Les Pionniers du Journalisme Vietnamien

Bien avant l’émergence d’une presse moderne, le Vietnam a vu naître des figures pionnières ayant jeté les premières bases du journalisme national.

Photo: NhanDan
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Truong Vinh Ky – Le premier journaliste du Vietnam

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Truong Vinh Ky (Pétrus Ky)

Le premier journaliste officiel de l’histoire de notre nation fut Truong Vinh Ky (Pétrus Ky), érudit originaire du sud du Vietnam.

Ce savant (1837–1898) fut le fondateur et le premier rédacteur en chef du journal Gia Dinh Bao.

Il est né le 6 octobre 1837 au marché de Cai Mon, village de Vinh Thanh, tổng Minh Ly, district de Tan Minh – Vinh Long (aujourd’hui district de Cho Lach, province de Ben Tre).

Son nom de baptême était Jean-Baptiste Truong Chanh Ky, qu’il changea plus tard en Truong Vinh Ky, couramment appelé Pétrus Ky, surnommé Si Tai. Il s’installa à Sai Gon dès son enfance. Il était le troisième fils du mandarin Truong Chanh Thi, un commandant militaire. Sa famille était catholique. De ce fait, bien que son père fût un officier provincial, il était souvent suspecté par les mandarins de la cour.

Le 16 septembre 1869, l’amiral Ohier décida de lui confier la pleine responsabilité du Gia Dinh Bao, le premier journal en vietnamien publié à Sai Gon, auparavant géré par les Français. Le journal avait été fondé le 15 avril 1865.

Grâce à son éloquence, ses vastes connaissances et son style d’écriture distinctif, Truong Vinh Ky s’est rapidement imposé dans le monde intellectuel. Il a fondé et dirigé les premiers journaux en langue nationale, tout en contribuant à de nombreuses publications. Il a jeté les bases d’un journalisme vietnamien structuré, varié dans ses genres et accessible à un large lectorat.

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Photo: Baotangbaochi

Sa capacité d’écriture était exceptionnelle : il produisit 118 œuvres incluant essais, traductions et recueils. Maîtrisant 26 langues, il fut reconnu par ses contemporains, notamment par le savant français J. Bouchot qui le qualifia de « seul savant d’Indochine ».

Il mourut à l’âge de 62 ans, laissant un héritage intellectuel durable. Sur sa pierre tombale figure la citation latine : «Miseremini mei saltem vos amici mei » (« Ayez pitié de moi, du moins vous, mes amis »).

Suong Nguyet Anh – La journaliste des épreuves et du mérite

Madame Suong Nguyet Anh, de son vrai nom Nguyen Thi Khue, est née le 1er février 1864 dans la commune d’An Duc, district de Ba Tri, province de Ben Tre. Elle était la quatrième fille du poète patriote Nguyen Dinh Chieu. Outre le pseudonyme Suong Nguyet Anh, elle signait également sous d’autres noms, tels que Xuan Khue, Nguyet Nga ou Nguyet Anh.

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Madame Suong Nguyet Anh

En 1917, un groupe de patriotes l’invita à devenir rédactrice en chef du journal Nu Gioi Chung (signifiant « La Cloche des Femmes »), le tout premier journal féminin du Vietnam. Ce journal avait pour mission d’élever le niveau d’instruction du peuple, d’encourager le commerce, l’agriculture et l’industrie, et surtout de valoriser le rôle des femmes dans la société.

La rédaction du journal était située au 155, rue Taberd, Sai Gon (aujourd’hui, rue Nguyen Du, 1er arrondissement, Hô Chi Minh-Ville). Le premier numéro parut le 1er février 1918. Ce périodique porta fortement l’empreinte de Suong Nguyet Anh. Elle fut la première femme journaliste professionnelle dans l’histoire de la presse nationale.

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Nu Gioi Chung fut bien accueilli par le lectorat, mais à cause de son influence grandissante, il fut interdit après seulement 22 semaines par les autorités coloniales françaises.

Ses 58 années de vie furent marquées par des épreuves. Belle, talentueuse, courtisée, elle perdit son mari très tôt et éleva seule son enfant.

Peu avant son entrée dans le journalisme, elle perdit également sa fille. Le mot « Suong » (rosée/givre), dans son pseudonyme, symbolisait ces souffrances.

Hoang Tich Chu – L’étoile filante réformatrice

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Hoang Tich Chu

On peut le qualifier ainsi, car sa carrière journalistique ne dura que quelques années, et il mourut prématurément à l’âge de 36 ans. Hoang Tich Chu (1897–1933) est considéré comme le premier journaliste professionnel vietnamien formé en France.

Il fut aussi le premier à avoir mené une véritable réforme du journalisme national, tant dans ses conceptions que dans sa pratique.

Il fut rédacteur en chef ou figure centrale de quatre journaux renommés : Khai Hoa, Ha Thanh Ngo Bao, Dong Tay et Thoi Bao. Avec un style d’écriture clair et direct, il rompit avec les tournures archaïques et les allusions alambiquées du passé. Il orienta le journalisme vers un traitement moderne de l’information, avec une écriture accessible et engagée.

On peut affirmer que ses innovations ont profondément transformé le paysage journalistique. Comme l’écrivait un observateur de l’époque : «Même si les points de vue sur Hoang Tich Chu diffèrent, lorsqu’on évoque son nom et les journaux qu’il a dirigés, en particulier Dong Tay, on ne peut nier l’impact positif du “phénomène Hoang Tich Chu” sur la vie journalistique de son époque et des décennies suivantes. Il mérite le titre de premier rénovateur du journalisme vietnamien ».

NDEL
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