L'incendie de la Cathédrale Notre-Dame de Paris, en 2019, a été une perte pour le peuple Français. Pourtant, en quelques jours, la base du plan de reconstruction de cet édifice emblématique a commencé à prendre forme grâce aux scans laser et aux modèles 3D réalisés des années auparavant.
Des histoires similaires se déroulent partout dans le monde, où la guerre, l'urbanisation rapide et le changement climatique continuent de menacer le patrimoine culturel de l'humanité.
Du projet Zamani en Afrique du Sud à l'initiative mondiale Open Heritage de CyArk en collaboration avec Google, des nations et des organisations du monde entier se lancent dans une course pour numériser la mémoire avant qu'elle ne disparaisse.
En Italie, Pompéi est devenu le point focal de nombreux projets de numérisation à grande échelle, transformant ses vestiges fragiles en une archive interactive au service des chercheurs et du public.
Au Vietnam, le ministère de la Culture, des Sports et du Tourisme a lancé un programme de numérisation du patrimoine culturel pour la période 2021-2030, offrant l'opportunité de s'aligner sur la tendance mondiale en mettant l'accent de la conservation numérique sur l'éducation et les initiatives créatives émanant de la communauté elle-même.
Au cours des trois dernières années, le Docteur Surendheran Kaliyaperumal dispense le cours Principes fondamentaux de la conception 3D créative à l'Université RMIT Vietnam selon une approche différente.
Au lieu de concevoir des objets aléatoires ou des mondes imaginaires, les étudiants sont chargés de choisir des sites patrimoniaux, temples, pagodes, structures architecturales anciennes, parcs ou même restaurants populaires, et de les reconstituer à l'aide du logiciel de modélisation 3D Blender.
À ce jour, les étudiants ont modélisé plus de 100 sites au Vietnam, dont environ 65 œuvres considérées comme suffisamment précieuses pour être archivées. Cette collection s'étend des symboles tels que la Poste Centrale de Sai Gon et le Palais de l'Indépendance (Dinh Doc Lap) à des espaces du quotidien comme le parc Hoang Van Thu ou un petit stand de pha lau sur la rue Nguyen Thanh Y (TP. Ho Chi Minh).
L'impact du cours ne se limite pas aux compétences. Le Docteur Surendheran Kaliyaperumal estime que : « Les étudiants comprennent la culture, améliorent leur capacité à raconter des histoires, se connectent émotionnellement et développent un sentiment d'appréciation pour leur patrimoine. »
« Le Vietnam possède une culture riche, une force créative jeune et un accès de plus en plus large aux outils numériques. Avec de tels atouts, le Vietnam a les conditions nécessaires pour faire de la conservation numérique un pont culturel et d'innovation, transformant chaque salle de classe en laboratoire créatif et le patrimoine en une ressource vivante et partageable pour l'avenir », affirme Monsieur Surendheran.
Pour le Docteur Kaliyaperumal Surendheran, il ne s'agit pas simplement d'un acte d'enseignement, mais d'une ambition professionnelle. Il imagine un référentiel national ouvert où les étudiants, les artistes et la communauté peuvent continuer à contribuer pour créer une « carte numérique » vivante de la culture vietnamienne. Dans 10 à 20 ans, cette archive pourrait devenir une source de matériel pédagogique ainsi qu'une banque de mémoire culturelle pour le pays.
« Si ce projet peut inspirer les étudiants à devenir des gardiens de la culture, je crois que c'est un accomplissement vraiment significatif », partage-t-il.
Alors que le Vietnam entre dans un processus d'urbanisation rapide, de telles initiatives envoient un message fort : le patrimoine peut perdurer si nous enseignons à la jeune génération non seulement comment concevoir, mais aussi comment se souvenir.
