Résolution 68 : un levier pour le secteur privé

La Résolution 68 est perçue comme un « coup d’accélérateur » institutionnel visant à orienter l’économie privée vers un développement global.
La Résolution 68 est perçue comme un levier pour le secteur privé. Photo : VGP.
La Résolution 68 est perçue comme un levier pour le secteur privé. Photo : VGP.

Près de 40 ans après le lancement du Renouveau, le Vietnam entre dans une nouvelle phase de développement avec l’aspiration à devenir un pays à revenu élevé d’ici 2045.

Ce parcours ne saurait se passer du rôle pionnier du secteur privé.

Dans cette dynamique, la Résolution 68-NQ/TW du Bureau Politique du Parti communiste du Vietnam (PCV) sur le développement de l'économie privée est perçue comme un « coup d’accélérateur » institutionnel visant à orienter l’économie privée vers un développement global.

Sous l’impulsion du secrétaire général du PCV To Lam et dans la perspective de réforme institutionnelle incarnée par la Résolution 68, l’économie privée vietnamienne se trouve aujourd’hui face à une opportunité de se développer de manière complète, durable, équitable et intégrée.

De secteur d’appoint à pilier : une évolution majeure dans la pensée politique

Dans son dernier article sur le développement de l’économie privée, le secrétaire général du Parti communiste du Vietnam (PCV) To Lam souligne : il faut considérer la promotion du secteur privé comme une priorité essentielle.

Il ne s’agit pas seulement d’une orientation, mais d’un changement profond dans la pensée économique – passant de la valorisation des groupes économiques étatiques à la reconnaissance équitable, transparente et équilibrée de toutes les composantes économiques.

Selon le secrétaire général, le secteur privé contribue actuellement à hauteur d’environ 51 % au PIB, de plus de 30 % aux recettes budgétaires nationales et génère plus de 40 millions d’emplois, soit plus de 82 % de la main-d’œuvre totale du pays. Plus encore, il constitue le principal moteur de l’innovation, de la productivité et de la compétitivité nationale.

« Il ne peut y avoir de prospérité économique sans un secteur privé dynamique, maître de la technologie et intégré profondément dans les chaînes de valeur mondiales », affirme-t-il.

La Résolution 68 ouvre une époque où les entreprises privées sont placées au cœur de la stratégie de développement national. Photo d'illustration/baodautu.
La Résolution 68 ouvre une époque où les entreprises privées sont placées au cœur de la stratégie de développement national. Photo d'illustration/baodautu.

Sur cette base idéologique, la Résolution 68 du Bureau Politique est attendue comme un puissant levier institutionnel pour le secteur privé.

Lors du colloque « Nouvelle ère – Ère du redressement pour la prospérité de la nation » récemment organisé par l’Association des petites et moyennes entreprises de Hanoi, M. Phan Duc Hieu, membre permanent de la Commission économique de l’Assemblée nationale, a qualifié cette Résolution de « troisième jalon » dans l’évolution des entreprises privées.

«Après la période de reconnaissance du secteur privé (1988–1990) et celle d’autonomisation (1999–2000), la Résolution 68 ouvre une époque où les entreprises privées sont placées au cœur de la stratégie de développement national », explique M. Phan Duc Hieu.

Selon lui, l’essence de la Résolution ne réside pas seulement dans la levée des obstacles, mais aussi dans la consolidation de la confiance, permettant aux entreprises d’investir sur le long terme. « Nous passons d’un modèle de gestion fondé sur les autorisations discrétionnaires à une approche de responsabilisation et de protection globale », affirme-t-il.

Il insiste notamment sur l’engagement à « ne pas criminaliser les relations économiques » et à « ne pas appliquer rétroactivement des règles au détriment des entreprises », un sujet longtemps source d’inquiétude lors des inspections et contrôles passés.

Des verrous à faire sauter de manière décisive

Bien que le rôle des entreprises privées soit de plus en plus affirmé, ce secteur reste confronté à de nombreux obstacles institutionnels.

Le secrétaire général du PCV To Lam a souligné : « Les entreprises privées sont encore petites, fragmentées, faiblement capitalisées, manquent de capacités de gestion, peinent à s’intégrer dans les chaînes de valeur et innovent peu ».

