À partir de déchets d’élevage qui exerçaient autrefois une forte pression sur l’environnement, la ferme parvient désormais à produire de l’électricité sur site pour ses activités, contribuant ainsi à la réduction des coûts d’exploitation et des émissions de gaz à effet de serre.
Réduire la pollution et les coûts énergétiques
Dans un contexte où le Vietnam accélère sa transition verte et vise à devenir un pays à revenu élevé d’ici 2045, de nombreux projets de coopération entre le Vietnam et l’Australie sont mis en œuvre avec efficacité, contribuant simultanément à relever les défis liés à la croissance économique, à la protection de l’environnement et à l’amélioration du bien-être social.
Parmi ces initiatives figure le projet de conversion des déchets d’élevage en énergie renouvelable dans la province de Thai Nguyen, déployé avec le soutien du Business Partnerships Platform (BPP), un programme financé par le gouvernement australien.
Ce projet s’inscrit dans le cadre du thème « Relance verte » du programme BPP, lancé en 2021, avec pour objectif d’aider les exploitations porcines à travers le Vietnam à valoriser le biogaz excédentaire afin de produire une électricité renouvelable à coût abordable.
Il résulte d’une coopération fructueuse entre E-GREEN, l’Organisation néerlandaise de développement (SNV), Nexus for Development, HD Bank, la société de services techniques STT&T, la société Chinh Phat, avec le soutien du gouvernement australien.
Selon Tran Xuan Phong, propriétaire d’une ferme porcine à Soi Vang (dans la commune de Tan Cuong, province de Thai Nguyen), le système de production d’électricité à partir du biogaz est exploité en continu par sa famille depuis quatre ans. L’ensemble des déchets d’élevage est acheminé vers une installation de biogaz afin de produire du gaz, lequel est ensuite transformé en électricité pour un usage direct sur l’exploitation.
À la tête d’un élevage de 4 000 porcs, Tran Xuan Phong a indiqué : « Comparé au prix de l’électricité achetée sur le réseau national, le coût de l’électricité produite par le système de biogaz ne représente qu’environ 50 %, voire moins ».
Alors que le tarif de l’électricité aux heures de pointe avoisine 4 000 dôngs par kilowattheure, le coût de l’électricité issue du biogaz se situe entre 1 000 et 1 200 dôngs par kilowattheure, incluant les frais d’exploitation, l’amortissement, les lubrifiants et les consommables.
En moyenne, la facture mensuelle d’électricité de la ferme de Tran Xuan Phong est ainsi passée d’environ 50 millions de dôngs à près de 20 millions de dôngs.
Selon M. Phong, le système peut couvrir entre 60 % et 80 % des besoins énergétiques de la ferme, en fonction du nombre d’animaux et de la quantité de biogaz produite à chaque période.
Lorsque le cheptel est important et que les déchets sont abondants, le générateur peut fonctionner jusqu’à 18 heures par jour. En revanche, lorsque la production de gaz est plus faible, l’exploitation doit recourir partiellement à l’électricité du réseau durant les heures creuses.
Au-delà des bénéfices économiques, l’impact environnemental est particulièrement notable. Au lieu de brûler ou de rejeter le biogaz, source d’odeurs, son utilisation pour la production d’électricité permet de supprimer presque totalement les nuisances olfactives et d’améliorer sensiblement l’environnement de vie des zones environnantes.
Lever les obstacles à l’investissement dans les modèles de location-vente d’électricité issue du biogaz
Selon les partenaires du projet, ce modèle permet non seulement de réduire les émissions de gaz à effet de serre, mais aussi de diminuer jusqu’à 25 % les coûts énergétiques, tout en générant des revenus supplémentaires pour les agriculteurs et en favorisant un élevage plus durable et plus respectueux de l’environnement.
Nguyen Thi Quynh Huong, cheffe de projet à l’Organisation néerlandaise de développement (SNV), a expliqué « Le projet, baptisé ‘Biogaz pour une agriculture circulaire’, vise à promouvoir le développement de l’énergie issue du biogaz dans le secteur de l’élevage au Vietnam. La SNV agit en tant que représentante des bailleurs de fonds, tout en apportant une assistance technique, en gérant les financements et en coordonnant les partenaires ».
