Le tourisme floral : une opportunité pour créer une marque distinctive

Ces dernières années, le phénomène du tourisme lié aux saisons florales connaît un essor considérable. Cette tendance offre une formidable opportunité aux provinces et aux villes de développer des produits touristiques saisonniers attrayants, à condition de mettre en place des stratégies durables.
La saison des fleurs de colza sur le plateau de Môc Châu.
La saison des fleurs de colza sur le plateau de Môc Châu.

Ces dernières années, le phénomène du tourisme lié aux saisons florales connaît un essor considérable. Hanoï séduit avec ses marguerites blanches et ses vergers de pêchers en fleurs, tandis que Môc Châu (Sơn La) attire les visiteurs avec ses pruniers en pleine floraison. Hà Giang est devenue une destination prisée pour la chasse aux champs de sarrasin en fleurs, et Dà Lạt (Lâm Dông) est souvent surnommée le « paradis des cerisiers ». Cette tendance offre une formidable opportunité aux provinces et aux villes de développer des produits touristiques saisonniers attrayants, à condition de mettre en place des stratégies durables.

L’attrait irrésistible des saisons florales

En ce mois de mars, les régions frontalières de Quan Bạ (Hà Giang) sont encore illuminées par les pêchers tardifs en fleurs, tandis que les poiriers recouvrent de blanc les routes sinueuses, les vallées et les villages nichés au pied des montagnes rocheuses.

Profitant de cette période printanière, Hà Giang organise deux festivals dédiés aux fleurs : le Festival des fleurs de pêcher, sous le thème « L’éclat des fleurs de pêcher – Printemps aux confins du pays », dans la commune de Cao Ma Po (district de Quan Ba) et le Festival des fleurs de poirier, intitulé « Printemps, fête aux frontières », dans la ville de Phô Bang (district de Dông Van). Les organisateurs s’activent actuellement pour accueillir touristes vietnamiens et étrangers dans les meilleures conditions.

Nombreux sont ceux qui, comme Nguyên Thu Hoa, choisissent de se rendre à Hà Giang au printemps pour explorer le plateau rocheux et admirer les majestueux poiriers en fleurs. « Nous savions que Hà Giang est célèbre pour ses champs de sarrasin en fleurs, mais nous hésitions toujours à y aller en début d’année à cause du climat humide. En découvrant la beauté des poiriers en fleurs, nous avons voulu essayer un nouvel itinéraire. C’est une belle surprise, car cette période offre un spectacle floral impressionnant avec des fleurs recouvrant montagnes et vallées », confie-t-elle.

Même si la saison des pruniers touche à sa fin, Môc Châu (Son La) continue d’attirer des foules de touristes, notamment le week-end. En février, les hôtels et homestays de la région étaient même surchargés. Avec plus de 3 000 hectares de pruniers, Môc Châu est sans doute l’un des plus vastes vergers de pruniers du Vietnam.

Après un hiver rigoureux, le passage au printemps transforme les montagnes en un décor féérique avec des vallées entières recouvertes de fleurs blanches. La vallée de pruniers de Nà Ka, située à proximité du centre de Môc Châu, est particulièrement prisée des visiteurs. Aux premières heures du matin, la brume matinale enveloppe les collines, rendant le paysage encore plus mystique.

Alors que la saison des pruniers touche à sa fin, Son La accueille une nouvelle attraction emblématique : la saison des fleurs de ban. Ces fleurs, d’un blanc immaculé, commencent à recouvrir les flancs des montagnes, coïncidant avec la tenue de nombreux festivals, dont le plus prestigieux est le Festival des fleurs de ban de la ville de Son La.

Au-delà de la contemplation des paysages en fleurs, les visiteurs peuvent découvrir la richesse culturelle des minorités ethniques locales à travers diverses activités : spectacles folkloriques, concours de beauté Người đẹp Hoa Ban, compétitions sportives traditionnelles, dégustations gastronomiques de spécialités montagnardes…

Trân Công Chinh, vice-président du Comité populaire de la ville de Son La, a souligné : « À ce jour, nous avons confié des missions précises aux différentes unités administratives locales afin de préparer l’accueil des touristes nationaux et internationaux. Ce festival est bien plus qu’un simple hommage à la beauté des fleurs de ban ; il représente une opportunité de mettre en lumière les trésors culturels, les paysages naturels et la richesse culinaire de notre ville en particulier, et de la province de Son La en général. »

