Il y avait plus de monde que d'habitude au Port de Cat Lai, dans le sud de Hô Chi Minh-Ville, le jour du départ pour les Îles Spratly. À bord du navire, tout le monde était prêt à dire adieu à la terre ferme avant d’entamer un long voyage. Dans l'éclat du soleil de l’aube tombant sur le navire, nous avons vu un vieil homme sortant du pont arrière du navire. Il portait un turban sur et sa longue barbe blanche au vent contrastait avec son visage brûlé par le soleil.
Le vieil homme, Lô Phu Bao, est d'ethnie Cham. Il est originaire du bourg de Phuoc Dân, district de Ninh Phuoc, province de Ninh Thuân. Il nous a informé qu'il allait rendre visite à son fils Lô Lam Sinh, un soldat en poste sur la Grande Île de Spratly.
Après une nuit à bord du navire, le lendemain matin, la plupart des passagers, bien que beaucoup souffraient du mal de mer, ont essayé de monter sur le pont pour respirer l'air pur. Certaines personnes debout à l'avant du bateau ont montré quelque chose au loin : la Grande Île de Spratly.
Alors que tout le monde appréciait la vue, quelques sons musicaux étranges venant de la cabine du bateau ont attiré l'attention. C’tait le vieil homme Cham qui jouait du hautbois Saranaï. Au milieu de la mer immense, la musique avait une puissance invisible. Les mélodies magiques résonnaient, tantôt lentes, tantôt rapides et précipitées.
Lô Phu Bao avec son Saranaï.
Les mélodies magiques du Saranaï sur le bateau en voyage à l'Île Spratly.
Retrouvailles entre Lô Phu Bao et son fils Lô Lam Sinh sur le quai de la Grande Île de Truong Sa.
Ces mélodies ont été un cadeau pour son fils et les soldats en mission sur la Grande Île.
Adieu à son fils et à ses collègues avant de reprendre le bateau pour le continent.
Les camarades de Lô Lam Sinh ont choisi un badamier comme un cadeau pour le vieil homme.
Le vieil homme raconte avec enthousiasme son aventure dans l’archipel de Spratly.
Les gens debout sur le pont étaient tous silencieux, écoutant les mélodies, puis applaudissant l'interprète. Tout le monde semblait retrouver son énergie et oublier la fatigue.
Puis, le navire s'est ancré à la Grande Île de Spratly. Le vieil homme Cham a été accueilli par son fils sur le quai, puis les deux sont allés dans la station où ils se sont assis sur des chaises en pierre sous un grand arbre. Autour d'eux, une foule de soldats et leurs parents.
Ensuite, les mélodies du Saranaï ont résonné de nouveau. Ce don spirituel était si spécial que le vieil homme a reçu le surnom de "vieux Saranaï" par tous les habitants de l'île. Partout où il a été, il a joué pour le plus grand bonheur de tous, tout comme lors d'un festival du peuple Cham.
Le vieil homme Cham et son hautbois nous ont tellement conquis qu’après le voyage, nous avons décidé de le suivre dans sa ville natale dans la province de Ninh Thuân. Le "vieux Saranaïi" a rappelé à ses co-villageois ce qu'il a vu et entendu sur la Grande Île. Il a aussi parlé de ses « nombreuses représentations » devant un public conquis, et bien sûr de la façon dont son fils et les soldats faisaient pour protéger les eaux territoriales.
Nous nous sommes demandés quand les soldats des îles Spratly auraient l’occasion d’entendre à nouveau ces mélodies. Mais nous étions convaincus qu’elles continueraient de résonner dans leur esprit encore bien longtemps, comme un moment unique et inoubliable.