Ce lieu n’est pas seulement une halte pour les amoureux de la nature ; c’est aussi un voyage de retour aux sources, où l’âme semble se purifier au milieu des forêts d’eucalyptus, des étendues infinies de lotus et de nénuphars, et des sons des oiseaux et des poissons.
La descente à la rame commence alors que le soleil n’est encore qu’une lueur à l’horizon. L’eau, tel un immense miroir, reflète un tableau champêtre d’une pureté bouleversante. À chaque coup de rame, des vaguelettes se forment ; les rayons du matin s’entrelacent avec la brume, créant une scène presque irréelle. Plus on avance dans la réserve, plus on a l’impression de s’enfoncer dans un « labyrinthe vert », où chaque canal, chaque bande de forêt de tràm (melaleuca) diffuse un souffle de vie intense.
Au loin retentissent les appels des oiseaux, mêlés au clapotis régulier de la pirogue. L’odeur des feuilles de tràm et des fleurs de nénuphar écloses à la surface flotte légèrement dans l’air, emportant le voyageur d’une émotion à une autre. Aucun bruit de la ville : seulement la résonance d’une nature d’une pureté saisissante.
Les habitants racontent : « Dong Thap Muoi est le plus beau lorsqu’on descend la rame, laissant la pirogue glisser sur les eaux montantes ». Et cela ne pourrait être plus vrai. Lorsque les eaux du Fleuve Tien et du Fleuve Hau affluent, la réserve tout entière semble s’éveiller. Les champs de lotus s’étendent à perte de vue, chaque fleur rose s’ouvrant timidement dans la lumière matinale, libérant un parfum subtil qui envahit l’air.
Ce n’est pas seulement la beauté de la nature, mais aussi l’âme du territoire, simple, profonde, rustique et immaculée. Sur une petite embarcation, on peut s’arrêter au milieu du marécage et écouter le passeur entonner quelques vers de vọng cổ (chant nostalgique traditionnel du sud du Vietnam) :
« Les eucalyptus penchent, reflétés dans l’eau claire,
Les lotus rosés entrouvrent leurs bourgeons, le vent transporte le parfum du pays natal… »
Dans l’immensité du ciel et de l’eau, ces paroles deviennent un fil reliant le passé au présent, éveillant dans le cœur du voyageur un amour plus tendre encore pour la simplicité magnifique de Dong Thap Muoi.
La réserve n’est pas seulement un sanctuaire pour un écosystème précieux, abritant des centaines d’espèces d’oiseaux, de poissons et de plantes indigènes, mais aussi un « trésor vivant » de la culture du monde aquatique. Une excursion en pleine saison des crues est à la fois une exploration paysagère et un « dialogue silencieux » entre l’homme et la nature. Là, on apprend à écouter le vent, l’eau, le bruissement des feuilles de tràm (melaleuca), des sons apparemment ordinaires, mais porteurs du souffle spirituel de tout un territoire.
Lorsque le crépuscule tombe, l’eau se teinte de violet ; des nuées de hérons blancs regagnent leurs nids, projetant leurs silhouettes sur la surface dorée du marais. Une scène qui invite chacun à s’arrêter, à savourer ce rare instant de paix au milieu du tumulte urbain.
« La descente à la rame dans le monde vert », nul besoin de faste ni de tumulte. Il suffit d’un cœur capable de s’émouvoir pour ressentir qu’à Dong Thap Muoi subsiste un royaume sauvage d’une beauté intacte, où chaque vague, chaque lotus, chaque souffle du vent murmure une invitation :
Venez ici, ralentissez, et laissez votre âme retrouver sa teinte verte.