Le 8 octobre après-midi, dans le cadre du Congrès mondial de la Fédération internationale des associations de transitaires et assimilés (FIATA) s’est tenue la deuxième session de discussion intitulée : « La logistique pour le commerce électronique transfrontalier - tendances et solutions optimales ».
Le Vietnam élève ses standards et renforce la logistique mondiale
L’essor du commerce électronique international engendre une forte demande en solutions logistiques rapides, flexibles et efficaces. Les consommateurs du monde entier attendent désormais des livraisons plus rapides, à coût raisonnable, et une expérience d’achat fluide, faisant de la logistique un facteur décisif de compétitivité.
Lors de cette session, les experts et entreprises du secteur ont partagé leurs analyses sur les nouvelles tendances, de la digitalisation à la gestion douanière en passant par les infrastructures internationales, ainsi que des solutions concrètes pour permettre aux entreprises d’exploiter efficacement les marchés mondiaux.
Selon Dereje Derero, directeur des services de fret et de logistique d’Ethiopian Airlines, le commerce électronique est appelé à croître fortement, transformant profondément le transport international et ouvrant des opportunités de développement d’un réseau logistique sûr, efficace et fiable. Il a toutefois mis en garde contre les défis liés à la cybersécurité, insistant sur la nécessité d’un commerce électronique sûr et fiable.
Un représentant d’un grand groupe logistique international a indiqué que les coûts logistiques représentent actuellement jusqu’à 30 % du prix moyen d’un produit. Au-delà de 30 à 50 %, de nombreuses petites et moyennes entreprises se voient contraintes de se retirer du marché ou de délocaliser leur chaîne d’approvisionnement pour réduire les coûts.
Au Vietnam, avec près de 3 millions de commandes quotidiennes, l’optimisation logistique devient cruciale pour renforcer la compétitivité des entreprises locales.
Selon Steve Wang, directeur général du groupe FAR International Holdings, le commerce électronique transfrontalier doit respecter les réglementations de chaque pays membre des Nations unies, chacun disposant de son propre système juridique et de ses propres procédures. Le Vietnam se distingue avec le décret n°85/2021/NĐ-CP, modifiant le décret n°52/2013/NĐ-CP sur le commerce électronique.
La mise en œuvre de ce décret renforce la responsabilité des plateformes, la transparence des ventes et la protection des consommateurs, tout en évitant de complexifier les activités commerciales. Les plateformes ont 24 heures pour retirer tout produit en infraction et doivent respecter les politiques standard de retour et de remboursement. Ces dispositions seront intégrées dans le projet de loi sur le commerce électronique attendu pour approbation à l’Assemblée nationale en octobre, posant ainsi un cadre légal moderne pour le commerce électronique du futur.
Toujours selon Steve Wang, le commerce électronique doit aussi composer avec les différences culturelles, d’infrastructure et d’habitudes de consommation. Par exemple, en Jordanie, 35 % des paiements s’effectuent à la livraison, tandis qu’en Chine, cette pratique a quasiment disparu.
Au Vietnam, les écarts d’infrastructures demeurent un défi pour le développement logistique et la promotion du commerce électronique. Pour y remédier, le gouvernement, le ministère de l’Industrie et du Commerce, ainsi que les entreprises privées ont mis en œuvre de multiples initiatives coordonnées.
Selon Lai Viet Anh, directrice adjointe du département du commerce électronique et de l’économie numérique, tandis que le gouvernement investit dans les infrastructures, les ministères concentrent leurs efforts sur la construction de bases de données, de standards et de plateformes numériques.
Le secteur privé joue également un rôle clé en connectant des centaines de fournisseurs tout au long de la chaîne de valeur, garantissant une expérience d’achat fluide et une chaîne d’approvisionnement optimisée. Parallèlement, les mécanismes de financement et de coopération public-privé soutiennent efficacement les projets de logistique et de commerce électronique, renforçant la connectivité internationale.
