Bien que la crevette reste le produit phare avec une croissance significative, les exportations vers les États-Unis rencontrent des difficultés en raison des mesures tarifaires de rétorsion.
Les entreprises doivent adapter leur stratégie afin d’optimiser les opportunités du marché avant d’éventuelles modifications de ces politiques douanières.
Une croissance enregistrée pour de nombreux produits aquatiques
Selon le rapport de l’Association vietnamienne de transformation et d’exportation des produits aquatiques (VASEP), les exportations de produits aquatiques ont connu une reprise marquée durant les quatre premiers mois de 2025, atteignant un chiffre d’affaires de 3,3 milliards de dollars, en hausse de 21 % par rapport à la même période en 2024.
Pour le seul mois d’avril, le chiffre d’affaires s’est établi à 850,5 millions de dollars, soit une augmentation de 10 %. Cependant, cette reprise reste inégale selon les produits et les marchés, dans un contexte d’instabilité lié aux politiques tarifaires de rétorsion des États-Unis.
La crevette demeure le produit de premier plan, avec un chiffre d’affaires de 1,27 milliard de dollars sur quatre mois, soit une progression de 30 % par rapport à l’an passé.
En avril, les exportations de crevettes ont atteint 330,8 millions de dollars, en hausse de 15 %.
Cette croissance est soutenue par une forte demande sur les grands marchés tels que la Chine, l’Union européenne et le Japon, ainsi que par la reprise progressive des prix de la crevette grâce à un rééquilibrage mondial de l’offre et de la demande.
Le pangasius, avec 632,7 millions de dollars (hausse de 9 %), conserve une position importante, mais sa croissance ralentit, notamment en avril où le chiffre d’affaires reste stable à 167,7 millions de dollars.
Le thon a connu un recul en avril (76,1 millions de dollars, -12 %), bien que le cumul sur quatre mois reste légèrement en hausse de 1 % (304,2 millions de dollars).
Le manque de matières premières, notamment à cause de la réglementation sur la taille minimale du thon listao, limite la production et les exportations.
À l’inverse, des produits comme le tilapia et le poisson rouge (poisson d’eau douce) enregistrent une croissance fulgurante (+138 %, soit 19 millions de dollars), bien que leur part reste marginale.
Les mollusques (céphalopodes et bivalves) et les crabes ont également progressé de manière impressionnante, atteignant respectivement 216,4 millions de dollars (+18 %), 83,1 millions de dollars (+82 %) et 112,1 millions de dollars (+50 %), portés par la forte demande en provenance de la Chine et de l’ASEAN.
Baisse des exportations vers les États-Unis en avril en raison des tensions douanières
Selon la VASEP, la Chine est le premier marché avec 709,8 millions de dollars exportés en quatre mois, soit une progression de 56 %. Pour avril, ce marché a absorbé 182,3 millions de dollars (+29 %), principalement pour des produits tels que les crevettes, crabes et mollusques destinés au segment haut de gamme.
Le Japon arrive en deuxième position avec 536,6 millions de dollars (+22 %), grâce à une croissance stable tirée par les produits à forte valeur ajoutée.
L’UE et la Corée du Sud montrent également un fort potentiel avec respectivement 351,5 millions de dollars (+17 %) et 264,1 millions de dollars (+15 %), notamment grâce aux avantages tarifaires issus de l’EVFTA.
En revanche, les exportations vers les États-Unis n’ont atteint que 498,4 millions de dollars (+7 %), avec une baisse marquée de 15 % en avril (120,5 millions de dollars).
Ce recul reflète l’impact des politiques douanières de rétorsion actuellement en vigueur aux États-Unis, qui perturbent considérablement les activités d’exportation.
L’ASEAN se démarque positivement avec 218,8 millions de dollars (+25 %), tandis que le Moyen-Orient accuse un repli de 8 %, en raison d’une demande atone.
Les mesures tarifaires américaines, avec des droits antidumping pouvant aller jusqu’à 46 % sur certains produits, exercent une pression importante sur les exportations vietnamiennes de produits aquatiques.
Des produits tels que le pangasius et la crevette, fortement dépendants du marché américain, en subissent les conséquences.
Ces tarifs augmentent les coûts de revient, poussant les importateurs américains à se tourner vers d’autres fournisseurs comme l’Inde ou l’Équateur.
Les barrières techniques, telles que les exigences strictes en matière de sécurité sanitaire et de traçabilité, réduisent également l’avantage concurrentiel du Vietnam.
Cependant, l’accord de partenariat transpacifique global et progressiste (CPTPP) ainsi que d’autres accords de libre-échange (ALE) permettent au Vietnam d’atténuer ces impacts négatifs en diversifiant ses marchés vers l’UE, le Japon et l’ASEAN.
Les entreprises vietnamiennes ajustent également leurs stratégies, en misant sur des produits à haute valeur ajoutée et en diversifiant leurs débouchés afin de réduire leur dépendance au marché américain.
Anticipation d’un redéploiement des exportations avant le durcissement tarifaire prévu au 9 juillet 2025
La VASEP prévoit un redéploiement significatif des exportations vietnamiennes de produits aquatiques en mai et juin 2025, avant l’entrée en vigueur des nouvelles politiques tarifaires américaines à partir du 9 juillet.
Les entreprises vietnamiennes vont concentrer leurs efforts sur les exportations vers les États-Unis, en particulier pour les produits phares comme la crevette et le pangasius, afin de maximiser les opportunités avant la hausse des coûts liée aux nouveaux tarifs.
On s’attend à une augmentation de 10 à 15 % des exportations vers ce marché par rapport à avril 2025, grâce à la signature accélérée de contrats et à des stratégies de réduction de prix pour préserver les parts de marché.
En revanche, les exportations vers d’autres marchés comme la Chine et l’ASEAN pourraient connaître un ralentissement, avec une croissance estimée entre 3 et 5 %. Cela s’explique par la concurrence croissante des produits aquatiques chinois, frappés par des taxes élevées aux États-Unis et redirigés vers le marché intérieur ainsi que vers les marchés voisins comme l’ASEAN.
Cette concurrence accrue pourrait nuire à l’attrait des produits vietnamiens, notamment sur le segment à bas prix.
L’UE et le Japon devraient maintenir une croissance stable (environ 8 à 10 %), bénéficiant toujours des accords de libre-échange, mais cela ne suffira probablement pas à compenser le ralentissement observé en Chine et en ASEAN.