Son souhait : créer un espace commun où toutes les femmes, quelles que soient leur profession ou leur situation, puissent s’exprimer avec confiance et révéler leur propre beauté.
- Commencer à bâtir un mouvement n’est jamais facile. Qu’est-ce qui vous a poussée à persévérer dans le travail communautaire pendant si longtemps ?
Au début des années 2000, lorsque les femmes vietnamiennes installées en République tchèque ont ressenti le besoin de se rassembler et d’échanger, plusieurs clubs féminins ont vu le jour. Ces initiatives ont constitué la base de la création, en 2009, de l’Association des femmes vietnamiennes en République tchèque.
J’ai fait partie du groupe de fondatrices. À cette époque, le responsable communautaire de l’ambassade du Vietnam m’a encouragée à assumer un rôle au sein de la structure. En tant que membre du Parti, je me suis sentie investie d’une responsabilité particulière dans le développement du mouvement féminin.
En tant qu’organisation volontaire, notre association ne peut attirer les adhérentes qu’à travers des activités réellement utiles et fédératrices. Le plus grand défi est de parvenir à un consensus entre les membres et à une coopération efficace avec les autres associations de la communauté.
On dit souvent : « Créer une association est facile, la faire vivre durablement l’est beaucoup moins. » C’est justement ce défi qui m’a poussée à persévérer avec passion.
Je suis convaincue qu’avec du cœur et de la patience, on peut toucher le cœur des gens. Le plus important est d’organiser des activités concrètes et porteuses de sens, qui apportent joie et confiance aux femmes tout en renforçant la solidarité et l’entraide.
- Comment évaluez-vous les changements dans le rôle et la position des femmes vietnamiennes en Europe au cours des vingt dernières années ?
Ces dernières années, les femmes vietnamiennes en Europe ont affirmé leur place au sein des communautés. Les associations féminines se sont développées et sont devenues des acteurs essentiels de la vie communautaire.
De nombreuses femmes occupent désormais des postes clés. Par exemple, au sein du comité exécutif de la Fédération des Vietnamiens en République tchèque, près de 30 % des membres sont des femmes.
Leur influence dépasse aujourd’hui les frontières communautaires : certaines participent à des forums internationaux, tels que le Sommet mondial des femmes, contribuant ainsi à renforcer l’image et le prestige du Vietnam dans les sociétés européennes.
Les première et deuxième éditions du Forum des femmes vietnamiennes en Europe, organisées dans la salle du Sénat hongrois, avec la participation de la première vice-présidente du Parlement de Hongrie, témoignent de cette reconnaissance croissante.
Les femmes vietnamiennes jouent également un rôle marquant dans les échanges culturels : défilés d’áo dài (tunique traditionnelle vietnamienne), spectacles de musique traditionnelle, expositions culinaires, autant d’activités qui permettent au public européen de mieux connaître la culture vietnamienne.

En République tchèque et en Slovaquie, où la communauté vietnamienne est reconnue comme minorité ethnique, les femmes assument des responsabilités importantes dans les événements multiculturels. Nombre d’entre elles se distinguent aussi dans les domaines scientifique, artistique, économique ou social, certaines s’impliquant même dans la vie politique locale, affirmant ainsi la compétence et l’intelligence des femmes vietnamiennes en Europe.
- Selon vous, quels sont les facteurs qui permettent à ces associations féminines de maintenir une cohésion durable dans une communauté aussi diverse ?
Pour préserver la cohésion, il faut une équipe dirigeante engagée, compétente et capable de relier les gens. La stabilité économique et familiale est également une base solide pour un engagement durable.
Un autre facteur essentiel réside dans la pertinence et l’attractivité des programmes : ils doivent être concrets, vivants et adaptés aux besoins de chaque période.