Hanoï et ses douze saisons de fleurs

Hanoï n’est pas en reste lorsqu’il s’agit de mettre en valeur son patrimoine floral. Contrairement aux régions montagneuses où les fleurs poussent naturellement, celles de la capitale sont soigneusement cultivées et entretenues, conférant un charme unique chaque saison. En mars, les rues de la ville se parent de fleurs de sưa blanches, tandis qu’en avril, les lys envahissent les jardins et les ruelles. Plus récemment, la fleur de ban s’est imposée comme une nouvelle attraction touristique. Sans oublier, bien sûr, les emblématiques fleurs sữa (Alstonia scholaris) en automne, les champs de marguerites en novembre, les étangs de lotus en été et les vergers de pêchers éclatants en hiver.

D’après Dang Huong Giang, directrice du Service du tourisme de Hanoï, la ville bénéficie d’un véritable avantage compétitif grâce à sa richesse florale. « Hanoï possède de nombreux quartiers et villages spécialisés dans la culture des fleurs, ce qui offre des panoramas enchanteurs tant en centre-ville qu’en banlieue. Certains districts, comme Mê Linh, Ba Vi ou Tây Hô, ont réussi à exploiter cette ressource pour dynamiser le tourisme. Dans les années à venir, nous continuerons à renforcer cette orientation en associant le tourisme floral à d’autres activités pour maximiser son attractivité », explique-t-elle.

Un secteur touristique en plein essor qui nécessite une approche coordonnée

Il y a une dizaine d’années encore, le concept de « tourisme floral » était méconnu au Vietnam. Grâce aux médias et aux réseaux sociaux, certaines destinations ont rapidement gagné en notoriété en raison de leur richesse florale. L’exemple le plus frappant est celui de Hà Giang et de ses champs de sarrasin. Autrefois cultivée pour l’alimentation, cette plante est devenue une attraction touristique après que de jeunes voyageurs ont partagé ses images spectaculaires sur les réseaux sociaux.

La province de Hà Giang a su capitaliser sur cet engouement en organisant des festivals, en développant des circuits thématiques et en soutenant les agriculteurs dans la culture des fleurs. Aujourd’hui, près de 400 hectares de champs de sarrasin sont dédiés au tourisme, notamment à des endroits emblématiques comme la porte du ciel de Quan Bạ, le village culturel Mông de Mèo Vac et les routes pittoresques de Dông Van.

En parallèle, Hà Giang développe d’autres produits touristiques liés aux saisons florales, comme les cerisiers du Japon, les pêchers, les abricotiers et les rhododendrons des hauts sommets.

Hanoï, qui a une longue tradition de culture florale, a adopté une approche similaire en planifiant des zones dédiées et en organisant des événements annuels, tels que le Festival des fleurs de Mê Linh, la Fête des lotus de Tây Hô et le Festival des pêchers et des kumquats de Nhât Tân.

Vers un tourisme floral structuré et durable

L’expérience de pays comme le Japon avec la floraison des cerisiers ou la République de Corée avec ses feuillages d’automne montre que le tourisme floral peut devenir un véritable atout économique lorsqu’il est bien structuré.

Selon Phùng Quang Thang, vice-président de l’Association vietnamienne des voyagistes, de nombreux pays ont su transformer leurs saisons florales en marques touristiques fortes, attirant des millions de visiteurs chaque année. « Ces destinations ont mis en place des stratégies cohérentes en matière de plantation et de services, offrant des expériences immersives et professionnelles aux touristes », souligne-t-il.

Le Vietnam, bien que possédant un immense potentiel, doit encore surmonter plusieurs défis, notamment la saisonnalité de ce type de tourisme. Pour Pham Hai Quynh, directeur de l’Institut du développement du tourisme asiatique, les autorités locales doivent veiller à ce que l’exploitation du tourisme floral n’impacte pas négativement l’environnement et le paysage. L’intégration d’expériences culturelles locales pourrait également enrichir ces offres, rendant le tourisme floral vietnamien plus attractif et durable à long terme.

Avec une stratégie bien pensée, le Vietnam pourrait faire de ses saisons florales une marque distinctive, à l’image de ses voisins asiatiques. Le potentiel est là ; il ne reste plus qu’à structurer cette filière pour en faire un moteur incontestable.