la demande croissante des zones industrielles. Cette assistance contribue à stabiliser la production nationale dans un contexte d’augmentation rapide de la consommation énergétique.

Malgré ces acquis, le professeur Cui Hongjian identifie plusieurs défis susceptibles d’influer sur la coopération économique bilatérale, notamment la rivalité stratégique entre les États-Unis et la Chine.

Pour réduire les risques externes, il recommande de renforcer la résilience régionale en intensifiant les échanges intra-ASEAN–Chine, en stimulant les investissements et en élargissant les marchés régionaux. L’exploitation optimale des cadres CAFTA et RCEP permettrait aux économies du bloc de faire face plus sereinement aux fluctuations internationales.

S’agissant des orientations de développement du Vietnam dans les années à venir, le professeur Cui Hongjian considère que le pays figure parmi les économies « les plus dynamiques » du sous-région du Grand Mékong et qu’il occupe une position de plus en plus importante dans les chaînes de valeur mondiales.

Toutefois, un modèle de croissance reposant largement sur les exportations et sur l’importation d’intrants expose le Vietnam à une vulnérabilité accrue en période d’instabilité économique mondiale ou de crise financière.

Il estime que le Vietnam doit poursuivre les réformes visant à améliorer l’environnement des affaires, renforcer la transparence des politiques, accélérer la simplification administrative, promouvoir la libéralisation et la facilitation du commerce et de l’investissement, tout en intensifiant l’attraction des investissements directs étrangers (IDE) de haute qualité et en développant davantage les infrastructures nécessaires à l’industrialisation.

Aujourd’hui, le Vietnam est devenu une destination privilégiée pour de nombreux investisseurs internationaux, notamment dans l’électronique, les technologies de pointe, la logistique, l’énergie et le textile-habillement. Mais les infrastructures demeurent un « goulet d’étranglement majeur » à résoudre.

Selon le professeur Cui, la coopération Vietnam–Chine dans ce domaine détient un potentiel considérable, d’autant plus qu’après la visite au Vietnam du secrétaire général et président chinois Xi Jinping, les deux pays ont convenu d’accélérer la mise en œuvre des projets de connectivité ferroviaire transfrontalière.

En parallèle, les secteurs routier, portuaire, énergétique et logistique pourraient devenir de nouveaux moteurs pour la croissance vietnamienne dans les années à venir.

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