Le site pénitentiaire de Phu Quôc se situe dans le hameau de Cây Dua. Il s’agit d’une prison construite par les Français à l’époque des colonies pour garder en détention les indépendantistes vietnamiens. En 1967, le régime de Saigon l’a remise en état sur une superficie de 400 hectares afin d’enfermer les prisonniers de guerre communistes. Il s’agissait de la plus grande prison du Sud du Vietnam où étaient détenus entre 32.000 et 40.000 prisonniers.
Cette prison se composait de 12 secteurs numérotés de 1 à 12 et était protégée par trois bataillons de gendarmerie. Chaque secteur pouvait détenir jusqu’à 3.000 prisonniers et était isolé par une douzaine de clôtures barbelées. Un système d’éclairage puissant améliorait la surveillance des détenus. En plus des geôliers, la prison pouvait parfois accueillir quatre bataillons de soldats armés jusqu’aux dents. Selon Vo Thi Thu Hà, employée de ce site historique, entre juillet 1967 et janvier 1973, plus de 4.000 personnes sont mortes dans les cellules de la prison de Phu Quôc et des milliers d’autres handicapées à vie. Elle confie:
«Les visiteurs étrangers sont indignés par les formes de torture pratiquées parfois par leurs compatriotes dans la prison de Phu Quôc. Plusieurs ont pleuré et ont brûlé des bâtonnets d’encens en mémoire des victimes. Ils n’ont jamais imaginé que leurs compatriotes pouvaient avoir commis de tels actes barbares.»
Les prisonniers de guerre à Phu Quôc ont subi des sévices corporels cruels. Un certain Vasseul, touriste français, raconte:
«Des camps comme ça, il y en a à peu près dans tous les pays, pendant les guerres. Les tortures, il y en a eu, certainement. Mais bon, on n’était pas présent pour savoir. C’était toujours les mêmes systèmes, enfermés nombreux dans les bagnes. Les prisonniers politiques, les prisonniers de droit commun, ce n’est pas pareil non plus, les prisonniers politiques étaient moins respectés que les “droit commun”. Ces cages sont faites pour les casser moralement et leur enlever toute personnalité. Tout le monde vit ensemble. Si je peux dire qu’il y a un seul point qui pourrait être positif, c’est que les gens apprennent à vivre en communauté, à s’entraider. C’est le seul point positif qu’il y a là-dedans.»
La torture la plus cruelle est un type de cellule appelé “la cage de tigre”, faite de fils barbelés. Une fois à l’intérieur, le prisonnier se retrouve dans l’incapacité de s’asseoir, de se lever ou de se coucher. Presque tout mouvement est sanctionné d’un contact avec les fils barbelés qui éraflent et font saigner le prisonnier. En période de fortes chaleurs, des fours à charbon étaient disposés à côté des cages par les geôliers. En hiver, les détenus étaient aspergés d’eau froide. Les tortures se poursuivaient la nuit. Lors des fouilles pour retrouver les ossements des victimes, les employés ont découvert des cadavres avec des clous de 10cm plantés dans les os, les genoux ou le crâne. Ces ossements sont préservés et exposés au sein de la prison. Khanh Ngoc, une touriste de Hanoï, déclare:
«Nous, les jeunes, nous ne croyions pas qu’il puisse exister des actes de torture aussi atroces et cruels. Plusieurs membres de notre groupe ont pleuré et ont admiré l’indomptabilité de nos aïeux avant de réaliser que leurs douleurs et leurs sacrifices passés ont conduit à l’indépendance et la liberté du peuple d’aujourd’hui.»
Les vestiges de la prison de Phu Quôc accueillent des dizaines de milliers de touristes par an. Parmi eux, nombre d’anciens prisonniers retournent dans leur ancien lieu de détention. Pendant la guerre, la prison représentait le berceau de l’insurrection. Elle est devenue aujourd’hui un lieu de recueil témoignant de la vaillance, de la fidélité, de l’indomptabilité et des sacrifices des générations précédentes pour l’indépendance et la réunification nationale.