Ici, le tissage de brocart des Jrai ne se contente pas de renaître : il s’enrichit d’un souffle nouveau, devenant un produit touristique original qui séduit les visiteurs vietnamiens comme étrangers.

Le brocart, un récit au cœur des montagnes
À Kep, les visiteurs sont aussitôt charmés par la silhouette des métiers à tisser dressés devant les maisons sur pilotis, où les artisanes Jrai, concentrées et patientes, font danser la navette pour créer des motifs empreints de l’âme des montagnes. Chaque étoffe raconte une histoire transmise de génération en génération.
Mme Ro Cham Suynh, membre du groupe coopératif de tissage du village, confie : « J’ai appris le métier de ma mère. Aujourd’hui, les visiteurs viennent observer et acheter. Cela nous permet à la fois de préserver notre métier et d’améliorer nos revenus. »
Le brocart Jrai se distingue par trois couleurs dominantes — noir, rouge et blanc — et des motifs inspirés de la nature et de la vie quotidienne. L’artisane Ro Cham Hao explique : « Nous tissons pour ne pas oublier les coutumes d’autrefois. Les visiteurs aiment les sacs, les foulards, alors nous les fabriquons pour qu’ils puissent les acheter et que notre métier continue de vivre. »

H’Uyen Nie ne se contente pas de préserver l’art du tissage : elle l’associe au développement du tourisme communautaire. « Autrefois, nos produits avaient de la valeur mais étaient difficiles à écouler. Désormais, nous les transformons en sacs, portefeuilles ou accessoires adaptés aux visiteurs », raconte-t-elle.
En 2019, elle a mobilisé les artisanes pour créer un groupe de tissage lié au tourisme communautaire, qui compte aujourd’hui le double du nombre de membres par rapport à ses débuts. Le modèle de rotation permet aux artisanes d’accueillir les touristes tout en vendant leurs produits. « Nous donnons la priorité aux femmes défavorisées, afin qu’elles aient un revenu et la motivation de garder le métier vivant », précise-t-elle.

Un élan à soutenir pour mieux rayonner
Le village de Kep accueille chaque année entre 4 000 et 5 000 visiteurs — un chiffre encore modeste, mais prometteur pour une région des Hauts Plateaux du Centre où le tourisme communautaire reste peu développé.
Parmi celles qui contribuent à cette vitalité figure Ro Cham Monh, plus de soixante-dix ans, qui tisse encore chaque jour. Elle confie : « J’espère que les jeunes poursuivront le métier de leurs ancêtres. Tisser, c’est à la fois préserver notre culture et améliorer nos revenus. »
Nguyen Tien Dung, président du Comité populaire de la commune de Ia Ly, souligne : « Le tourisme communautaire associé au tissage de brocart est devenu un point fort de la localité. H’Uyen Nie, dynamique et créative, crée des emplois pour les femmes en difficulté. Nous envisageons de l’intégrer à l’équipe communale pour qu’elle contribue à la planification culturelle et touristique. »

Actuellement, H’Uyen Nie multiplie les partenariats avec les agences de voyages pour attirer davantage de visiteurs et cherche des financements afin d’élargir les espaces d’exposition, d’enseignement et de vie communautaire. Pour elle, chaque pièce de brocart est un “message culturel” tissé avec l’intelligence et le cœur.
La renaissance du tissage à Kep, étroitement liée au tourisme communautaire, illustre la politique de développement socio-économique intégrée à la préservation des traditions culturelles. La Résolution n°08-NQ/TW du Bureau politique souligne : « Le développement du tourisme doit aller de pair avec la protection de l’environnement et la valorisation de l’identité culturelle nationale. »
Le gouvernement a également adopté plusieurs politiques de soutien aux zones habitées par les minorités ethniques, permettant à des localités comme Ia Ly de mieux exploiter leur potentiel local.

Aujourd’hui, Kep résonne du cliquetis des métiers à tisser et s’illumine des couleurs chatoyantes du brocart. Grâce aux mains habiles et au dévouement de ses habitants - notamment H’Uyen Nie - le village écrit une nouvelle page : celle de la préservation, du développement et du rayonnement de la culture Jrai.
L’histoire de Kep témoigne d’une voie juste : combiner la sauvegarde culturelle avec le développement du tourisme communautaire, pour améliorer la vie des habitants tout en faisant briller les valeurs traditionnelles au cœur du monde moderne.