Un exemple marquant est le programme « Couleurs du Vietnam », organisé le 21 septembre par l’Association des femmes vietnamiennes en République tchèque, à l’occasion du 80ᵉ anniversaire de la Fête nationale du Vietnam et du 75ᵉ anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques Vietnam–Tchéquie. L’événement, rassemblant près de 400 participantes et honoré par la présence de la vice-présidente de l’Assemblée nationale vietnamienne, Nguyen Thi Thanh, a connu un grand succès. Sa réussite repose sur la capacité du comité d’organisation à éveiller la passion et le talent artistique des femmes, leur donnant ainsi l’occasion de briller ensemble.
De même, le concours d’écriture de prose et de poésie sur les femmes vietnamiennes à l’étranger, lancé par le Forum des femmes vietnamiennes en Europe, a reçu près de 200 contributions de 144 auteurs issus de 19 pays, preuve du rayonnement d’une idée créative qui touche la sensibilité et la fierté des femmes vietnamiennes du monde entier.
- Quelle est, selon vous, l’importance du lien entre les associations féminines vietnamiennes de différents pays aujourd’hui ?
Le mouvement féminin vietnamien en Europe s’est fortement développé ces dernières années, ouvrant la voie à des activités transnationales.
Des structures régionales se sont constituées, telles que le Forum des femmes vietnamiennes en Europe, l’Union des associations féminines vietnamiennes en Europe, ou encore le Club du patrimoine de l’áo dài vietnamien en Europe, qui relient les femmes de plusieurs pays à travers des échanges et projets variés.
Ces connexions favorisent non seulement le partage d’expériences et la coopération, mais elles contribuent aussi à construire un véritable réseau féminin vietnamien européen, uni, influent et de plus en plus reconnu,, tout en ouvrant des perspectives d’entraide et de collaboration professionnelle et personnelle.
- Comment conciliez-vous la vie d’intégration à l’étranger avec la préservation des valeurs vietnamiennes au sein de votre famille ?
Vivante à l’étranger depuis plusieurs décennies, je sais combien préserver la culture vietnamienne demande des efforts constants, surtout pour la transmettre aux jeunes générations. C’est pourquoi ma famille s’efforce de maintenir les traditions vietnamiennes afin que nos enfants comprennent et respectent leurs origines.
Nous multiplions aussi les activités culturelles pour préserver l’identité vietnamienne, tout en encourageant les femmes à s’ouvrir et à s’intégrer dans la société locale.
En octobre, à l’occasion de la Journée des femmes vietnamiennes (20 octobre), le Forum des femmes vietnamiennes en Europe lance le Mois culturel de l’áo dài vietnamien en Europe, sur le thème « Intégration et rayonnement ».
Cette année, le programme s’élargit : au-delà des défilés traditionnels, il comprend des activités créatives liées à la vie locale. Un geste original consiste à offrir des áo dài à des personnalités influentes du pays d’accueil, une manière élégante et efficace de promouvoir la culture vietnamienne.
Cette initiative illustre la volonté d’intégration active des femmes vietnamiennes en Europe tout en affirmant leur attachement à l’identité nationale dans un environnement international.
Par ailleurs, il est essentiel de développer des programmes destinés aux jeunes générations. J’ai moi-même initié et organisé depuis plus de dix ans le camp d’été « Việt » pour les enfants vietnamiens de la région de Brno, en Moravie du Sud.
Pendant une semaine, les enfants vivent en vietnamien, découvrent la culture de leurs ancêtres et ressentent l’amour de leur pays d’origine. C’est une manière naturelle et vivante de préserver « l’âme vietnamienne » à l’étranger tout en renforçant le lien avec leurs racines.
Hoang Thuy Nga a grandement contribué à l’expansion du réseau des femmes vietnamiennes en Europe. En réponse au programme « Mère marraine » lancé par l’Union des femmes vietnamiennes et relayé par le Forum des femmes vietnamiennes en Europe, elle a proposé la création de clubs « Mère marraine » visant à réunir des femmes prêtes à soutenir les orphelins au Vietnam.