Chercheuse à l’Institut de chimie de l’Académie vietnamienne des sciences et technologies, Ngoc Anh voyage souvent, que ce soit pour des séjours professionnels à l’étranger ou de longs déplacements loin de Hanoï. Dans ses affaires, elle emporte toujours un foulard multifonction orné du drapeau rouge à étoile dorée, symbole du Vietnam.
« À l’étranger, il me suffisait d’apercevoir le drapeau national pour ressentir une bouffée de joie, comme une force nouvelle », raconte-t-elle. « Je me suis dit : pourquoi ne pas créer un foulard aux couleurs du drapeau que chacun pourrait emporter partout avec soi ? »
Un jour, elle publie une photo d’elle portant ce foulard sur TikTok. L’image suscite un flot de commentaires enthousiastes : de nombreux jeunes expriment alors le désir de posséder un accessoire simple, mais imprégné de l’esprit vietnamien. Ainsi, est né « Tiem may yeu nuoc ».

Entre mode et symbole
Confectionner un foulard n’était pas le plus difficile. L’enjeu, confie Ngoc Anh, était de préserver la dignité et la solennité du drapeau tout en proposant un produit élégant, moderne, adapté à un usage quotidien. Le groupe a testé de multiples tissus, du coton léger adapté au climat tropical aux étoffes plus structurées. Chaque étoile dorée est brodée minutieusement à la main, point après point, pour garantir l’équilibre parfait des cinq branches.
« Nous voulions un foulard à la fois beau et durable, utilisable au quotidien, pas seulement lors de grandes cérémonies. L’étoile devait être nette et précise, car c’est le cœur du produit », explique Ngoc Anh.
Au fil des expérimentations, l’équipe a mis au point des tissus résistants, peu froissables et faciles à plier, permettant d’emporter l’accessoire partout.
Une collection solidaire

Rapidement, l’atelier ne s’est pas limité aux foulards. Sont venus s’ajouter des bandeaux, des élastiques à cheveux, des serre-têtes : de petits objets simples et raffinés permettant à chacun, étudiant comme employé de bureau, de « porter le Vietnam sur soi » avec naturel.
Mais l’originalité de « Tiem may yeu nuoc » tient aussi à son modèle économique : loin de chercher le profit, le groupe reverse une partie de ses revenus à des actions sociales, comme le programme « Ao am cho em » (Un manteau chaud pour toi), destiné à fournir des vêtements d’hiver aux enfants des régions montagneuses.
« Nous venons nous-même de zones de montagne, où les hivers sont rigoureux. Nous savons ce que signifie manquer de vêtements chauds. Dès le départ, nous avons voulu consacrer une part des bénéfices à envoyer des manteaux aux enfants défavorisés », confie Ngoc Anh.
De fil en aiguille, ces foulards patriotiques sont devenus les messages d’une chaîne de solidarité : des salles de couture de Hanoï jusqu’aux écoles reculées des hauts plateaux, où l’on distribue des manteaux neufs et où les sourires des enfants témoignent de l’impact du projet.
Le succès de « Tiem may yeu nuoc » ne se limite pas au Vietnam. Des associations, des établissements publics, mais aussi de nombreux étudiants et expatriés vietnamiens à l’étranger commandent ces foulards. Pour eux, il s’agit moins d’un accessoire de mode que d’un fragment de mémoire et d’identité nationale, un signe de lien avec la patrie.
Quiconque a déjà porté ce foulard rouge et or témoigne d’un sentiment particulier : au-delà de la douceur du tissu, c’est la chaleur d’une fierté partagée qui se transmet à travers chaque point de couture.
« Nous ne vendons pas seulement des foulards ou des accessoires», conclut Ngoc Anh. « Notre atelier cherche à relier passé et présent, à rapprocher chaque individu de sa patrie et à porter l’image du Vietnam jusqu’aux quatre coins du monde. »