Le kut, à l’inverse du chant festif Eirei, se présente comme un chant‑conteur, souvent improvisé, utilisé dans les moments de deuil, de célébration ou simplement d’introspection. Accompagné parfois par le dinh buot — ou joué a cappella — ce chant mêle images poétiques et métaphores liées à la nature, à la mémoire collective, à l’amour ou à l’identité.
Face aux pressions de la modernité, le chant kut est fragilisé. Selon certains artisans et responsables culturels, les porteurs de tradition sont vieillissants, et les jeunes, souvent éloignés des pratiques musicales traditionnelles, peinent à apprendre. Les tentatives de transmission via des ateliers scolaires ou des classes communautaires témoignent de la volonté de sauvegarder cet héritage, mais le chemin reste long.
Malgré ces défis, certains continuent de croire en la résilience du patrimoine. À Dak Lak, plus de 300 artistes — anciens et jeunes — sont encore capables de chanter, témoignant de la vitalité persistante de la tradition. Les initiatives locales cherchent à encourager le chant kut, à documenter les paroles, à enregistrer des voix pour que ce trésor culturel soit transmis aux générations futures.
Pour de nombreux E De, le kut n’est pas seulement une mélodie, mais un lien vivant avec leurs ancêtres, leur langue et leur identité. Revaloriser ce chant, c’est offrir à la communauté l’espoir de rester enracinée tout en s’adaptant à un monde en mutation — une promesse de transmission, de mémoire et de fierté.