Né à Bayeux, en Normandie (France), juste avant les années 80, Réhahn Croquevielle est avant tout un voyageur à la recherche perpétuelle de nouvelles rencontres humaines. Le monde entier est son terrain de jeu pour photographier les ethnies, et leurs cultures.
Son premier contact avec le Vietnam remonte en 2007, dans le cadre d’une mission pour une association caritative française. Une passion pour le pays et la culture qui l’amène en 2011 à s’installer à Hôi An (au Centre), la splendide petite ville portuaire classée au patrimoine mondial de l’UNESCO (Organisation des Nations unies pour l'Éducation, la Science et la Culture).
Ces dernières années, le photographe français a passé la plupart de son temps à parcourir le Vietnam à moto vers des villages toujours plus reculés. Un itinéraire du Nord au Sud lui permettant de rencontrer de nouvelles ethnies minoritaires, telles que les Thai, Nùng, Tày, H’Mông, Gia Rai ou encore les Co Tu.
Chacune de ses photos préserve l’émotion captée au moment de la prise de vue, et laisse transparaître cette déclaration d’amour d’un Français pour le peuple vietnamien.
Réhahn Croquevielle pourrait passer des heures à parler et partager ses connaissances. Un profond attachement pour le pays, à ces personnes âgées et enfants de près de 40 ethnies minoritaires rencontrés pendant ses périples.
40.000 photos sur des ethnies
Pour le photographe français, un pays où 54 ethnies cohabitent reste un sujet particulièrement intéressant à explorer. Au fil des 35 provinces et villes visitées, il en a tiré quelques 60.000 photos, dont 40.000 consacrées uniquement aux ethnies minoritaires.
Un travail qui a fini par aboutir à un premier livre compilant ses plus belles photos dans Vietnam, mosaïque de contrastes paru fin 2014. En décembre 2015, le photographe français sort un deuxième opus intitulé Vietnam, mosaïque de contrastes II, contenant près de 150 photos.
Il reconnaît que ses clichés ont évolués au fil des ans. Dans le premier ouvrage, ses prises passaient par l’objectif d’un touriste français visitant le pays pour la première fois. Tandis que pour le deuxième livre, sa vision s’est ancrée plus localement, enrichie par une compréhension plus profonde du Vietnam et de ses habitants.
«Je sens comme une renaissance au Vietnam. Je me sais très chanceux, car je peux faire et réussir dans ce que j’aime. Le pays me le donne, et je dois lui rendre quelque chose en retour», exprime-t-il. Il ajoute que la meilleure chose qu’il pouvait faire est de prendre des photos, pour conserver les caractéristiques culturelles du pays.
Pour Réhahn Croquevielle, les portraits ne reflètent pas uniquement la beauté du Vietnam. Ils permettent de capter et de transmettre les histoires passionnantes du photographe mais aussi de la personne photographiée. Et c’est justement cela le vrai but de l’art selon son point de vue.
Des cultures en voie de disparition
Le photographe s’est passionné pour le quotidien de ces peuples, le motivant à continuer son aventure au Vietnam.
Symbole par excellente, le costume traditionnel reste l’un de ses sujets favori. Il raconte cependant qu’il devient de moins en moins courant de porter quotidiennement un costume traditionnel, voire même d’avoir une simple tenue à la maison.
«L’année dernière, je suis allé à Quang Ngai pour rencontrer les Co. Je me suis rendu dans de nombreux villages, et personne ne possédait de costume traditionnel». Et ce, même pour le festival. Un choc pour le photographe.
«Finalement, j’ai trouvé une dame et je lui ai demandé de porter le costume pour des photos. Elle m’a dit qu’ils ne veulent pas vraiment garder leur costume traditionnel», raconte-t-il.
Cette disparition progressive des traditions motive plus que tout Réhahn de prendre ces photos, de peur de ne plus être en mesure de les voir de nouveau. «Il y a quelques années encore, je voyais des Thai blanc porter leur costume traditionnel à Mai Châu (province de Hoà Binh). Et maintenant, je ne peux pas en trouver un seul. Je suis allé au marché et j’ai vu qu’ils ont troqué le costume traditionnel pour des jeans. C’est absurde», confie-t-il.
Dernière anecdote pour illustrer l’ampleur de cette perte culturelle : dans l’une de ses visites dans un village de l’ethnie Pu Peo, seule une vieille femme savait encore confectionner une tenue traditionnelle.
Dans le but de préserver et de valoriser la culture ethnique vietnamienne, le photographe, qui dirige une galerie à Hôi An, recueille les costumes traditionnels des ethnies minoritaires pour préparer une exposition internationale prévue en septembre prochain en Normandie.