Plus qu'un simple lieu de halte pour les amoureux de la nature et de l'arôme réputé du café, Kon Chenh est aussi un voyage de retour à la culture indigène unique de la population Mo Nam.
Depuis le bourg de Mang Den, une route sinueuse de six kilomètres mène au village. Ces dernières années, le nom de Kon Chenh s’est imposé comme une destination émergente, symbole d’une communauté qui conjugue préservation culturelle et ouverture au développement.
Dans sa maison en bois appelée Hiem A Nac, la propriétaire Y Ha accueille les visiteurs avec un sourire chaleureux et une tasse de café torréfié sur place. « Les week-ends sont les plus animés », raconte-t-elle. « Les visiteurs aiment goûter au com lam, au porc grillé, au ruou can, écouter les gongs et partager nos coutumes. »
Un village en mutation
Sa voisine, Y The, secrétaire de la cellule du Parti du hameau et propriétaire d’un homestay, explique que Kon Chenh, en langue Mo Nam, signifie « le village des fleurs de mua ». Le village conserve de riches traditions : la fête de la nouvelle récolte, la cérémonie de l’eau, la danse xoang et les chants populaires. Autour de sa maison décorée de sculptures en bois, le paysage s’est embelli grâce aux efforts collectifs des villageois pour accueillir les visiteurs.
À l’entrée du village, Y Tuan, 37 ans, est considérée comme une figure dynamique du tourisme communautaire. Depuis l’ouverture de son homestay en 2024, elle a reçu des touristes vietnamiens et étrangers. Elle prépare des repas « faits maison » avec les légumes cueillis par les visiteurs eux-mêmes : une expérience simple, mais authentique. En parallèle, elle collecte et vend le ginseng đương quy, contribuant à diversifier les revenus locaux.
Aujourd’hui, 110 foyers, dont près de 90 % Mo Nam, participent au développement du village touristique. Les métiers traditionnels, tressage, tissage de brocart, fabrication d’instruments de musique, trouvent un nouveau souffle : leurs produits sont désormais vendus sur les marchés et dans les zones touristiques de Mang Den.
Le café de climat froid, les homestays et les activités d’expérience ont permis d’améliorer la vie quotidienne. Plusieurs familles gagnent 10 à 12 millions de dongs par mois, assurant une stabilité économique croissante. Huit foyers gèrent actuellement des hébergements communautaires.
Photo : TCDL.
Expériences authentiques
À Kon Chenh, les visiteurs profitent d’un climat tempéré et d’une gastronomie montagnarde typique : poisson de ruisseau, viande de buffle, légumes sauvages et riz de montagne. Les amateurs d’aventure peuvent participer à la cueillette du café, faire du trekking dans la forêt ou observer les artisans fabriquer des gongs et des instruments comme le ta vau.
Le Maître Artisan A Le, né en 1956, incarne la mémoire vivante du village. Près du feu de bois, il joue du ta vau et confie : « Si plus personne ne sait en fabriquer ou en jouer, ce serait une grande tristesse. » Grâce à lui et à d’autres passionnés, les mélodies traditionnelles résonnent à nouveau, accompagnant le renouveau du tourisme local.
Défis et espoirs
Malgré son charme, Kon Chenh fait face à plusieurs défis : routes glissantes, signal téléphonique instable et manque de compétences touristiques. Le risque de commercialisation excessive des traditions existe, mais la communauté reste consciente de la nécessité d’un développement durable, conciliant économie et préservation culturelle.
Le village mise sur une jeunesse proactive et formée. Fin août 2025, le Collège du Tourisme de Hue a organisé une formation en gestion de homestay et délivré des certificats professionnels aux habitants. Parallèlement, le Comité populaire de la commune de Mang Den a adopté un plan de développement pour la période 2025-2030, visant à faire de Kon Chenh une destination culturelle et gastronomique emblématique du café et des festivals ethniques.
Le café, fierté du plateau
À 1 200 m d’altitude, le terroir fertile confère aux grains de café une saveur douce-amère distinctive. Chaque saison de récolte, les villageois sélectionnent minutieusement les baies mûres, les trempent dans l’eau et ne conservent que les grains les plus denses.
Actuellement, 21 foyers collaborent avec la coopérative locale sur 12 hectares de caféiers, avec un objectif d’expansion à 30 hectares d’ici 2025. Cette filière constitue la colonne vertébrale économique du village, tout en renforçant son identité autour du « café de climat froid ».
Un modèle communautaire structuré
Le modèle de tourisme communautaire de Kon Chenh repose sur une organisation claire :
- groupe d’hébergement ;
- groupe de restauration ;
- groupe d’artisanat ;
- groupe artistique (spectacles de gongs et danses xoang).
Chaque membre du village a ainsi un rôle précis et un revenu, favorisant l’entraide et la cohésion. Les habitants suivent des formations régulières en accueil, en communication et en promotion numérique, développant des services plus professionnels et attrayants.
Photo: Nhandan
Vers un avenir durable
Lors de notre visite, les routes étaient encore en travaux, rendant les déplacements difficiles. Mais l’optimisme reste intact. « Nous voulons que les touristes ne viennent pas seulement déguster le café, mais qu’ils ressentent aussi l’esprit Mo Nam à travers nos chants, notre cuisine et nos danses », souligne Y The.
Au milieu des montagnes verdoyantes, le village de Kon Chenh trace son chemin avec patience. Entre l’arôme du café, la chaleur des habitants et les sons ancestraux des gongs, il incarne l’espoir d’un tourisme durable, où le développement s’accorde avec la fierté culturelle d’un peuple des hauts plateaux.