Un frein majeur reste l’accès aux ressources. D’après M. Phan Duc Hieu, les entreprises privées ont beaucoup de difficultés à accéder à trois types de ressources clés : foncier, capital et main-d’œuvre qualifiée. Parallèlement, les entreprises publiques détiennent encore l’essentiel des ressources foncières.

Il argumente en disant : « De nombreuses petites et moyennes entreprises pourraient créer des centaines d’emplois si elles disposaient simplement d’un site de production stable.

Or, les procédures d’approbation, d’évaluation et d’allocation des terrains sont longues et complexes, parfois de plusieurs mois, voire plusieurs années ».

Il plaide ainsi pour une plus grande transparence du foncier et une simplification des démarches afin de réduire les coûts et risques pour les investisseurs privés.

Une autre recommandation forte : diversifier les sources de financement, en dépassant la dépendance au crédit bancaire.

« Les entreprises privées doivent pouvoir accéder à des instruments tels que les obligations d’entreprise, les fonds de capital-risque ou le financement participatif. Le marché des capitaux doit devenir un levier parallèle au marché du crédit », affirme-t-il.

Dans son article, le secrétaire général appelle également à « libérer au maximum les ressources de développement pour le secteur privé ». Cela implique la mise en place d’un écosystème financier multi-niveaux pour faciliter un accès plus aisé et sécurisé au capital.

Par ailleurs, la réforme administrative, la lutte contre les abus de pouvoir et la réduction des coûts informels sont autant de leviers indispensables à la progression du secteur privé.

« Une administration au service des entreprises – au service du pays » est le mot d’ordre transversal des solutions proposées par la Résolution 68.

Photo d'illustration/NDEL.

Photo d'illustration/NDEL.

Selon M. Hieu, une autre réforme clé de la pensée politique réside dans « la distinction claire entre l’entreprise et la personne de son dirigeant ».

Il explique : « L’entreprise est une entité juridique indépendante. Les violations de la loi par une personne physique ne doivent pas paralyser l’ensemble de l’entreprise ».

Il souligne ainsi l’importance de la réforme judiciaire dans le domaine commercial, visant à raccourcir les délais de règlement des litiges et à renforcer l’efficacité des tribunaux et centres d’arbitrage économiques.

Plus qu’une croissance – un développement responsable

La Résolution 68 ne se limite pas à promouvoir la croissance, mais exige que le secteur privé se développe sur des bases durables, éthiques et socialement responsables.

« Une entreprise ne peut se développer durablement si elle n’est pas enracinée dans sa communauté et si elle ne partage pas de valeurs avec ses employés et la société », affirme M. Phan Duc Hieu.

Le secrétaire général du PCV souligne également dans son article : « L’économie privée doit assumer sa responsabilité sociétale, non seulement par des contributions financières, mais aussi à travers des politiques humanistes, une gouvernance transparente et une culture d’entreprise fondée sur l’éthique ».

Le secteur privé vietnamien entre dans un nouveau chapitre – où l’entrepreneur n’est plus seulement un acteur économique, mais un co-créateur de l’avenir national.

Le secrétaire général du PCV To Lam fixe l’objectif qu’en 2030, l’économie privée contribue à hauteur de 70 % au PIB, avec de nombreuses entreprises privées maîtrisant les technologies, compétitives à l’échelle mondiale et devenant des conglomérats régionaux.

« Nous vivons un moment historique ; si nous n’agissons pas maintenant, nous manquerons l’occasion de faire du secteur privé un véritable pilier de l’économie », déclare M. Hieu.

Il souligne que le discours du secrétaire général et l’esprit de réforme institutionnelle de la Résolution 68 sont « la clé » qui ouvre la porte du développement aux entreprises privées. Mais ce sont elles qui doivent franchir cette porte – avec courage, innovation et un sens aigu des responsabilités envers la société.

« Chaque entreprise est une cellule. Si chaque cellule est en bonne santé, l’ensemble du corps sera robuste. Il est temps que l’économie privée devienne l’un des éléments vitaux d’un Vietnam puissant, autonome et prospère à l’ère nouvelle », affirme M. Phan Duc Hieu.