À l’heure où la vie urbaine s’accélère, de plus en plus de voyageurs cherchent à se ressourcer dans les campagnes paisibles pour respirer l’air pur, vivre au rythme de la nature et découvrir la richesse des traditions locales.
S’appuyant sur cette tendance, de nombreuses localités vietnamiennes mettent l’accent sur le développement du tourisme rural pour donner un nouvel élan à la croissance socioéconomique, à la réduction de la pauvreté et à l'amélioration des conditions de vie des populations.
Un nouvel élan pour la lutte contre la pauvreté
Le Vietnam compte des milliers de villages de métiers traditionnels, riches de leur diversité culturelle et de leurs écosystèmes agricoles. Ces villages constituent un véritable « trésor » pour le tourisme rural et communautaire, fondé sur l’agriculture, l’environnement et la participation des habitants.
Le cadre politique est désormais clair. La décision no 922/QĐ-TTg du 2 août 2022 du Premier ministre a défini le tourisme rural comme une orientation prioritaire pour la construction de la Nouvelle ruralité au cours de la période 2021 – 2025, en mettant l’accent sur le rôle central des populations locales et la coopération entre communautés, entreprises et coopératives.
Ces dernières années, de nombreux villages artisanaux ont bénéficié des investissements majeurs de la part des collectivités locales afin de préserver leurs traditions et de promouvoir le tourisme.
À Bac Ninh (au Nord), le village artisanal de Dong Kỵ illustre parfaitement ce changement. La coopérative d’artisanat sur bois Dong Ky, créée en 2015, réunit plus de 60 membres et emploie près de 200 travailleurs avec un revenu moyen de 8 à 12 millions de dôngs par mois.
Grâce à une stratégie judicieuse, alliant tourisme et développement du métier traditionnel, cette coopérative a réalisé en 2024 un chiffre d’affaires remarquable de près de 25 milliards de dôngs, dont 60 % proviennent du marché intérieur et le reste des exportations. Cette dynamique a permis à de nombreux foyers de passer d’une production artisanale informelle à une fabrication structurée et labellisée.
Le tourisme rural gagne également du terrain dans la province montagneuse de Lao Cai (au Nord-Ouest). On y recense aujourd’hui près de 200 sites de tourisme communautaire, notamment dans les districts de Sa Pa, Bac Hà, Bao Yen, Van Chan, Mu Cang Chai et Tram Tau. Chacun possède ses propres caractéristiques, mais tous visent à développer un tourisme durable fondé sur la culture locale.
À Lao Cai, plus de 300 foyers se sont lancés dans l’accueil touristique, générant des revenus moyens de 40 à 50 millions de dôngs par an, certains atteignant plusieurs centaines de millions.
Le taux de pauvreté dans ces villages a diminué de deux à trois fois plus vite que dans les zones voisines. Cela démontre clairement que la culture, une fois bien exploitée, peut devenir un puissant moteur économique.
De nombreuses provinces du Centre telles que Quang Binh, Thua Thien Hue, Quang Nam, Quang Ngai ou Khanh Hoa ont su tirer parti de leurs atouts pour développer un réseau varié de destinations touristiques rurales, proposant une offre de produits touristiques de qualité, originaux et attrayants.
Plusieurs villages touristiques ont été reconnus selon les critères de l’ASEAN. Le village de Tan Hoa (Quang Binh) et celui maraîcher de Tra Que (Quang Nam) ont été honorés par l’Organisation mondiale du tourisme comme « meilleurs villages touristiques ».
Nguyen Thanh Hong, directeur du Service provincial de la culture, des sports et du tourisme de Quang Nam, a indiqué que la province possède plus de 460 sites historiques et culturels ainsi que des sites paysagers, dont plus de 300 sont situés en zones rurales.
Avec 128 sites de tourisme agricole et rural répartis dans presque toutes les localités de la province, les activités touristiques liées à l’agriculture et au monde rural à Quang Nam ont mobilisé environ 1 000 foyers, plus de 3 000 travailleurs directs et 3 500 travailleurs indirects.
En 2024, les recettes générées par le tourisme communautaire ont dépassé 150 milliards de dongs, représentant un revenu supplémentaire significatif provenant du secteur agricole et rural pour les habitants impliqués dans ces activités touristiques.
On estime que plus de 30% des visiteurs à Quang Nam vivent une expérience liée au tourisme agricole et rural.
Vers un modèle de tourisme durable ancré dans la nature
Selon les statistiques de l’Office général du tourisme du Vietnam, le nombre de visiteurs dans les zones rurales a augmenté de 25 % entre 2022 et 2024. Cette tendance confirme l’attrait croissant pour un tourisme vert, authentique et respectueux de l’environnement.
Mais le chemin vers la durabilité reste semé d’embûches. À Hanoï, sur 292 villages artisanaux recensés entre 2017 et 2020, près de 80 % souffrent de pollution, dont 47,6 % à un niveau jugé grave. Seuls 5,2 % des eaux usées sont traitées.
Ces chiffres rappellent que la croissance touristique ne peut s’affranchir des exigences environnementales. Pour développer un tourisme rural durable, il faut combiner avec la conservation des écosystèmes naturels et le développement des moyens de subsistance durables. Cela ouvrira aussi une nouvelle voie pour l'économie rurale et le tourisme national.
Lors d'un forum sur le tourisme rural organisé début novembre 2025, le professeur associé Pham Trung Luong, membre du groupe consultatif national de planification, a indiqué : « Le tourisme rural ne consiste pas à faire venir les visiteurs pour une simple photo-souvenir. Il doit leur permettre de vivre comme les habitants, cultiver, récolter, cuisiner, dormir dans des maisons d’hôtes et s’imprégner de la vie locale. La véritable valeur du tourisme rural réside dans la simplicité, le lien humain et la proximité avec la nature ».
Il a également affirmé que le tourisme rural doit s'inscrire dans une perspective de civilisation écologique, en assurant des moyens de subsistance durables aux populations, en préservant les paysages et la culture rurale, et en encourageant des comportements écoresponsables chez les visiteurs comme chez les communautés locales.
« Construire des hôtels spontanés ou bétonner les villages sous prétexte de développement touristique, c’est trahir l’esprit même de l’écologie », a-t-il noté.
Pour un développement durable, le tourisme rural doit être planifié de manière cohérente, en évitant la commercialisation excessive ou la destruction des paysages traditionnels. Les autorités locales sont appelées à former les habitants au tourisme responsable, à investir dans les infrastructures de transport et la protection de l’environnement, ainsi qu’à promouvoir les produits artisanaux sur les plateformes numériques.
Au-delà d’un modèle économique, le tourisme rural au Vietnam se profile comme une nouvelle voie vers un développement harmonieux, où la prospérité se conjugue avec la préservation du patrimoine et de la nature.