Le Vietnam pourrait devenir un pays à revenu élevé avant 2045

Le professeur Tran Van Tho de l’université Waseda (Japon) a récemment présenté trois scénarios pour le développement économique du Vietnam dans les années à venir. « Selon mes calculs, quel que soit le scénario, réalisable ou difficile à mettre en œuvre, le Vietnam deviendrait un pays à revenu élevé avant 2045 », a-t-il affirmé.

Un coin de Hô-Chi-Minh-Ville vu depuis la rivière de Saïgon. Photo : VNA
Un coin de Hô-Chi-Minh-Ville vu depuis la rivière de Saïgon. Photo : VNA

Trois trajectoires possibles

Le professeur Tran Van Tho a élaboré trois scénarios pour l’économie vietnamienne à venir.

Dans le scénario 1, plus difficile à réaliser, la croissance du PIB serait en moyenne de 10 % par an entre 2026 et 2035, puis de 7 % entre 2036 et 2050, tandis que la population augmenterait respectivement de 0,5 % et 0,2 %. Le Vietnam atteindrait alors le statut de pays à revenu élevé dès 2039.

Le scénario 2, jugé plus réaliste, prévoit une croissance moyenne de 7,5 % par an sur la période 2026 – 2030, puis de 10 % entre 2031 et 2040. Le pays franchirait le seuil du revenu élevé également en 2039.

Le scénario 3, le plus probable selon l’expert, écarte toute phase de croissance à deux chiffres. Avec un PIB en hausse de 8,5 % par an entre 2026 et 2035, puis de 5,5 % jusqu’en 2045, le Vietnam atteindrait le revenu élevé en 2044.

Ainsi, à l’instar du Japon (1969), de la République de Corée (1995) et probablement de la Chine d’ici 2027, le Vietnam devrait rejoindre le club des pays à revenu élevé avant 2045.

Le professeur Tran Van Tho, de l’université Waseda (Japon).
Le professeur Tran Van Tho, de l’université Waseda (Japon).

L’écueil du « piège du revenu intermédiaire »

Le Vietnam est devenu un pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure depuis 2009. Beaucoup de pays restent piégés à ce niveau en raison d’une faible croissance de la productivité du travail.

Le professeur Tran Van Tho a insisté sur la difficulté de franchir les étapes successives : de revenu intermédiaire faible à revenu intermédiaire supérieur, puis à revenu élevé. Si le Vietnam veut sortir du piège du revenu intermédiaire, il doit accroître sa productivité du travail.

Au cours des 35 dernières années, le Vietnam a connu une croissance économique moyenne de 6,5 % par an, avec une augmentation du revenu par habitant de 5 % par an. C'est une performance remarquable, mais moins impressionnante que celle du Japon, de la République de Corée et de la Chine. La principale raison est que le taux de croissance de la productivité du travail au Vietnam reste encore faible.

Au Vietnam, la productivité du travail a progressé en moyenne de 5,29 % par an entre 2011 et 2020, avec une amélioration à 5,8 % sur la période 2016 – 2020, au-dessus de l’objectif fixé. Pourtant, elle reste inférieure à celle des grandes économies asiatiques à leur époque de décollage.

Parmi les causes figurent la prédominance du secteur informel (64 % de la main-d’œuvre), une industrie centrée sur l’assemblage et la sous-traitance à faible valeur ajoutée, ou encore une économie privée fragmentée, composée surtout de très petites entreprises et d’entreprises familiales.

Pour y remédier, le pays mise sur plusieurs résolutions stratégiques, dont la résolution 50-NQ/TW de 2019 sur l’attraction d’investissements étrangers de qualité, notamment dans les domaines de la haute technologie et du développement durable. Et plus récemment, la résolution 68-NQ/TW du Bureau politique sur le développement du secteur privé fixe pour objectif d’augmenter la productivité du travail de 8,5 à 9,5 % par an d’ici 2030.

Le Vietnam vise à devenir un pays à revenu élevé d'ici 2045. Pour y parvenir, son PIB par habitant doit croître en moyenne de plus de 10 % au cours des deux prochaines décennies. Il s'agit d'une feuille de route complète pour le développement : économie verte, développement inclusif, transformation numérique et réduction des émissions de carbone.

Les engagements internationaux illustrent clairement cette détermination : réduire les émissions de méthane de 30%, mettre fin à la déforestation d'ici 2030 et atteindre la neutralité carbone d'ici 2050.

Selon le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), l'Indice de développement humain (IDH) du Vietnam a atteint 0,766 en 2023, le maintenant dans la catégorie des pays à développement humain élevé, avec des points positifs pour la réduction des inégalités et les progrès en matière d'égalité des sexes.

Cependant, de nombreux défis restent à relever. Le vieillissement rapide de la population, la volatilité du commerce mondial, l'automatisation et le changement climatique sont autant de pressions actuelles.

D’autres objectifs ambitieux

Atteindre le statut de pays à revenu élevé n’est qu’un des objectifs que vise le Vietnam. Le pays doit aussi relever un défi démographique : le vieillissement.

Les personnes âgées de plus de 65 ans représentent déjà 10 % de la population et devraient atteindre 15 % en 2039 – un niveau plus élevé que celui du Japon au moment où ce dernier est devenu un pays à revenu élevé.

La croissance économique devra donc être rapide, soutenue et de qualité, en harmonie avec l’environnement et le progrès social. Le Vietnam s’emploie à encourager l’économie circulaire, à promouvoir les technologies vertes et à veiller à ce que la croissance profite réellement au bien-être de la population.

Contrairement à certaines trajectoires de développement où la croissance creuse les inégalités, le Vietnam affirme vouloir progresser « sans laisser personne derrière ». Cette orientation se traduit par des politiques sociales ambitieuses.

Dans le domaine de l’éducation, la résolution 71-NQ/TW récemment promulgué par le Bureau politique érige l’éducation en priorité nationale. Elle fixe l'objectif pour le Vietnam de se doter d'un système éducatif national moderne, équitable et de qualité, figurant parmi les 20 premiers pays du monde d'ici 2045 en matière de qualité éducative.

D'ici 2030, l'ensemble du pays aura achevé l'éducation préscolaire universelle pour les enfants de 3 à 5 ans et la scolarité obligatoire jusqu'au secondaire. Au moins 85 % de la population dans ce groupe d'âge aura terminé ses études au lycée ou l’équivalent, ce qui lui permettra d'améliorer ses compétences technologiques, en intelligence artificielle et sa maîtrise de l'anglais.

Plus important encore, dès l’année scolaire 2025 – 2026, plus de 23,2 millions d’élèves de la maternelle au lycée seront exonérés ou soutenus en frais de scolarité.

Dans le domaine de la santé, la résolution 72-NQ/TW du Bureau politique sur certaines solutions de percée pour renforcer la protection, le soin et l’amélioration de la santé publique prévoit des soins accessibles et de qualité en faveur de la population.

À partir de 2026, chaque citoyen bénéficiera d’un examen de santé gratuit au moins une fois par an. D’ici 2030, les frais d’hospitalisation de base seront couverts intégralement par l’assurance maladie.

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