La communauté vietnamienne à l'étranger et l’aspiration à affirmer le Vietnam : bâtir des passerelles littéraires

Les œuvres bilingues telles que Nhịp điệu Việt (Le rythme du Vietnam), Lục bát nếp thời gian (Les vers du temps) et plusieurs recueils de poésie de la poétesse et traductrice Vo Thi Nhu Mai, établie à Perth (Australie), se rapprochent de plus en plus du public international.

Par un travail patient et persévérant, Vo Thi Nhu Mai, comme de nombreux écrivains Viet Kieu, contribue à enrichir l’image du Vietnam sur la carte littéraire mondiale.

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Vo Thi Nhu Mai au Festival de littérature en Indonésie. Photo fournie par l'intéressée.

Selon Vo Thi Nhu Mai, les artistes de la diaspora vietnamienne constituent une passerelle culturelle reliant le Vietnam au monde à travers l’art et la créativité. Ils diffusent les valeurs culturelles vietnamiennes auprès des sociétés d’accueil, renforcent la solidarité des Vietnamiens à l’étranger et éveillent la fierté nationale chez les jeunes générations. Grâce à leur connaissance des langues et des coutumes des deux cultures, ils créent un lien émotionnel entre les générations, entre la communauté nationale et les Vietnamiens résidant à l’étranger.

Au-delà de la création, nombre d’entre eux ouvrent des espaces culturels à travers la traduction, la performance et l’exposition artistique, rapprochant davantage l’image du Vietnam des amis internationaux. Leur rôle dépasse la sphère artistique : ils portent aussi la mission d’inspirer, de préserver et de renouveler les valeurs culturelles vietnamiennes dans le mouvement d’intégration mondiale.

De nombreux exemples marquants illustrent cette contribution. En Europe, l’écrivaine Quynh Iris Nguyen – de Prelle organise des festivals culturels, des lectures poétiques et promeut la langue vietnamienne au sein des communautés locales.

Au Canada, le roman Thuyền (Le Bateau) (2025) de Nguyen Duc Tung a suscité un vif écho en explorant avec profondeur la tragédie des réfugiés vietnamiens par bateau. En Allemagne, le poète Truong Anh Tu, avec son recueil Trắng mây tóc mẹ (Les cheveux blancs de la mère comme des nuages) (Éditions Kim Dong), insuffle un souffle nouveau à la poésie pour enfants. Quant à l’auteure Kieu Bich Huong en Belgique, elle construit un pont culturel Vietnam–Europe à travers la série de bandes dessinées Mật hiệu OGO (Code OGO), qui transmet l’amour de la langue vietnamienne et la fierté des origines.

En juin dernier, le Mouvement mondial de la poésie (WPM) a organisé le programme Chant d’amour pour Gaza, auquel ont participé les poètes Huu Viet, Nguyen Quang Thieu et Vo Thi Nhu Mai. Cette dernière a assuré le montage vidéo du programme, notamment pour la chanson Let’s Sing for Love (poème de Truong Anh Tu, paroles anglaises de Vo Thi Nhu Mai, musique de Cung Minh Huan, interprétée par Tuyet Mai), affirmant ainsi la présence de la poésie vietnamienne dans l’espace poétique international.

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Née en 1976 à Lam Dong (Hauts Plateaux du Centre du Vietnam), Vo Thi Nhu Mai est connue pour ses recueils Tản mạn (Rêveries) (2010), Bên kia tít tắp đại dương (Au-delà de l’océan lointain) (2011) et Vườn cổ tích (Le jardin des contes de fées) (2015).

Depuis 2004, en parallèle à son activité d’enseignante en Australie-Occidentale, elle traduit avec constance la poésie vietnamienne en anglais pour rapprocher la littérature vietnamienne du lectorat mondial. Elle est actuellement éditrice invitée d’une anthologie de poésie internationale publiée par l’organisation indienne ISISAR, réunissant des poètes contemporains du Vietnam et de l’Inde. L’ouvrage, prévu en édition bilingue anglais–bengali, vise à élargir l’influence et à renforcer les échanges culturels entre les deux pays.

Selon elle, pour promouvoir la littérature vietnamienne de manière efficace et durable, il faut « viser la compréhension plutôt que la recherche de l’élégance » dans la traduction, c’est-à-dire privilégier la clarté et la fidélité du sens plutôt que l’ornement stylistique. Le choix des œuvres à présenter doit aussi correspondre aux valeurs culturelles, aux goûts et aux tendances internationales.

Vo Thi Nhu Mai compare la promotion de la littérature à « l’appui sur le bouton d’un cuiseur de riz électrique » – il faut un mécanisme rapide et pratique, tout en préservant l’essence de chaque grain de riz, c’est-à-dire l’âme de la culture vietnamienne. Pour que la littérature vietnamienne rayonne à l’international, il faut une stratégie cohérente : former des traducteurs professionnels, participer aux foires du livre, organiser des échanges culturels et utiliser les technologies modernes – édition numérique, réseaux sociaux – afin d’optimiser les coûts et d’élargir l’accès des lecteurs du monde entier.

En parallèle, l’élargissement de la coopération avec les maisons d’édition, les institutions culturelles internationales et la communauté vietnamienne à l’étranger constitue un levier essentiel pour bâtir un réseau durable, encourager les projets bilingues et préserver l’identité ainsi que les valeurs fondamentales de la littérature vietnamienne dans le processus d’intégration mondiale.

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