Grâce à cette synergie, le Vietnam ambitionne de bâtir un système logistique moderne et performant, tout en élargissant le commerce électronique transfrontalier afin de permettre à ses entreprises de conquérir de nouveaux marchés.
Optimisation logistique et solutions technologiques
Une question centrale reste la gestion des retours de produits : qui du fournisseur logistique, de la plateforme ou des autorités doit en assumer la responsabilité ? D’après les expériences internationales, cette responsabilité doit être partagée dès le départ. La plateforme initie le processus, le prestataire logistique assure le transport et la gestion des produits, tandis que l’autorité supervise les retours, redistributions ou remboursements. Une telle coopération permet de réduire les coûts et d’améliorer les marges bénéficiaires.
Tracy Hackshaw, stratège principal en économie numérique à l’Union postale universelle (UPU), a souligné que dissocier les modèles de coûts complexes des systèmes intégrés aide les petites entreprises à opérer plus vite et plus efficacement. Cette approche leur offre une visibilité complète et une flexibilité opérationnelle, tout en optimisant leur chaîne logistique sans supporter les coûts des grands intégrateurs.
Cependant, le partage des données reste une question sensible. Selon Steve Wang, les clients hésitent souvent à divulguer leurs informations. Si les données de suivi améliorent l’expérience client, une mauvaise gestion peut au contraire faire baisser les ventes.
La visibilité totale de la chaîne logistique est cruciale, car chaque expédition passe par 8 à 12 systèmes différents. Les plateformes capables d’agréger les données – depuis les points d’expédition, les douanes, les compagnies aériennes jusqu’aux transporteurs finaux – offrent une vision unifiée qui facilite la gestion des livraisons. La tendance actuelle est à l’harmonisation des systèmes via des API, bien que certaines disparités internes subsistent.
Les microentreprises, qui représentent plus de 90 % des entreprises, peinent à exporter, notamment à cause des coûts logistiques élevés et du manque de capacités. Un écosystème de soutien, en partenariat avec les grandes plateformes mondiales, peut leur fournir des solutions intégrées et des outils de formation, favorisant leur accès au marché et l’optimisation du commerce transfrontalier.
L’objectif est de donner les moyens aux petites entreprises de devenir leurs propres prestataires logistiques, en les connectant aux transporteurs, aux services douaniers et aux institutions d’appui, pour qu’elles puissent se concentrer sur la production et l’innovation, tandis que les plateformes gèrent les opérations à coût réduit et à grande échelle.
Steve Wang a résumé trois étapes clés de la mondialisation des PME : ouvrir une boutique en ligne, accompagner le client jusqu’à l’achat et livrer le produit final.
Selon lui, l’intelligence artificielle (IA) joue un rôle crucial dans cette évolution : elle automatise la gestion des prix, optimise les budgets publicitaires et le retour sur investissement (ROI). Grâce à l’IA, les petites entreprises peuvent accéder à plusieurs canaux de vente internationaux sans personnel important. L’IA permet aussi de prévoir les coûts d’expédition et de choisir le mode de transport le plus adapté, de l’aérien au maritime, afin de maximiser les profits et de réduire le temps de gestion.
L’objectif final reste d’aider les petites entreprises à fonctionner efficacement, à réduire leurs coûts, à se concentrer sur le développement produit et à s’étendre sur les marchés internationaux, posant ainsi les bases d’un commerce électronique transfrontalier durable.
Le marché mondial du commerce électronique transfrontalier a atteint 791,5 milliards de dollars à la fin de l’année 2024, avec une croissance prévue de plus de 30 % dans les années à venir.
Le ministère vietnamien de l’Industrie et du Commerce a relevé ses prévisions pour le commerce électronique B2C en 2025 à 25,5 %, estimant la valeur totale des transactions entre 26 et 28 milliards de dollars, et visant 50 milliards de dollars à l’horizon 2030.