Cette initiative entend répondre simultanément à trois enjeux majeurs : la réduction des émissions de gaz à effet de serre, la diminution des coûts énergétiques des exploitations agricoles et la levée des barrières liées à l’investissement initial.
Toujours selon Mme Huong, par le passé, de nombreuses exploitations agricoles avaient investi dans des générateurs au biogaz de faible qualité, dont le fonctionnement instable entraînait des pannes après une courte période d’utilisation.
Pour y remédier, le projet a mis en place un modèle de type Energy Service Provider (ESP), dans lequel l’entreprise investit dans les générateurs, assure leur exploitation et vend directement l’électricité aux exploitations, au lieu de céder définitivement les équipements. Ce modèle permet aux agriculteurs de ne pas supporter les coûts initiaux et de payer l’électricité à un tarif inférieur à celui du réseau.
L’électricité issue du biogaz peut remplacer entre 60 % et 70 % de la consommation électrique du réseau dans de nombreuses exploitations agricoles, permettant d’économiser environ 30 % des coûts mensuels d’électricité. Par ailleurs, l’ensemble du biogaz auparavant brûlé ou rejeté dans l’environnement est désormais collecté et transformé en électricité, contribuant à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, a ajouté Mme Huong.
Après trois années de mise en œuvre du projet, plus de 120 systèmes de production d’électricité à partir du biogaz ont été installés dans 98 exploitations agricoles réparties sur 24 provinces et villes vietnamiennes, produisant près de 17 000 mégawattheures d’électricité propre.
Le projet a également permis de constituer des équipes locales de centaines de techniciens et de former des dizaines d’ingénieurs spécialisés dans l’énergie issue du biogaz.
Du point de vue des entreprises, Tong Xuan Chinh, directeur général de la société de construction mécanique Chinh Phat, a estimé que le projet constituait un levier déterminant pour permettre à l’entreprise de passer des générateurs diesel à la production d’électricité à partir du biogaz, un domaine à forte exigence technologique auparavant dominé par les pays développés.
Grâce au soutien initial et à la coopération avec des universités nationales, la société Chinh Phat a progressivement maîtrisé l’intégration des systèmes et amélioré la stabilité de la tension électrique, un facteur clé pour convaincre les grandes exploitations, y compris celles à capitaux étrangers.
À ce jour, environ 150 systèmes de production d’électricité à partir du biogaz ont été déployés, dont plusieurs combinent également l’énergie solaire et éolienne et sont surveillés et pilotés à distance.
Selon M. Chinh, le coût d’investissement d’un système de ce type varie entre 400 et 500 millions de dôngs, ce qui le rend particulièrement adapté aux exploitations de plus de 3 000 porcs. Pour les grandes exploitations, le système peut fonctionner presque en continu et permettre d’économiser jusqu’à 90 % des coûts d’électricité.
Plus important encore, le biogaz est brûlé à haute température dans la chambre de combustion du générateur, garantissant que les émissions respectent les normes environnementales vietnamiennes.
Bien que le programme BPP ait officiellement pris fin à la fin de l’année 2024, les partenaires ont indiqué qu’ils continueront à coopérer afin de maintenir et d’élargir les impacts positifs au sein des communautés agricoles à travers le Vietnam.
Selon le directeur général de la société Chinh Phat, malgré la fin du soutien du projet, sa société poursuivra l’expansion de ses activités sur le marché intérieur et envisage progressivement de se développer dans des pays de la région, tels que le Laos et le Cambodge.
Il a estimé que, dans un contexte de développement d’un élevage concentré et de grande échelle, associé à des exigences environnementales de plus en plus strictes, la valorisation du biogaz pour la production d’électricité constitue non seulement une solution économique, mais ouvre également de vastes perspectives pour le développement des énergies renouvelables et de l’économie circulaire dans l’agriculture.
Évaluant les résultats du projet, l’ambassadrice d’Australie au Vietnam, Gillian Bird, a souligné qu’il s’agit de l’une des nombreuses initiatives par lesquelles l’Australie soutient la transition énergétique verte et une agriculture plus durable au Vietnam, alors que les gouvernements australien et vietnamien se sont engagés à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050.
« Nous sommes ravis de constater que ce partenariat contribue à réduire les émissions de carbone et les coûts énergétiques, tout en créant des emplois et de nouvelles sources de revenus pour les agriculteurs vietnamiens », a-t-elle déclaré.