La maison longue est l’oeuvre sculpturale par excellence des Ede. Tous les motifs les plus typiques sont là, sur l’estrade, sur l’escalier, sur les poteaux, sur les bancs… Le docteur Luu Hùng, directeur adjoint du musée d’Ethnographie du Vietnam, nous explique: "Par rapport aux autres ethnies du Tây Nguyên (Hauts plateaux du Centre), les Ede sont les artistes les plus aboutis sur le plan de la décoration et de la sculpture. Mais ils restent dans la tradition artistique générale du Tây Nguyên qui tend à évoquer plutôt qu’à décrire dans les détails".
Sur les poteaux et les charpentes, les Ede gravent des motifs reproduisant l’harmonie entre le ciel, la terre et les créations de la nature. Luu Hung: "Les gravures sont omniprésentes sur les poteaux et les charpentes. Outre les seins bien arrondis et le croissant de lune, symboles du régime matrilinéaire, on voit encore la marmite en cuivre, symbole de la richesse, et des motifs d’animaux comme le varan, le dragon, la crabe ou encore la loutre".
Dam Thi Hop, conservatrice au musée d’Ethnographie: "On grave souvent le motif du varan sur l’entrait pour s’attirer la chance. Quant au dragon, il a des nageoires en forme de poisson, une moustache et des cornes bien relevées. Selon les spécialistes, il s’agit d’un motif original des Ede qui ne se confond avec aucun autre motif ethnique".
Les maisons de sépulture sont également des lieux d’expression des sculpteurs Ede qui n’utilisent rien d’autre que leurs haches, leurs machettes et leur imagination. Des hommes jouant au tambour, des femmes pilant du riz ou portant une hotte sur leur dos… Ces sculptures sont loin d’être parfaites, la proportion n’est souvent pas bonne, mais toutes véhiculent un message spirituel. Les Ede sculptent ces statuettes pour que leurs morts atteignent rapidement le paradis.
Chaque tombe est décorée de 4 statuettes en forme humaine, au moins, situées aux 4 coins. Ces statuettes peuvent être faites en bois, en ivoire d’éléphant ou en corne de buffle. En fonction de l’âge, des mérites et de la position qu’a occupée le défunt dans la société que sera décidée la taille de sa statuette. Luu Hung: "Croyant que les morts auront une autre vie dans l’au-delà, les Ede leur envoient plusieurs objets qu’ils pourront emporter avec eux. Ils décorent leurs tombeaux pour qu’ils puissent vivre dans une belle maison dans l’autre monde".
La plupart des sculptures des Ede ne sont ni fines ni sophistiquées, mais absolument authentiques. Elles expriment leur façon de voir le monde et de marquer leur identité.