En exploitant les produits agricoles caractéristiques de leur terroir, de nombreux jeunes ont fait preuve de créativité, appliqué les sciences et techniques pour créer des produits de qualité, bien accueillis sur les marchés nationaux et internationaux, augmentant ainsi leurs revenus et créant des emplois pour la population locale.
Investir avec audace dans l’agriculture
Propriétaire d’une entreprise de production d’aluminium et de plastique dans la province de Thanh Hoa (au Centre du Vietnam), où il pouvait parfois gagner 30 à 40 millions de dôngs par jour, Tran Van Tan a décidé de tourner la page après un voyage d’études au Japon pour se lancer dans la culture et la production de thés à base de plantes : centella, périlla et céleri.
La découverte du modèle de production du thé matcha au Japon l’a convaincu qu’il devait contribuer au développement de son terroir. Constatant l’abondance de la centella asiatica à Thanh Hoa, favorable à la transformation de tisanes, il a choisi d’investir l’ensemble de son patrimoine, tout en empruntant auprès de banques, amis et proches pour financer une chaîne de production de poudre et de thé à base de centella, de poudre de houttuynia, de périlla, etc. Il a même invité des experts japonais pour installer les équipements et former ses équipes.
Aujourd’hui, ses produits couvrent tout le marché intérieur et sont présents dans quatre supermarchés gérés par des Vietnamiens au Japon. Chaque mois, il exporte également deux à trois conteneurs de centella et de houttuynia fraîches vers le Japon pour la fabrication de médicaments et de cosmétiques.
Son entreprise vise un chiffre d’affaires annuel de 20 à 25 milliards de dôngs d’ici 2025. Se souvenant de ses débuts, il confie :
« J’ai dû convaincre chaque ménage de me louer ses terres, frapper à de nombreux bureaux pour obtenir des permis de culture de plantes médicinales. À plusieurs reprises, j’ai failli abandonner face aux lourdeurs administratives. Mais grâce à ma persévérance, à ma confiance en moi et au soutien des autorités provinciales, j’ai surmonté les obstacles pour en arriver là aujourd’hui ».
Actuellement, la main-d’œuvre agricole repose en grande partie sur les personnes âgées.
Toujours à Thanh Hoa, Nguyen Van Du a choisi l’apiculture comme voie entrepreneuriale. Diplômé de l’Université de Vinh, il s’est lancé en 2018 dans le métier familial que son père exerçait depuis plus de 40 ans et qui avait permis à ses quatre frères de financer leurs études. Sur une superficie de 1 000 m², il entretient 300 à 500 ruches, chacune produisant en moyenne 10 litres de miel par an, vendu environ 200 000 dôngs/litre. Les ventes rapportent près de 200 millions de dôngs par an, auxquels s’ajoutent environ 500 millions de dôngs grâce à la commercialisation de matériel apicole.
Selon lui, le déplacement saisonnier des ruches permet une récolte continue. En plus du miel, il vend aussi des essaims dans tout le pays et produit du miel infusé aux plantes médicinales. Dynamique, il participe régulièrement aux foires locales et régionales, et met en avant ses produits sur les plateformes numériques, sites de e-commerce et réseaux sociaux.
Valoriser les ressources locales et développer le tourisme
En 2016, Nguyen Tan Vang, 36 ans, titulaire d’un master en gestion des ressources et de l’environnement (Université d’Agronomie de Ho Chi Minh-Ville), et son épouse, également diplômée en agriculture, décident de quitter la ville pour s’installer dans leur province natale. Après quelques années de négoce en produits de la mer, il loue en 2020 un terrain de 13 hectares pour créer un homestay baptisé Le Gardien de la Forêt, à Thanh Phuoc, province de Vinh Long (au sud du Vietnam).
Il explique que son projet vise à valoriser les produits locaux, augmenter les revenus des habitants grâce à la vente de produits agricoles et au développement touristique. Son complexe emploie aujourd’hui plus de 30 travailleurs locaux.
Relever le défi de « garder les gens » et « préserver l’âme du village »
Améliorer les infrastructures et développer des modèles économiques diversifiés constitue une priorité pour de nombreuses provinces. À Thanh Hoa, plusieurs programmes ont été mis en place, tels que « Soutien aux femmes entrepreneures » ou « Appui aux coopératives gérées par des femmes et création d’emplois pour les travailleuses, période 2022-2030 ».
Depuis 2017, l’Union de la jeunesse de Thanh Hoa a organisé 12 concours d’idées entrepreneuriales, dont 32 ont été financées par des entreprises locales. En tout, 180 jeunes ont fondé leur propre société.
En parallèle, le Comité populaire provincial soutient les jeunes via un programme de prêts préférentiels de 100 milliards de dôngs. À ce jour, 93 milliards ont été alloués à plus de 2 000 projets, générant 4 000 emplois stables.
Selon Nguyen Hong Thai, vice-directeur du Bureau de coordination du programme « Nouvelle ruralité » de Thanh Hoa (au Centre du Vietnam), la province prévoit de créer environ 238 690 nouveaux emplois sur la période 2021-2025 et d’indemniser 95 861 chômeurs. En 2024, le taux de pauvreté a reculé de 1,5 % (de 3,52 % à 2,02 %), avec une baisse de 1,8 % dans les zones rurales.
La province de Nghe An (au Centre du Vietnam) agit également pour connecter l’offre et la demande d’emploi, renforcer la formation professionnelle adaptée aux besoins du marché et attirer les investissements, notamment dans les filières électroniques et les énergies vertes. Elle développe aussi les salons de l’emploi, les bourses de travail et l’orientation scolaire afin de canaliser les élèves vers des filières adaptées.
Selon le vice-président de l’Assemblée nationale, Le Minh Hoan, il est nécessaire de déployer des programmes de formation et de transfert de technologies, impliquant experts, scientifiques et entrepreneurs, afin de créer de nouveaux métiers adaptés à chaque localité.
Dans la province de Vinh Long (anciennement Ben Tre), un programme « Dong Khoi pour l’entrepreneuriat et le développement des entreprises » (2021-2025) a déjà permis de former 5 379 personnes à l’innovation, au marketing et à la pensée entrepreneuriale. La province soutient aussi la reconversion des pêcheurs vers les services, le commerce ou le tourisme écologique, et encourage l’aquaculture durable.
Selon le docteur Dang Kim Son, ancien directeur de l’Institut de stratégie et de politique agricoles et rurales, il est temps de structurer le marché du travail à travers des bourses d’emploi et des critères d’évaluation réguliers. Trop spontané aujourd’hui, le marché doit se développer sur une base numérique, permettant de transformer la main-d’œuvre non qualifiée en travailleurs qualifiés.
Pour Le Minh Hoan, le développement rural doit aller de pair avec la préservation des métiers traditionnels et la transmission intergénérationnelle. Attirer et encourager les jeunes à revenir s’installer dans leur village natal est une condition essentielle pour bâtir une nouvelle ruralité et créer des campagnes attractives et prospères.