Si les Dao rouges sont libres de choisir l’élu(e) de leur cœur, ils ne peuvent se marier qu’après avoir reçu l’assentiment d’une tierce personne. Cette personne a la totale confiance de leurs parents pour deviner si, oui ou non, les signes astrologiques des deux jeunes gens sont compatibles. Si c’est non, les parents n’oseront pas organiser le mariage… Mais si c’est oui, commence alors un long processus dont le mariage à proprement parler n’est même pas l’étape ultime…
Après la réponse positive de l’astrologue accrédité, la famille du garçon doit procéder au rite de demande de la main, qui s’effectue à plusieurs reprises, comme l’indique Dang Chà Chiu, un Dao rouge.
« La famille du garçon doit se rendre trois fois chez l’autre, et lui présenter comme cadeaux du cochon, du poulet et de l’argent. La fille ne pourra se rendre chez le garçon qu’après ces visites officielles », dit-il.
En fait, pour la première visite, les représentants de la famille du garçon peuvent venir les mains vides. Un entremetteur ou une entremetteuse s’exprimera en leur nom. Celui-ci ou celle-ci a été choisi(e) pour sa parfaite connaissance des traditions, sa parole facile et sa vertu irréprochable. Après avoir obtenu le consentement de la famille de la fille, il ou elle en informera la famille du garçon. C’est lors de la troisième visite que celle-ci apportera ses cadeaux. Outre le cochon, le poulet et l’argent qui sont les trois cadeaux indispensables, chaque famille peut en apporter d’autres en fonction de ses moyens, nous dit Triêu Van Chiên, un autre Dao rouge.
« C’est la famille du garçon qui doit consulter un astrologue pour trouver le bon jour et la bonne heure du mariage. L’astrologue lui-même consulte un livre ancien en caractères chinois », explique-t-il.
C’est aussi la famille du garçon qui organise la partie fastueuse du mariage. La famille de la fille n’organise qu’un simple repas pour lui dire au revoir, fait savoir Pham Ngoc Hiêp, du Centre culturel de la province de Tuyên Quang.
«Si tous les rites sont observés, un mariage doit durer deux jours. Mais aujourd’hui, les choses ont été simplifiées et il n’a lieu que pendant un jour. Les Dao rouges tiennent néanmoins à préserver l’essentiel de la tradition», indique-t-il.
L’essentiel de la tradition réside dans la cérémonie d’accueil de la mariée. Au départ de la famille du marié, le cortège comprend l’entremetteur ou l’entremetteuse, le marié lui-même, ses garçons d’honneur, les transporteurs de cadeaux et de dot, et une fanfare qui joue tout au long de la route. Dang Cha Chiu, que nous avons entendu au début de ce reportage, se trouve être un joueur de clairon.
« C’est au son du clairon que la famille du marié accueille sa mariée. Selon la tradition, c’est un vœu de bonheur, de santé, de progéniture abondante et de prospérité au couple », déclare-t-il.
Arrivé (e) chez la mariée, l’entremetteur ou l’entremetteuse demande l’autorisation à entrer dans la maison pour accueillir la belle. Vêtue d’un costume en brocatelles multicolores, celle-ci aura alors la tête recouverte d’un foulard. Les Dao rouges ne veulent pas que leurs mariées voient les rayons de soleil sur le chemin les conduisant chez leurs époux. D’après eux, ça apporte malchance. Ils organisent d’ailleurs un rite de chasse aux mauvaises chances pour la mariée en plein chemin. Lorsque le cortège arrive enfin chez le marié, il doit encore attendre la bonne heure, où le chaman informe les ancêtres de la tenue de l’évènement. La mariée sera alors conduite devant l’autel, où elle attendra son époux qui sera, lui aussi, conduit par la main par quelqu’un de sa famille, sa tête étant couverte d’un foulard similaire à celui de sa femme…
Trente jours après le mariage, le jeune couple rendra visite à la famille de la femme, en apportant du poulet et de l’alcool. Durant ces trente jours, la mariée doit rester dans la maison. Pas question pour elle de sortir pour dire bonjour aux voisins, encore moins à ses propres parents.